SOLEIL NOIR
Hollywood a de tout temps cherché à renouveler son imaginaire et ses codes, en attirant, tel un aimant, des talents venus du monde entier. S’y rendre pour mettre en scène un récit, à fortiori usant de stéréotypes évidemment liés à la mythologie de ce territoire, c’est prendre le risque d’être écrasé par son héritage, par une galaxie de représentations impossibles à s’approprier.
Et c’est exactement le piège dans lequel tombe Mélanie Laurent, en nous précipitant aux côtés d’un homme de main trahi puis pourchassé par les troupes d’un gangster, flanqué d’une prostituée mineure, elle aussi en cavale. On a bien du mal à voir ce qui différencie cette histoire déjà narrée mille fois du tout venant du drame sudiste typique. Plus embêtant, comme si la mystique de l’Amérique désenchantée assommait la cinéaste, on ne retrouve plus ici sa sensibilité.
Un sud des Etats-Unis sur le point d’imploser socialement
Elle qui avait su si bien investir des sentiments complexes dans Respire, paraît ici ne jamais trouver la bonne distance, le bon angle, pour traiter de son sujet. Tantôt grandiloquente (les monologues appuyés d’Elle Fanning), tantôt complaisante (le goût pour la mise en image des sévices physiques infligés à son héros), sa caméra semble hésiter sans cesse, jusque dans ses morceaux de bravoure.
ELLE FANNÉE
Galveston a pourtant de quoi séduire, notamment grâce à Ben Foster, toujours impeccable, confirmant ici qu’il est un joyau invraisemblablement sous-estimé. Sa souffrance brute, sa dureté minérale, et tout simplement son aura de grand faucheur désespéré sont autant d’atouts qui parviennent ici et là à faire oublier la narration défaillante (dont Pizzolatto semble aussi très largement responsable, tant l’ensemble recèle de trous béants et de déséquilibres).
Elle Fanning, où un portrait de l’innocence brisée
De même, il arrive ponctuellement que la photographie moite et étouffante d’Arnaud Potier rencontre de jolis effets de mise en scène ou de montage. C’est le cas lors de l’évocatrice ouverture et de quelques séquences d’errance, bien que, trop souvent, Galveston semble dépenser inutilement son énergie à dissimuler des approximations narratives embarrassantes. En témoignent une fusillade à la chorégraphie lâche ou une exécution nocturne seulement justifiée par la bêtise des protagonistes.
Plutôt qu’un mauvais film, Galveston a des airs de regrettable occasion manquée, souffrant d’un postulat de départ trop fragile pour que Mélanie Laurent parvienne à le transcender. Reste un produit techniquement solide, volontaire, plus que réussi.
True Detective ne valait que pour ses personnages, l’intrigue policière étant bien trop lâche et reléguée au rang d’accessoire laissant beaucoup de choses plus ou moins bien résolues au final. La saison 2 a confirmé que ce n’était qu’un petit miracle pour l’instant, donc oui auteur surestimé pour moi aussi. Sinon j’aime bien Mélanie Laurent, je serai curieux de voir son intrusion sur le sol américain malgré un matériau bancal apparemment.
Pizzolatto est un écrivain hautement surestimé. La réussite de True Detective est avant tout due à la bruillance de Fukunaga et du duo Woody/Matthew.