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Le Mans 66 : critique Fast & Glorious

Par Geoffrey Crété
11 juin 2023
MAJ : 12 juin 2023
49 commentaires

CoplandUne vie voléeIdentityWalk the Line3h10 pour Yuma, Wolverine : Le combat de l’immortelLogan : cinéaste touche-à-tout et imprévisible, James Mangold explore de nouveaux territoires dans Le Mans 66, qui revient sur l’affrontement entre les écuries Ford et Ferrari autour des 24h du Mans. Matt Damon et Christian Bale y incarnent l’ingénieur Carroll Shelby et le pilote Ken Miles.

affiche

DEUX CHEVAUX 

Des années que se profile un film autour de Ford et Ferrari. Développé depuis 2013, le projet devait réunir Brad Pitt et Tom Cruise, sous la houlette de Joseph Kosinski. Plus tard, James Mangold a récupéré la course et Matt Damon et Christian Bale, les premiers rôles. Savoir que ce dernier devait incarner Enzo Ferrari dans un biopic de Michael Mann, qu’il a quitté pour être remplacé par Hugh Jackman alias Wolverine, que James Mangold a filmé deux fois, achève d’en faire une histoire amusante.

Le Mans 66 alias Ford vs Ferrari en VO, est sans surprise recentré sur l’Amérique, puisque l’affrontement entre les deux constructeurs est vu du côté de Ford. Parce que la marque ne fait plus rêver dans les années 60, le géant de l’automobile lance un grand chantier pour remporter les 24 heures du Mans, vitrine ultime pour parader et écraser son ennemi Ferrari. Ancien pilote reconverti dans la conception de voitures de course, Carroll Shelby s’associe à Ken Miles, un pilote tête brûlée et iconoclaste, pour créer un bolide ultime et remporter ce défi.

Et le film est à l’image de ce duo. D’un côté, il y a un bon samaritain, propre sur lui et droit et honnête, et un peu simplet. De l’autre, il y a un kamikaze, qui brûle la vie par les deux bouts, mené par une passion dévorante. Le Mans 66 oscille entre ces deux facettes.

 

photo, Matt Damon, Christian BaleShelby et Miles version Hollywood

 

BAS-RÉGIME

Avec son budget proche des 100 millions et son étiquette de film à Oscar (il en récupérera deux en 2020, meilleur montage et meilleur montage son), Le Mans 66 n’échappe pas aux sentiers balisés. James Mangold a beau avoir touché à une variété impressionnante de genres au cours de sa carrière, et s’être adapté à chaque fois, il n’y a pas d’étincelles de ce côté. Que les personnages discutent avec des business men, des femmes ou enfants, et le film semble en bas régime. Le scénario ne s’y attarde pas d’ailleurs, comme si l’important était immanquablement ailleurs, loin de la vie terrestre.

Rien de honteux ici, puisque l’écriture reste sobre, évite les pires écueils, et ne souligne pas outre mesure les émotions et conflits ordinaires. Le vice-président de Ford incarné par Jon Bernthal est très effacé puis totalement transparent malgré sa place au démarrage, la femme de Miles interprétée par Caitriona Balfe a quelques notes de personnalité bien senties malgré son rôle très cadré, Josh Lucas porte impeccablement le costume-cravate classique du loup des billets verts. Aucune fausse note, si ce n’est celle d’un traitement polissé, qui respecte trop les codes pour véritablement passionner.

 

photoSur le bas-côté, en attente du démarrage

 

MOTEUR À INJECTION  

Puis, quelque chose se passe. Christian Bale arrive, déjà. Il a le rôle facile – le chien fou, incorrigible, qui gesticule et casse, agresse et fonce. Il a aussi le meilleur rôle des deux, face à un Matt Damon tout en rondeur, qui arrange les affaires que son collègue met en désordre ou brûle à chaque étape. Mais Bale a une énergie et un corps sans cesse repensé, qui fonctionnent à merveille avec Ken Miles. Moins en performance que dans Fighter par exemple, il porte avec talent ce rôle faussement en retrait et digne d’une tragédie. 

Miles semble être la vraie raison d’être du Mans 66, qui vibre au rythme de ses accès de rage, d’enthousiasme, de vie. L’écriture est d’ailleurs bien plus précise et riche ici, l’homme derrière le pilote étant déchiré entre sa passion qui le consume et son rôle de père et mari. Là, le film évite avec intelligence les scènes et motifs classiques du genre, et balaye le ton moralisateur redouté, lorsque la famille n’est plus la seule raison d’être d’un homme.    

 

photo, Christian Bale Christian Bale éclipse Matt Damon

 

Attaché à cette bête en sommeil qui ne demande qu’à être réveillée et nourrie, Le Mans 66 trouve des raisons de s’emballer. Dès que les bolides démarrent, que les carrosseries vibrent et que le bitume chauffe sous les roues, James Mangold retrouve son énergie. Le découpage met en avant les visages et le métal, se rapproche de la sueur et des yeux fixés sur un horizon qui rime autant avec la victoire qu’avec la mort, tandis que le très bon travail sur le son crée une bulle de tension exaltante. Les meilleurs moments avec Matt Damon sont d’ailleurs les deux scènes où il est aux commandes d’une voiture.

Le cinéaste n’est jamais aussi à l’aise que dans ces courses, où le cœur du film bat la chamade et emporte celui du spectateur – même celui qui se contrefiche des voitures. La vraie émotion, la vraie beauté et la vraie tragédie se jouent là, avec Ken Miles, ses rêves et ses pulsions de mort qui l’ont fait entrer dans l’Histoire. Le Mans 66 est une histoire d’amour, mais ce n’est pas celle entre un mari et une femme, ou même deux amis : c’est celle entre un homme et un horizon qu’il pourchasse et qu’il rêve, quitte à s’y perdre.

 

Le Mans 66 : affiche

Rédacteurs :
Résumé

Appliqué mais peu inspiré du côté des hommes et leurs problèmes terrestres, James Mangold trouve des raisons de vibrer avec les voitures et leurs pilotes. Là, le cœur du film s'emballe et Le Mans 66 décolle, autour d'un Christian Bale encore une fois impeccable.

Autres avis
  • Mathieu Jaborska

    Un vrai blockbuster à l'ancienne, simple et sincère, qui propose en prime des séquences de course très impressionnantes (merci au sound design) et une interprétation jouissive de Christian Bale.

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Steefun* de même 4 étoiles.

Aza

@Steefun : complètement d’accord avec vous:)

Steefun

Je trouve aussi les 3 étoiles sévères. Sévère aussi avec Matt Damon ; sa scène de « bagarre » sur le trottoir avec Bale, entre autres, est assez savoureuse. Excellent film à l’ancienne pour ma part : 4 étoiles minimum !

Pulsion73

Ok, Pierre….

Pierre I. B

Le Mans 66, est un film rapide et parfait. Matt Damon et Christian Bale sont vrais et Parfaits. En résumé, du vrai cinoche. Pierre

Pierre. B

Le Mans 66,rapide, et très bien fait. On est. Proche, des personnages.
Matt Damon et Christian Bale, sont vrais et parfois. En résumé, du cinoche. Pierre

Pulsion73

Très bon film je l’ai revu hier soir. Les courses sont très bien filmées et de nuit ça devient somptueux.

Dirty Harry on entrave que dalle à ton salmigondis indigeste.
J’en ai vu des allumés mais là on tient la mèche. ^^

Faurefrc

Scotché par la performance de Bale… l’un des rares acteurs qui arrive à réellement s’effacer derrière son personnage. Sa diction, sa manière de se mouvoir, ses tics…
Pour moi, c’est le digne successeur de Daniel Day Lewis

Ethan

Le film met bien en avant le problème de lèche cul et d’heritier complètement éloignés de la vie et qui nuisent à la réussite

Il y en a tellement dans la vie et dans tous les secteurs

Ethan

L’un des meilleurs films des années 2010
4 étoiles
Christian Bale excellent
Ce personnage de Ken Miles la classe.
La mise en scène est pas mal