CROIX DE BOIS, CROIX DE FER, CROIS EN MOI
Menteur est une comédie suspendue à un fil, qui ne repose que sur un seul gag. Et encore, c’est à peine un gag, plutôt une question si élémentairement bête qu’on la croirait sortie d’un gros fumeur en pleine montée de Carambar : « Imagine si tous tes mensonges ils se réalisent pour de vrai ? ».
Ce seul principe moteur régit tout l’univers du film qui, en faisant surgir toutes les vérités de son protagoniste, s’attache à déconstruire méthodiquement la success-story de celui-ci, jeune cadre dynamique bling-bling, dragueur, narcissique superficiel et surtout, terriblement irresponsable, puisqu’il répond à la moindre obligation par un mensonge. Des mensonges qui s’empilent, et finissent par exploser en devenant réalité.
Mais Jérôme n’est pas mythomane, car il n’a aucune pathologie : c’est juste une ordure. Soudainement, le sillon creusé par le film pourrait déterrer une mine d’or, réveiller tout un réseau de réflexions sur les apparences. Pourquoi n’y a-t-il pas de traductrice pour le client russe Jérôme ? Mon assistant a oublié, il est narcoleptique (non). Pourquoi devrais-je coucher avec toi Jérôme ? Je suis un enfant battu (non), ça me donne de la contenance. Pourquoi es-tu plus heureux que ton frère Jérôme ? Parce que mon frère est un loser intégral (non). Toujours de la faute des « autres » qui pourtant l’aiment et l’apprécient, mais dont il salit l’image pour mieux se faire valoir. C’est plus facile d’enlaidir le monde que de s’embellir soi.
D’ailleurs, le monde n’est pas dupe, mais peu importe à Jérôme d’être cru. Ordure pure : non seulement il ment, mais en plus il persévère. C’est tellement admis que Jérôme ne se donne même plus la peine de construire des bobards crédibles. Il y a un bon film dans Menteur : l’histoire d’un jeune premier qui arrive à sa place de jeune premier parce que le monde récompense ceux qui se foutent du monde, soudainement déboulonné par un sacré tour de karma scénaristique. Bien sûr, c’est un dispositif expiatoire antédiluvien (salut Molière, bonjour Menteur, Menteur), mais remis à la sauce moderne et avec les moyens technologiques de 2022, il y avait moyen de dérouler une satire au vitriol et une forme de spectacle visuel.
Une séquence de « fausse » maltraitance « infantile » plus glaçante qu’il n’y paraît
LICORNE FRENCH TECH
Il n’en sera rien, puisque cette idée forte et ludique – à défaut d’être follement originale – sera, comme d’habitude, traitée par-dessus la jambe par notre cinéma national. On reconnaît un film « grand public » français à son incapacité à prendre son sujet au sérieux. Car faire de la comédie, c’est sérieux. Peut-être même plus sérieux que n’importe quel autre genre, puisqu’elle requiert finesse d’analyse, multiplicité des niveaux de lecture, précision rythmique et créativité visuelle. Mais Menteur – comme tant d’autres – aligne les zéros en la matière. Zéro tempo, zéro technique, zéro effort, zéro rire. Zéro plus zéro, que des blagues à Toto.
Alors là c’est drôle donc tu fais une drôle de tête
C’est tout ce qu’il reste à Menteur pour remplir de vide 1h30 de film, et 1h30 de votre précieux temps mieux dépensé à faire zéro effort à la maison. La critique est connue d’avance, alors exécutons nous rapidement d’une balle dans la tête : la photographie ferait passer une campagne marketing d’agence de tourisme pour du Caravage, le tempo comique confond rapidité chirurgicale et précipitation de tâcheron, et l’écriture oscille entre absence d’inspiration et absence de rigueur. Faux raccords, plaisanteries éculées, clins d’oeil musicaux lourdingues (chants grégoriens quand y’a des moines, choeur de l’armée Rouge quand y’a des Russes) et incohérences s’enchaînent tant qu’on se dit qu’il y a aussi absence de réalisateur.
Sans rire, qui rit encore en 2022 de vannes sur des curés dans un monastère ? Qui rit encore en 2022 de voir des Russes austères boire de la vodka ? Qui rit encore en 2022 de voir tout un casting féminin tomber en pâmoison face à l’homme parfait ? On sera d’ailleurs reconnaissant envers le casting secondaire – Artus, Bertrand Usclat et Pauline Clément – de faire un maximum d’effort pour tirer le marasme habituel de la comédie française vers le haut, bien qu’il soit douloureusement ironique de voir ces deux derniers s’épanouir au milieu de clichés fossilisés qu’autrefois ils n’hésitaient pas à décaper (ce qui nous rend d’autant plus anxieux de découvrir le prochain subtilement nommé Jumeaux mais pas trop).
Passer de rire des clichés à cliché du rire
BROUTE TOUJOURS
Mais ces collaborateurs sans démérite sont bien peu de choses face à la quantité de boulets qui coulent Menteur, dont son notable acteur principal. On n’en attendait rien, mais on est quand même déçus de Tarek Boudali (ce qui en dit long depuis Epouse-moi mon pote), qui ne convainc que lorsqu’il pleure. Ce qui nous persuade qu’il est temps pour lui d’envisager sérieusement de creuser son registre dramatique. Au pire, qui sait, peut-être qu’il arrivera alors enfin à nous faire rire en essayant de nous faire pleurer.
L’émotion, au doigt dans l’oeil
Reconnaissons également à Menteur une certaine envie de mettre son argent sur l’écran et de faire montre d’une certaine ambition visuelle. Une noble tentative, mais qui là encore se solde par un échec tant les effets spéciaux numériques sont bâclés et tant la démesure se limite à quelques chorégraphies d’arts martiaux dont même Steven Seagal serait fier et une séquence d’action en voiture d’une nullité ahurissante, à la fois hommage et consécration de la fameuse course poursuite du Corniaud. Incroyable de se dire qu’en matière d’action comique, 1965 est à des années-lumière de 2022, que les bonnes soeurs du Gendarme de Saint-Tropez sont plus hardcores que le jeune abruti de Nice.
Alors, s’il y a bien un bon film dans l’idée de Menteur, son exécution indigente appelle à un remake issu d’un système de production un tant soit peu exigeant et rigoureux (pas celui des chaînes de télé françaises donc). Ironique, pour un remake. Mais, logiquement et en dernière analyse, dire cela revient à dire que les qualités de Menteur sont moins cachées que sabotées par le film lui-même et son absence totale d’exigences. Difficile de plaindre une oeuvre qui s’enterre sous deux tonnes de paresse artistique, et au moins deux décennies de laisser-aller cynique dans les hautes sphères de la production à la française. Il serait temps d’arrêter de brouter et de se mettre à creuser.
Juste l’affiche ! Comment on peut valider une daube pareille…
Moi je suis dépassé par autant de mauvais goût franchement .
Le sénar de MENTEUR MENTEUR et celui de YES MAN , passé au mixeur et ça te donne menteur avec tarek boudali alias la version wish de JIM CAREY…
Vive la comedie Française… Houra…
@Christophe turpin
On est tous la honte et le « torche-cul » comique de quelqu’un, c’est le jeu et tant mieux. Et si notre seule honte est d’avoir des légendes pas drôles sous nos photos, en accompagnement de notre texte, on va dire que c’est l’équivalent d’une affiche hideuse pour un film. Si c’est que ça, on a vu plus honteux. Notamment dans le cinéma français.
Merci pour votre passage en tout cas !
Le film est probablement nul et vous avez raison de dénoncer la constante nullité des comédies françaises qui contribue à creuser la tombe du cinéma hexagonal, avec les films CNC. Bref. Seulement voilà, vous qui semblez si exigeants en matière d’humour, comment pouvez vous être aussi lamentables ?! Quel est le torche-cul qui rédige vos pseudos taglines de merde sous les photos C’est la honte. Biz
c turpin, scénariste (jean-philippe, la colle…)
rarement vu un navet comme ça!!!!
Les enfants de moins de 10 ans peuvent regarder ce film vois ton des parties intimes ?
Je n’ai jamais compris le succès public d’olivier Barroux.
J’ai vue une épisode de ciné trouille qui a mieux exploiter le concept de menteur que ce que propose ce film
Remake d’un film québécois qui était tout aussi banal.
Pâle copie d’un film québécois sortie il y a plus de deux ans…