Parce que c’est son projet
C’est avant tout l’oeuvre d’un génie discret du cinéma hollywoodien. Phil Tippett a façonné la culture populaire américaine. Passionné par le travail de Ray Harryhausen, il s’est fait engager à la fin des années 1970 sur un petit film appelé Star Wars, pour lequel il a fabriqué une séquence de jeu d’échecs. Ce fut le début d’une carrière proprement ahurissante, durant laquelle il a tout simplement révolutionné la stop-motion, voire les effets spéciaux à Hollywood. Il a offert à Star Wars ses effets les plus célèbres (les AT-AT, le Rancor), à Robocop son ED-209, à Willow son dragon à deux têtes et à Starship Troopers ses insectes – en CGI cette fois.
Car son implication sur Jurassic Park symbolise la fin d’une ère et une transition à laquelle il a activement participé. S’il est parvenu à s’adapter à l’émergence des effets visuels numériques, il est revenu plus discrètement à ses premières amours. Dès 1984 déjà, il réalisait dans son coin et grâce à son studio Tippett studio Prehistoric Beast. Mais ce n’était qu’un apéritif avant ce titanesque Mad God, véritable magnum opus échappant à tout cahier des charges contemporain.
L’idée lui est venue après son travail sur Robocop 2, pour lequel il a construit l’une de ses machines animées les plus complexes. Mais il abandonna le projet au moment d’embarquer pour l’aventure Jurassic Park, qui allait confirmer la fin de l’utilisation de la stop motion dans les superproductions américaines. Ce n’est qu’une vingtaine d’années plus tard que ses collaborateurs tombèrent sur de vieilles maquettes entreposées dans un coin de son studio à Berkeley, et le convainquirent de reprendre son travail, bien aidé par une campagne de financement participatif couronnée de succès.
Depuis 2014, plusieurs segments, animés avec tout le temps et la patience nécessaires à une telle entreprise, ont été diffusés, attisant encore l’attente autour du film entier, finalement achevé par Tippett seul en plein milieu du confinement, en 2020. Un labeur impressionnant, qui a tenu en haleine les amateurs de stop-motion et les cinéphiles du monde entier durant de nombreuses années. Ceux-ci ont finalement pu découvrir la bête en festival, et notamment en 2021 en France à l’Étrange Festival, au FEFFS et au PIFFF.
Une sortie salle n’était pourtant pas assurée, la noirceur du long-métrage d’animation ne le destinant assurément pas à un jeune public. Mad God est une oeuvre jusqu’au-boutiste, qui ne ressemble à rien d’autre (malgré ses influences picturales évidentes). Heureusement, Carlotta a offert l’occasion au public français de le découvrir dans une vingtaine de salles.
Drag me to hell
« La forme finale de Mad God, c’est le souvenir qu’on en a après visionnage ; c’est comme se réveiller et explorer le souvenir d’un rêve qu’on vient de faire. C’est ça, l’expérience. Pas le film lui-même – le film est seulement un moyen d’y parvenir » explique l’artiste. On préfèrera le terme « cauchemar », tant l’expérience en question est éprouvante. À la hauteur, somme toute, de sa conception, d’ailleurs documentée dans l’excellent documentaire Phil Tippett : des rêves et des monstres d’Alexandre Poncet et Gilles Penso.
Et on en sort bel et bien avec l’impression d’avoir assisté à un accomplissement. Les stigmates de sa construction au long cours (les changements incessants d’instruments de captation, notamment) en ajoutent finalement encore un peu à la radicalité du projet. Tippett nous plonge dans un univers lui-même en pleine mutation technique permanente, décati et au bord de l’effondrement. Une sorte de macrocosme sans frontières qui s’enrichit de sa propre décadence, un monde à la fois post et pré-apocalyptique qui ne pouvait naître qu’entre les mains d’un artiste omniscient. Un monde modelé par un dieu fou.
On comprend vite qu’il nous faudra abandonner toute idée de narration. Au fur et à mesure de la progression du héros anonyme dans un labyrinthe de récup’ hypnotisant, sa quête semble la même que la notre : s’imprégner de ces décors s’imbriquant les uns dans les autres, ces monstres destructeurs et ces passages secrets vicieux, au point presque de s’y noyer. Car évidemment, personne ne ressort indemne d’une telle descente aux enfers.
Toutefois, il serait peut-être hâtif de résumer l’oeuvre à un gigantesque parcours de montagne russe visuel. Le monde pensé par Tippett évoque plus une dégénérescence du nôtre. Il n’est caractérisé que par la guerre, la pollution et la survie. C’est comme s’il décrivait une société si corrompue qu’elle a fini par évacuer la logique de ses institutions et constituer son propre ordre nonsensique, qui s’expérimente plus qu’il ne se comprend. Une expérimentation franchement unique, qui ne pouvait s’animer qu’image par image.
malheureusement. comme souvent avec ce genre de film, ca ressemble plus a un tres treeeees treeeeeeeeesss long clip video ,et une demo technique, plutot qu a un film qui raconte une histoire.
du coup, on regarde, comme on visiterait un musee, en se disant que c est beau, mais qu on s ennuie un peu.
je prefere un bon jeu interressant zn pixel, qu un jeu AAA avec des quetes fedex sans interet, et c est pareil pour les films.
c est l histoire avant tout qui m interresse, et ici c est loin d etre l element le plus important du film.
Vu cet après-midi, mais comment expliqué ce Dieu Fou.
Étrangement étrange, glauquement contemplatif, bizarrement poétique, dans un délire steamo-punko-bio-mécanico-organique où l’infiniment grand humain se recycle à l’infiniment petit microbien.
Je ne saurai me prononcer sur la réalisation ou la technique, je ne suis point qualifié pour cela, mais je note au passage une jolie bande son.
En bref, j’ai pas vu le temps passé, raccord avec la critique, je recommanderais aux curieux, à ceux qui aiment l’artistique bien singulier ou les productions « délirantes ».
Peut-être que j’en attendais trop de ce film mais il m’a parut court. Je n’ai pas ressenti de longueur. Juste un peu déçu car je m’attendais à « plus » dans la bizarrerie du projet.
Alors certes, c’est magnifique, incroyable qu’un tel projet avec un tel sujet voit le jour. Une vision d’un enfer singulier… mais qui ne m’a pas si marqué que ça. L’image subitement infernal qui marque la rétine à jamais est assez « électrique » tourne pas trop en dire mais je m’attendais à plus… surtout après cette intro biblique hors du temps !
Mais je le conseille fortement à tous (n’emmenez pas vos enfants -12ans) encore plus si vous aimez les rêves, les cauchemars et les belles imageries. C’est du Cinéma pur et simple (ou pas).
Certainement un monument mais je me suis vite ennuyé personnellement, et l’ajout de dernière partie perd en force.
J’ai beau être très amateur d’animation et du travail de Tipett, je me suis tellement ennuyé que je n’ai pas réussi à le regarder en entier. Il a le même problème que beaucoup de films en stop motion, qui finalement sont presque des tech demo où on observe l’artiste s’amuser à voir ce qu’il arrive à faire avec ses jouets. C’est quelque chose que j’aurais plus volontiers consommé en format court, ou des vignettes animées dans le cadre d’une expo audiovisuelle. Mais là l’émerveillement pour la technique bien faite n’a pas les épaules pour porter 85 minutes de film selon moi. Au delà de ça ya pas grand chose à part une esthétique glauque pas particulièrement originale et des thèmes de fin du monde éculés.
Tant que la stop-motion sera traitée avec déférence simplement parce que c’est laborieux à faire et que ça se voit (ce qui n’est pas nécessairement une bonne chose dans le média de l’illusion qu’est le cinéma), elle continuera de produire des œuvres bancales en termes de storytelling audiovisuel, auxquelles personne ne s’intéresserait sans la prouesse technique. Même l’article ici, pourtant positif, peine à dire grand chose sur le film lui-même, et se rabat sur une rétrospective de la carrière de Tipett et le making of du film. C’est « une expérience », c’est « unique », on est pas loin du degré zéro de la critique, mais ce n’est pas la faute de l’auteur. Le film est creux à l’intérieur d’une coquille qu’on a pris grand peine de rendre repoussante, un peu comme un adolescent s’habillant en prenant soin de casser les codes pour masquer la banalité de son spleen.
Vu aux Hallucinations Collectives de Lyon l’année dernière, énorme choc visuelle, certains plans marquent la rétine pour très longtemps. Ne pas s’attendre à un semblant de narration cohérente, on est dans un rêve (ou plutôt cauchemar) hallucinatoire fiévreux. Visuellement c’est de la folie, par contre le côté patchwork de la confection se fait parfois ressentir au niveau du rythme, ça pédale un peu dans la semoule de temps à autre. Mais c’est tellement rare de pouvoir profiter d’une telle œuvre en salle, on a vraiment de la chance, merci Carlotta.
Une ode à l’animation et à l’horreur à l »état pur. Vraiment très dérangeant comme film. Vu il y a plusieurs mois et j’y pense encore souvent.
J’avais très envie de l’aimer mais je l’ai trouvé à la limite du regardable.
Très curieux de voir cet ovni ! Ca a vraiment l’air unique !