Alléluia : critique dévorante

Simon Riaux | 22 mai 2014 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 22 mai 2014 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Porté aux nues après un Calvaire de haute volée, avant de se prendre un retour de flammes critiques pour le mésestimé VinyanFabrice Du Welz signe son grand retour à La Quinzaine des réalisateurs, avec Alléluia. Une nouvelle fois accompagné de Laurent Lucas, le réalisateur Belge réinterprète une célèbre affaire criminelle, connue sous l'appellation de Honeymoon Killers, déjà portée deux fois à l'écran. Si ce récit de couple dysfonctionnel porté sur l'arnaque et le meurtre de riches femmes célibataire fait évidemment écho aux thématiques de l'auteur, radiographe cruel de couples malades. L'occasion d'un retour en grâce ?

Les spectateurs que l'esthétisme radical et le mysticisme de Vinyan avaient échaudés peuvent être rassurés, Alléluia signe le retour de l'artiste à un univers plus tangible, réaliste et crasseux. Son récit criminel s'inscrit ainsi dans un réel des plus terre-à-terre, magnifié par une photographie rugueuse particulièrement impressionnante. En optant pour un tournage en 16mm ainsi qu'un éclairage minimal, Fabrice Du Welz génère une image organique, sale, presque suintante, qui décuple l'impact de certains séquences. À l'image d'un meurtre particulièrement sauvage, dont la dimension sordide croit encore alors que les personnages se voient réduits à des silhouettes granuleuses plongées dans une orgie de violence.

 

photo, Lola Dueñas

 

La mise en scène et le montage ne sont pas en reste. Si la caméra colle généralement à l'action et aux personnages, captant les carnations avec bonheur, le montage s'autorise nombre d'effets et d'outrances. Le cadre explose ainsi sous nos yeux au rythme des pulsations meurtrières du couple d'anti-héros, jusqu'à une danse du feu paroxystique, qui déjoue nombre de pièges et précipite le film dans un délire mystique dont il ne réchappera plus. La folie comme les relations malades ont toujours été au centre des travaux de Fabrice Du Welz, Alléluia ne fait pas exception à la règle, en proposant peut-être les personnages les plus touchants jamais filmés par son auteur. Portée par Laurent Lucas et Lola Duenas, l'intrigue traite avec le cœur et le corps de la volonté de domination qui étreint tous les couples.

 

 

photo,  Laurent Lucas

 

Mais le métrage ne se contente pas de nous proposer un récit criminel aussi ténébreux que charpenté. Il s'aventure également sur le terrain de l'absurde, cher à son auteur, avec un sens du décalage parfaitement maîtrisé. Que Laurent Lucas se fasse passer avec bonheur pour missionnaire concupiscent ou que sa compagne improvise une comptine élégiaque avant de démembrer une victime, Alleluia choisit de faire éclater au grand jour les délires et pas de côtés de ses personnages. Pour autant, le scénario ne se révèle jamais goguenard et ne méprise jamais ses protagonistes, préférant maximiser l'impact de ses séquences les plus ahurissantes en dévoilant leur folie intrinsèque. Et Alléluia de se muer en un jeu de massacre aussi intelligent que profond, un film de personnages aussi inclassable qu'hallucinant.

 

 

Affiche

Résumé

Fabrice Du Welz devrait mettre tout le monde d'accord avec Alléluia, hilarante descente aux enfers, emmenée par deux monstres amoureux.

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