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L’Intervention : critique snipée

Par Geoffrey Crété
14 novembre 2022
MAJ : 16 novembre 2022
20 commentaires

Remarqué avec La Résistance de l’airFred Grivois réalise un deuxième film musclé qui dénote dans le paysage du cinéma français : L’Intervention, récit d’une opération explosive à Djibouti en 1976, qui a donné naissance au Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale (GIGN). Alban Lenoir mène la danse, épaulé par Michaël AbiteboulSébastien LalanneGuillaume Labbé et David Murgia, ainsi qu’Olga Kurylenko.

photo, Alban Lenoir

NAISSANCE D’UNE FACTION

L’intervention du titre, c’est celle de Djibouti, en 1976, lorsque des membres du Front de libération de la côte de Somarlis ont pris en otage un bus scolaire, provoquant de fait une réaction de la France puisque le territoire en était une colonie. C’est aussi l’intervention au cœur de l’acronyme GIGN (Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale), qui a prouvé lors de cet événement son utilité face à une situation de crise en milieu hostile.

 

L'Intervention : photo« Ticket, s’il vous plaît. »

 

Fred Grivois tire de cet épisode tragique, qui s’est terminé par des victimes des deux côtés, matière à un film qui respire la cinéphilie, et qui invoque aussi bien le thriller que l’action et le western. Le ton oscille ainsi entre la tension sèche et le buddy movie, avec une bande de marginaux menée par Alban Lenoir, et les excellents Michaël Abiteboul, Sébastien Lalanne, Guillaume Labbé et David Murgia. 

Le réalisateur a beau avoir à disposition des moyens de tout évidence limités (un budget de 3,7 millions, soit moins cher que bien des comédies ou films d’auteur), qui l’empêchent de se mesurer aux poids lourds du genre, il démontre une vraie adresse et emballe un film d’une efficacité enthousiasmante. Particulièrement dans le paysage français.

 

photo, Olga Kurylenko Le théâtre du chaos

 

GRAINS DE SABLE SEVENTIES

L’Intervention n’est pas là pour donner une leçon d’histoire, et Fred Grivois a heureusement pris des libertés avec les faits. C’est l’une des raisons pour lesquelles il a pu construire un film qui tire de ses moyens et ambitions modestes, une véritable force claire. Il y a peu voire pas de gras, et le spectateur traverse ce chaos poussiéreux aux côtés des personnages sans se perdre dans des intrigues secondaires simplement posées pour donner de l’ampleur ou une dramaturgie artificielle. 

Cette fausse simplicité donne un caractère spécial aux 90 minutes du film, ainsi qu’un côté old school du meilleur effet. L’action se résume à un terrible compte à rebours repoussé, empêché, questionné, avec une issue inéluctable. Conscient que cette ligne simple peut être un atout, Grivois ne cherche pas de détour, et fonce. Le film n’en ressort que plus solide et palpitant, ménageant ses effets certes simples pour construire une tension parfois saisissante. La présence du monteur Baxter, collaborateur d’Alexandre Aja qui a donc tâté du film d’horreur dont la réussite repose sur le timing, n’y est certainement pas pour rien.

 

photo Dans le désert, tout le monde vous entend tirer

 

BANDE À PART

L’autre atout de Fred Grivois, c’est son équipe de faux bras cassés. Il y a une inspiration évidente du côté d’un certain cinéma américain, avec une dynamique de groupe construite sur des personnalités décalées et très identifiables. Les petites manies de l’un et les problèmes de l’autre dessinent une bande d’antihéros attachants, tendres et ridicules quand ils ne sont pas dans l’action et la réaction.

La formule ne fonctionne pas toujours, et plusieurs situations et répliques tombent à côté, la faute à un timing un peu approximatif, et une impression que l’envie n’est pas assumée jusqu’au bout par les dialogues et les acteurs.

 

photo, Alban Lenoir Alban Lenoir, qui trace sa route toujours aussi intéressante

 

Mais ce sont justement ces mêmes acteurs qui tiennent cette Intervention avec leur charisme. Alban Lenoir est en première ligne, et rappelle une nouvelle fois qu’il est une bête au potentiel encore trop peu exploité, dont on sent l’énergie qui sommeille. C’est en outre un de ces acteurs à l’écoute des pulsations du cinéma français, qui a prouvé sa soif de diversité avec AntigangGoal of the DeadUn Français, Sparring, ou encore Balle perdue 1 et 2.

Michaël Abiteboul, Guillaume Labbé, Sébastien Lalanne et David Murgia s’imposent d’emblée à l’écran, dans un mélange de virilité légère et de maladresse irrésistible. Autour d’eux, les visages connus (Josiane Balasko, en quelques répliques) ou pas (Kevin Layne, Ben Cura) participent à la solidité du film. C’est avec un talent certain que Fred Grivois parvient à assembler et organiser cette bande.

Et lorsqu’arrive l’inévitable climax où les douilles parlent et les larmes coulent, c’est là encore avec soin que le réalisateur clôture et referme son intervention avec une maîtrise évidente. Pas de quoi en faire un film qui sort véritablement des sentiers battus, mais certainement de quoi avoir envie de saluer un (petit) essai réussi.

 

Affiche

Rédacteurs :
Résumé

Modeste mais musclé, le deuxième film de Fred Grivois se place dans l'ombre d'un certain cinéma américain, et pique un petit sprint maîtrisé qui ne manque ni de charme ni d'efficacité.

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Commentaires
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McCoy

Mouzi… un film d’action pour kids. Pas crédible du tout

Faurefrc

Un bon film, sans plus…
Ayant moi même vécu à Djibouti et ayant pris le car pour aller à l’école (au lycée pour exact) avec des militaires armés en guise de dissuasion, je me dis que le film aurait dû me marquer plus que ça.

Andarioch

Il y a un point sur lequel les ricains nous ont toujours ridiculisé, c’est les bonnes vieilles fusillades. Ce n’est officiellement plus le cas.

Ps: Olga, je t’aime

Andarioch

« -Pourquoi zéro et pas feu?
-Feu c’est trop stressant. »
Rhâââ lovely!!!

jj

film parfait

Hawaii

Colloc 1 LA RELITE ON S’EN FOUT ????????

Hank Hulé

Une série B efficace comme on aimerait en voir plus souvent. Pas parfait mais efficace. Bravo !

colloc 1

La réalité on s’en fout. Pour ça il y a les documentaires. Moi je suis la grand mére du vélo de l’oncle a Jules qu regardait passer le bus ! C’est du cinéma , et cette critique fait plaisir dans l’optique d’un cinéma de genre francais. J’irais voir ça des cette aprèm avec plaisir.

Lamouette33

Un film à la gloire de mavericks, loin de la réalité, c’est du foutage de figure.
Un des 2 enfants était la fille de la secrétaire de mon père.
Un tel truc, sans avoir pris contact avec des gens qui l’ont vécu, c’est espérer faire du pognon quand on n’avait les moyens de rien.

Matthieu Juste Doc

On reste donc sur la thématique du sniper après  » La résistance de l’air » bien bien bien !