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Interstellar : critique les pieds sur terre

Par Marion Barlet
16 février 2023
MAJ : 17 février 2023
45 commentaires

Après la trilogie The Dark Knight et l’excellent Inception, Christopher Nolan est parti dans l’espace avec Interstellar, une épopée transtemporelle de 2h49 avec Matthew McConaughey, Anne Hathaway et Matt Damon. Pour sa première œuvre galactique, le réalisateur s’est concentré sur la philosophie d’un tel voyage et a mis l’esthétique dans l’humain. ATTENTIONS SPOILERS À GOGO !!

Interstellar : Affiche

IN MEDIAS RES APOCALYPSE     

L’apocalypse n’a jamais été aussi proche que dans Interstellar. Le futur n’est pas lointain, et tout dans les paysages, les vêtements et le langage indique que l’état de suffocation terrienne est à notre portée. La poussière s’empare du cadre, s’insinue dans les maisons et les organismes humains au point d’entraîner des migrations incertaines. Ce sont les Américains qui s’enfuient dans des 4X4 crasseux et ralentis par la fuite collective ; l’âge d’or de l’Empire moderne n’est plus qu’une catastrophe, où l’espoir est dissous dans la survie.

Le point de vue est centro-américain et prend à revers tous les acquis de cette nation : crise alimentaire, propagande anti-scientifique, défaitisme du pouvoir politique. La caméra de Christopher Nolan a traversé le miroir et décrit l’histoire culturelle et symbolique d’un pays épuisé par l’avenir.

Évidemment, dans cette ambiance de résignation hyperbolique, il y a des hommes qui continuent de lutter, des hommes de science en porte-à-faux et persuadés qu’une solution existe. Cooper (Matthew McConaughey), ancien pilote de la NASA, est devenu agriculteur et déteste ce métier, aux antipodes d’une carrière de l’espace. Dans toute la partie sur Terre, on le voit père et veuf, fou de maths sur un tracteur, borné et optimiste, mais définitivement prêt à partir pour sauver un monde épuisé.

 

Photo , Matthew McConaugheyNe me renvoyez pas aux champs

  

CONQUÉRIR LES GALAXIES, UN RETOUR AUX SOURCES

Les quarante premières minutes sont une réussite du genre. En général, dans les films de SF, le début est consacré à la préparation physique du héros ; ici, Nolan casse les codes et montre une préparation exclusivement psychologique, non pas du héros, mais de la relation fusionnelle qu’il entretient avec sa fille Murphy (Mackenzie Foy enfant, Jessica Chastain adulte, Ellen Burstyn âgée). Sauver l’humanité implique de renoncer aux siens : une fois de plus l’idée est simple, mais Nolan la pousse dans son extrême et développe le lien d’amour filial jusqu’au bout de la narration.

L’aspect dramatique n’épargne aucune effusion et tire sur la corde sensible du spectateur. Qu’on soit adepte ou non des larmes, l’émotion nous guide dans la tragédie enclenchée, où le père vit quelques jours en 50 ans et où sa fille le dépasse en âge. Le lien d’amour ne s’effrite pas avec le passage du temps, même si Murphy déteste son père pour l’avoir abandonnée (trahie croit-elle), mais retrouvée et aidée sous forme de fantôme. En comparaison, on s’étonne du peu d’intérêt que Cooper porte à son fils Tom (Timothée Chalamet jeune, Casey Affleck adulte) : situation sous-développée ou zone d’ombre dans l’affect paternel ?

 

Photo Casey AffleckOhé, j’existe

 

Tout le long du film, le réalisateur de Memento et Le Prestige fonctionne sur un modèle binaire qui met en évidence les enjeux d’une humanité en péril. Le père et l’enfant (Cooper et Murphy, Amelia et John Brand), l’amour et la mort (Amelia et Edmunds), la Terre et l’ailleurs, la croyance et le mensonge (Amelia et Pr Brand), la confiance et la trahison (Cooper vs Dr Mann) ; que ce soit des humains ou des concepts, Nolan donne à chaque élément son négatif. Néanmoins, le principe binaire n’est pas un manque de complexité, mais l’occasion d’étendre à chaque situation une nuance au schéma simple et décisif : quels choix pour sauver l’humanité ?

Partir dans l’espace est plus qu’une expérience visuelle dans Interstellar : c’est une quête philosophique de ce qui définit l’homme, de ce qui le sauve et de ce qui le trompe. Par amour on se leurre, par passion on ressent la vérité, par attachement on transmet le savoir. Le film joue sur l’omniprésence affective d’astronautes auprès de ceux qu’ils ont quittés, comme on le repère dans l’incessant montage alterné des scènes intergalactiques et de la vie des Terriens.

Cette construction en allers-retours peut paradoxalement être perçue comme une faiblesse du film, par ses répétitions qui ont tendance à rompre les passages anxiogènes des missions dans l’espace. Son utilisation permet le rapprochement entre Cooper et sa fille, lien décisif qui est illustré dans la première partie et n’est qu’une redite (assumée) par la suite.

 

Matthew McConaughey Anne HathawayEst-ce qu’ils ont bien compris que je pensais sans cesse à Murphy ?

 

AVEC LE TEMPS VA TOUT S’EN VA

Le film avance à deux vitesses et se présente comme une réflexion technique sur les ruptures temporelles. Celles-ci sont provoquées par le passage dans le trou de ver, au niveau de Saturne, qui induit un raccourci dans l’espace-temps. Ce principe d’astrophysique (hypothétique, mais acté par Nolan) permet de traverser des galaxies en un temps record. L’équipage de l’Endurance accède à l’une d’elles, où trois planètes ont été étudiées par des collaborateurs précédemment partis, et qui nécessite d’y retourner pour confirmer la possibilité d’y vivre, ou non.

La première qu’ils explorent est proche du trou noir Gargantua, dont la force gravitationnelle étire l’espace-temps. Une heure passée sur cette planète correspond à sept années terrestres et l’angoisse monte à mesure que la mission prend l’eau, au sens propre. La surface n’est qu’aquatique et se révèle invivable, d’autant que des vagues immenses mettent en difficulté l’équipage.

Cette séquence a posé deux problèmes scénaristiques. Tout d’abord, comment se fait-il que l’équipage n’ait pas aperçu les tsunamis à l’approche ? Dans un film à cheval sur les détails et dont l’intelligence des personnages n’est plus à prouver, cet aspect représente un point aveugle, difficile à sauver. Ensuite, la scène avec Doyle résonne davantage comme un passage obligé qu’une séquence émotion. Son personnage est sacrifié, parce que secondaire, sans que sa mort soit crédible dans l’action – il était à côté de la porte !

 

photoAnne Hathaway vient de remarquer que c’était drapeau rouge/ baignade interdite

 

L’exploration a duré plus de trois heures, si bien que Cooper et Brand retrouvent leur camarade Romilly (David Gyasi) avec 23 ans de plus. Il est épuisé moralement et le spectateur ressent l’anxiété croissante de l’aventure temporelle. La violence est d’autant plus frappante qu’elle n’est pas morale. La peur ne vient pas d’un mal humain, d’un mal tout court, mais d’une loi physique, contre laquelle il est impossible de lutter.

La fatalité n’est plus du domaine de dieu, mais est une donnée scientifique, qui s’appelle espace-temps/gravité. L’épisode de la planète océan provoque la panique : la mort possible dans un raz-de-marée s’accompagne de l’effroi de chaque minute perdue et de la multiplication exponentielle de chacune d’elles.

 

Photo Casey Affleck, Jessica ChastainPendant ce temps-là dans un champ de maïs

  

L’EXPÉRIENCE DE LA SOLITUDE

Interstellar est une épopée du temps (un thème central dans la carrière de Nolan, de Memento jusqu’à Tenet). Plus que la mort, c’est la solitude qui concentre la dramaturgie. L’épisode du Dr Mann est symptomatique de l’insupportable esseulement d’un homme en « terre » inconnue. Il est présenté comme le plus vaillant des scientifiques et se révèle le plus lâche. Son nom n’est pas anodin : Mann signifie homme en allemand et se rapproche du man anglais. Revers d’une même médaille, il est un homme total : grand savant et traître. L’écart de ton est flagrant dans la partition ambiguë de Matt Damon. Le passage est crucial, mais pas pour la quête elle-même.

Pour le coup, il s’agit d’une parenthèse morale où l’individu ne supporte pas d’être seul. Mann met en péril la mission d’une vie par besoin d’être un maillon de la chaîne. La tentative de meurtre sur Cooper est un peu bavarde et ampoulée, mais la séquence recèle une emphase certaine due à l’action immodérée du traître. Pour ne plus être seul, Mann décide de tuer, proposition paradoxale qui enrichit les concepts à l’oeuvre.

 

Photo Matt DamonJe te tue, mais c’est pour mon bien

 

Par exemple, la notion de solitude est complétée par celle de l’abandon. Murphy subit le départ du père comme un arrachement et ce sentiment est exacerbé lorsqu’elle apprend de Brand qu’il n’a jamais été question de retour. Le plan A est la solution parfaite, qui implique de sauver l’humanité en la transférant sur une autre planète, mais il est vrai qu’elle est peu crédible. Sur ce point, on peut s’étonner de la crédulité de Cooper et d’Amelia Brand lorsqu’ils découvrent le pot aux roses. La mise en scène insiste sur leur aveuglement, dont on ignore s’il relève plus de la naïveté ou de l’égarement, et qui ne semble, de toute façon, qu’au service d’une émotion décuplée.

À la fin du film, lorsque les plans A et B ont fonctionné, celui de sauver les Terriens et de coloniser un Nouveau Monde, on affronte la bizarrerie de savoir une double humanité coexister. La fuite de Cooper pour rejoindre Brand ne peut qu’échouer, mais provoque un happy ending où l’espoir supplante le terrassement. Amoureux une seconde fois, Cooper entreprend un voyage vers l’inaccessible, qu’on nous présente comme possible via le montage alterné, où Amelia accomplit sa mission. Le dernier plan la présente de dos, dans une étendue rocailleuse où les fœtus sont couvés dans les tentes. Elle est seule à porter leur histoire et imagine certainement que le plan A n’a pas eu lieu.

 

Photo Matthew McConaugheyCooper veut atteindre le point G d’Amelia Brand

 

Interstellar ne comprend pas de scènes contemplatives, comme elles existent dans Gravity d’Alfonso Cuarón, sorti un an plus tôt. Là où le réalisateur mexicain a misé sur le sublime de l’espace, avec des plans de la Terre, Nolan occulte cette dimension et cadre un maximum sur les visages. Les paysages de planètes sont désertiques, tristes, mais pas époustouflants. De même, lorsque Cooper tombe dans le trou noir, la caméra insiste sur son visage et non sur un imaginaire délirant ou psychédélique qui pourrait l’entourer. De ce point de vue, Interstellar est potentiellement décevant pour les amoureux d’expériences visuelles.

 

photoPoint G trouvé (pour lui)

 

LE PASSÉ APPARTIENT AU FUTUR

Cependant, s’ensuit le passage emblématique de Cooper et de la chambre de Murphy, appelé le Tesseract. L’astronaute est coincé derrière la bibliothèque de celle-ci dans un complexe temporel représenté de façon spatiale (comprendre en quatre dimensions). Il se balade entre les rayons et transmet les données quantiques nécessaires au sauvetage de l’humanité. En même temps qu’il informe le passé, il est aidé par le futur, ce qui représente une abyssale logique pour notre cerveau.

Cooper aide Murphy qui lui a offert les conditions multidimensionnelles de transmission et le concept de gravité se trouve être la clef du chapitre scientifique. Pour les non-experts, on devra s’en contenter en guise d’explication, et savourer les effets spéciaux de cet aparté. Mais n’allons pas croire que la science-fiction donne le privilège à la fiction sur la science.

 

Photo Matthew McConaughey, David GyasiElle t’a fait un schéma pour trouver 

 

Le film est extrêmement précis, comme l’assure l’astrophysicien Kip Thorne qui a travaillé main dans la main avec le réalisateur. Dans un entretien pour Courrier International datant du 13 novembre 2014, il a expliqué l’exigence du cahier des charges : tout ce qui se trouve dans l’histoire n’est pas nécessairement vrai, mais pourrait l’être. Autrement dit, aucune loufoquerie scientifique n’est présente, même si des scènes prennent pour acquises de simples hypothèses (toujours sensées à défaut d’être démontrées). 

L’astrophysicien s’est dit très satisfait du résultat, et la seule réserve qu’il a émise est celle des nuages de glace sur la planète Mann, à laquelle il a toutefois trouvé une licence poétique. Tout est donc plausible et l’une des scènes préférées de Kip Thorne est le passage du Tesseract, soit la version en 4D d’un cube. Même si aucun homme n’a jamais eu accès à une telle dimension, la mise en scène de Nolan est selon lui excellente et possède le charme de la précision.

 

photoVouiii

 

Ce témoignage a quelque chose de rassurant et d’angoissant à la fois. Rassurant sur le travail mené, preuve que le cinéma peut être méticuleux et que l’imagination s’enrichit de la science ; angoissant, car il nous fait prendre au sérieux tout ce qui se tisse dans Interstellar, du désastre écologique au danger de la conquête spatiale. On sort définitivement scotché par cette performance et son sous-texte (méta)physique, qui nous invite à croire que science sans fiction n’est que ruine de l’âme.

 

Affiche

Rédacteurs :
Résumé

Même si l'alternance des scènes dans l'espace et des passages terrestres coupe le rythme extatique de cette quête, Interstellar assume son projet : mettre l'humain au cœur de la gravité. Entre temporalité à quatre bandes, trahison pour sauver les hommes et émotion revendiquée, le film de Nolan crée un cinéma total pour une expérience totale.

Autres avis
  • Alexandre Janowiak

    Christopher Nolan délivre une oeuvre intemporelle entre science fiction, aventure et drame familial avec Interstellar. Une odyssée spatiale bouleversante, inventive, entreprenante, osée, métaphysique et audacieuse sublimée par la partition mémorable de Zimmer. Gigantesque.

  • Mathieu Jaborska

    Comment imputer à Nolan un pragmatisme désintéressé à la vision d'une telle démonstration, où les problématiques métaphysiques rejoignent naturellement un humanisme cru ? On aura rarement vu un blockbuster contemporain aussi habile dans sa capacité à happer son public sans ménager son intellect. Épique et déchirant, c'est une réussite.

  • Simon Riaux

    La plus belle réussite plastique de Nolan est aussi son plus cinglant échec narratif. Une épopée qui ne croit jamais en son spectateur, lui rabâchant des idées simplettes, jusqu'à s'embourber dans un final qui assène l'émotion et son message avec la finesse d'un bazooka.

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Flo1

Christopher Nolan, L’Evolution

Pour mieux en rendre compte sur « Interstellar », on peut analyser le film en se basant sur une des particularité de toute la filmographie de Christopher Nolan : la dualité.
Et donc ici, nous aurions:

La Tête :
Comme dans tout bon film de SF de ce genre, la science confirmée et/ou théorique (avant une quelconque réfutation) y est au service de l’imagination, pour une réflexion profonde alliant la relativité du temps et la gravité – tellement prononcée comme un mantra qu’on dirait une pub pour le film (Warner) de Cùaron – avec la destinée humaine, sans lorgner sur trop de « préchi-précha » à la M. Night Shyamalan néanmoins. Et aussi bien plus accessible au gens qu’on ne le croirait. On peut rassurer, le film est globalement simple à comprendre, la mission et ses étapes y sont exposées assez limpidement. Sauver le monde tout de même, on le comprend bien.

Comme pour Gotham et l’univers d’ »Inception », Nolan est un bien un maître pour créer des mondes dystopiques, où tout a fini par aller de travers et où le désespoir est tel qu’il recquiert des hommes de Bien pour y venir à bout. Toujours avec le moins de manichéisme possible, le bon cohabitant sans peine avec mal.
On pourrait tout de même être déçu que seul les USA (et leur base-ball, le retour du vieux Dust Bawl et de la Grande Dépression etc…) y sont seuls dépeints comme nation terrestre active. Rapport aux pionniers américains (c’est un peu un Western, avec une chasse au drone qui tient de la capture d’un pur-sang) et à la NASA bien sûr… Question de point de vue mais si c’est presque normal pour un auteur à moitié anglais d’y aller de la critique d’un Système, autant ne pas laisser les autres responsables du Monde sur la touche ?
Étrange monde arriéré qui , en plus d’avoir régressé, est surtout atteint d’inertie totale. Un avertissement capital pour le grand public et pour notre société.
Car entre notre époque, puis celle à partir duquel part Cooper, et celle dans laquelle vivent ses enfants adultes, il n’y a pas de grandes améliorations, pas d’évolution bénéfiques, rien que de la survie.
Normal, on passe tout le temps sur Terre dans un MidWest loin de toute grosse urbanisation, sans repère temporel pour situer une époque.
Alors ça rejoindrait en partie l’idée de la Fin de La Métropole pour l’Humain, esquissée déjà dans la Gotham corrompue et à chaque fois à deux doigt de tomber, dans la TDK trilogie.

Comme autres menus défauts, on peut aussi citer le fait que l’espace immense, beau et prometteur, y est souvent trop occulté à la vision par les créations humaines (le centre du film évidemment) ;
Qu’un acteur secondaire ne trouve son utilité qu’en étant une métaphore du sacrifice, et un autre de la folie maladive ;
Ou cette bizarrerie, pour un réalisateur au style souvent « froid », d’avoir un robot dont l’humour est programmable en pourcentage (humour dont ne manque pas les humains en retour).
Mais par là, on en passe aussi par de réjouissantes références à d’autres films aussi bons : et donc si « 2001: l’Odyssée de l’Espace » de Stanley Kubrick nous vient facilement à l’esprit, ce n’est pas tant par son style sec et intello, mais plus par le fait que le robot TARS soit ainsi une IA sarcatisque en forme de mini… monolithe noir ! Faut le faire, hilarant !
On peut aussi nommer déjà comme référence assumée « L’Etoffe des Héros » de Phillip Kauffman, pour le coté pionniers de l’espace/hommes avec famille au sol ;
Les films « Solaris », surtout la version de Steven Soderbergh dont la BO de Cliff Martinez, toute en petites touches, est assez proche de ce que Hans Zimmer a composé (avec plus de passages grandioses quand même) pour « Interstellar » ;
Un peu du « Contact » de Robert Zemckis (avec déjà Matthew McConaughey), pour le coté « plausible », le conseiller scientifique Kip Thorn étant ici un peu l’équivalent de Carl Sagan ;
Et un peu du « Sunchine » de Danny Boyle aussi pour l’idée de sauver le monde de là haut, avec là aussi un équipier psychopathe de trop.

La sobriété de son scénario (il condense mais ne multiple pas les arcs narratifs) est au diapason d’une image très très belle (en pellicule et IMAX), et d’un rythme qui nous immerge en prenant son temps. Techniquement d’ailleurs tout est bien fichu, comme le plus souvent chez Nolan, sans trop manquer de surprise, ce qui est assez talentueux pour le souligner. Tout cet habillage au service, cette fois, des acteurs qui sont pour le film…

Le Coeur :
On le sait, Steven Spielberg devait revenir à la SF grâce à cette histoire, y compris dans un genre familial qu’il a soumis comme donnée principal à son scénariste, Jonathan Nolan, frère de, avant le passage de relais. Celà permet enfin au réalisateur d’explorer un sentier émotionnel d’une autre façon que dans ses précédents opus.
Car avant ça, les émotions chez Nolan y étaient souvent synonyme de perte chez ses héros, manipulées par autrui (ou par leur subconscient troublé) lorsqu’ils ne s’y attendaient pas. Ou responsables de leur colère égoïste.
Là l’émotion est le carburant de tout le film et des héros qui, faute de mieux, s’y référent à chaque fois qu’ils plongent de plus en plus loin dans l’inconnu. Quitte à être un chouïa maladroit à un moment où l’Amour essaye d’y être quantifié, provoquant un bref déséquilibre du film qui peut en perdre certain. Mais peu de dégats à ce niveau, ni trop de gnan-gnan, il se rattrape.

Matthew McConaughey, devenu maintenant le sosie physique et artistique de Paul Newman, est très bon comme depuis quelques temps, loin de toute performance mais à la fois solide en explorateur un poil cynique comme sensible en père de famille éploré. Et dont la distance, contrairement aux pères dans « Le Prestige » et « Inception », est plus déchirante car plus démonstrative. Avec justesse heureusement. Le Héros Américain dans sa splendeur – il y est question de courage, mais aussi de petite critique de la masculinité (le Dr « Mann »).
Anne Hattaway en est son pendant presque inverse (fille de au lieu de parent), aussi à l’aise dans l’action que la réflexion intelligente, mais bien plus à fleur de peu. Avec une micro amorce romantique pour elle et lui, au delà d’une amitié platonique. On aimerait en voir plus, c’est sûr.
Jessica Chastain joue aussi une « fille à papa » elle-même intelligente, têtue et cynique (son « tu veux perdre un autre fils ? » est glaçant), et un enjeu scénaristique capitale car pas seulement comme balise pour Cooper (Murph = Earth, fastoche).
Bref ils sont le trio indivisible (même si l’une n’apparait qu’au bout de 50 minutes) qui porte tout le film, sans exception. Ainsi, les autres acteurs peinent un peu à être plus mémorables, exception bien sûr de la plus jeune Mackenzie Foy, touchante et jamais énervante, preuve que Nolan sait aussi diriger les enfants plus que nécessaire (dommage qu’il ne l’ait pas fait plus tôt dans ses « Batman »). Et les patriarches John Lithgow, vieux débonnaires, et le fidèle Michael Caine, à nouveau roublard qui a des choses sur le coeur.
Et du sympathique Bill Irwin/TARS… aussi bien « physiquement » que vocalement.

Grâce à tout ça, « Interstellar » est un grand film d’aventure, pas le meilleur car particulier dans sa forme, mais qui réussit à nous emmener vers une forme d’espoir en l’avenir par des moyens inattendus.
Et pour ceux qui se frustreraient que l’histoire semble s’étirer un peu trop en longueur après que celle-ci ait bouclé la boucle, Nolan nous cueille en relançant cette boucle vers une nouvelle aventure. Ce qu’on pourrait définir par :
« Vous pensez être arrivé au bout, mais ce n’était que le début de quelque chose de plus grand » (dont une romance à la Adam et Ève).
Splendide !

Cinégood

Un chef d’oeuvre (raisons très bien expliquées par Kyle)

J’ai souvenir de notes beaucoup moins élogieuses d’EL lors de sa sortie en 2014, mais impossible de retrouver la critique de l’époque… 😉

youl

Quel film de SF a fait mieux depuis Interstellar ?

Je cherche et je ne trouve pas……

Faurefrc

@Earthis….

La fin paraît simpliste, expédiée et trop « happy end »… mais on est chez Nolan, alors tout n’est pas forcément si simple.

Je fais notamment partie de ceux qui pensent que toute cette fin n’est qu’une projection mentale du personnage principal avant sa mort dans le vide interstellaire.
D’ailleurs, Matt Damon lui dit bien : la dernière chose que vous verrez avant de mourir ce sera le visage de vos enfants.

Earth is un immobile closed System

les effets specieux sont raffinés et soignés,,au moins Nolan est un pro et çà se voit, mais le film et long , Matthew MC joue tres bien dans le film, mais il a une sale tête, j’ai cru qu’il était malade au temps du tournage du film, bref,
il dure pas loin de 3h le film a 15 min pres, je me demande si c’est pas pour cela que le fin du film est torchéé à l’arrache,sa fille sur son lit de mort, le degage en 1 minute et quelques,, elle prefere mourrir avec ses enfants et petits enfants,, et dire qu’elle a attendu toute sa vie le retour du père…
et le type se casse sur la pointe des pieds,il se barre avec son astronef comme çà (il a apprend Qaund à piloter ce truc lol), une fin gâchée qui gâche tout le film

Eddie Felson

@rédaction
Dommage que le film de Scorsese « Color of Money » avec Newman, Cruise, Mastrantonio et Turturro n’est pas eu sa critique de publiée le soir de sa diffusion… on a déjà tellement échangé sur Interstellar qui plus est diffusé très souvent. Le documentaire sur Cruise diffusé par la suite était passionnant.

Marc

Intersellar en un seul mot Chef-d’oeuvre.

Cycloptera

Je suis moins enthousiaste que vous.Je trouve qu’il y a deux films dans le film.
• Un film d’anticipation assez brillant qui met en scène la relativité d’une façon un peu plus réaliste… enfin… (le robot est intéressant, le trou de ver quoique irréaliste est plaisant, les effets temporels relativistes sur les planètes géniales) mais la vision dystopique terrestre est niaise. La terre résumé à des champs de maïs… bof.
• et la niaiserie est le reproche que je fais au film. Car l’histoire d’amour père fille – l’amour comme dimension de l’univers… oh la la … quelle soupe !

Je trouve le film flatteur à l’œil… mais le fond très naïf.

Je préfère High Life de Claire Denis dans le genre : film avec Trou noir.

Gargantua

Magistral. Malgré les années ce film reste toujours aussi excellent.
La meilleure partition de hans zimmer à ce jour.

Cinégood

A Slater

Il faut relativiser.
L’homme n’a pas les moyens de bousiller la planète, il ne peut que bousiller sa civilisation.
Si on ramène l’histoire de notre planète à un an, L’histoire humaine représente la dernière minute de l’année. (Les dinosaures ont régné des millions d’années en comparaison. Nous en sommes très loin !).
Quand bien même la planète aurait besoin d’un million d’années pour reconstituer flore et faune ce ne serait pas grand chose…