Du roman épistolaire au survival en haute mer
Pour toute personne un tant soit peu chatouillée par la littérature gothique et les histoires de vampires, le concept du nouveau film d’André Øvredal avait de quoi faire saliver. Adapter l’un des meilleurs chapitres de Dracula, à la fois mystérieux et efficace mais aussi sous-exploité (car oui il reste encore des choses à dire sur le plus célèbre et le plus glamour des vampires), c’était la bonne idée pour séduire les fans et intriguer les autres.
Dans le roman, la traversée à bord du Demeter, qui conduit (sans que l’équipage le sache) Dracula jusqu’en Angleterre depuis la Transylvanie, ne fait l’objet que d’un seul petit chapitre, et n’est décrite qu’à travers des extraits du journal de bord du capitaine. Ceux-ci relatent, sans que les marins y comprennent grand-chose, qu’une créature inconnue se trouve à bord et décime l’équipage nuit après nuit.
Ton grand-père quand il voit un mur porteur
Le défi du film était donc d’inventer la chair et les images autour de ces quelques extraits tout en sous-entendus, qui laissent supposer beaucoup de choses sans les dire (et sont terrifiants pour cette raison). Et par bien des aspects, Le Dernier Voyage du Demeter livre exactement ce qu’on lui demande. Avec des plans fabuleux du navire qui lutte contre les vagues en pleine nuit, tantôt éclairé par la pleine lune, tantôt par la zébrure des éclairs, le spectateur est plongé pour son plus grand plaisir dans les tableaux de Joseph Vernet et d’Ivan Aïvazovski. Dommage, peut-être, que le trait ne soit pas encore plus forcé et ces plans plus nombreux.
Le décor principal, quant à lui, est l’intérieur du bateau tout en bois, fait de coins et de recoins biscornus, éclairés par quelques lanternes et rayons de lune, qui rappellent les meilleurs moments de l’attraction Pirates des Caraïbes à Disneyland. Et pour relever tout ça, quelques apparitions silencieuses et obscures du fameux vampire, qui est à son zénith lorsqu’il est mis en scène comme une gargouille immobile à travers la fumée. Des images saisissantes qui complètent cette parfaite liste d’ingrédients. Et pourtant… Toutes ces qualités sont malheureusement poignardées dans le dos par tout ce que le film ne parvient pas à faire.
« Yo-ho yo-ho et une bouteille de rhum »
AU BOUT DU COMTE
Malgré cet excellent terreau, le film se tire balle dans le pied sur balle dans le pied. Sa première et plus grosse erreur étant de vouloir se parer d’intelligence en étant bavard. Et alors là, qu’est-ce que c’est bavard ! Sauf que les dialogues, en plus d’être vides d’intérêt pour la narration comme pour la construction des personnages, sont terriblement mal écrits. A la fois niais et lourdingues, ils ressemblent au brouillon d’une poésie écrite en classe par un collégien qui préfèrerait jouer au foot.
Ces blablateries tentent tant bien que mal de colmater les nombreuses incohérences du scénario, et les décisions absurdes que prennent les personnages pour s’en sortir. A ce sujet, le film abandonne toute logique dans son dernier tiers, pour achever de ruiner ce qu’il avait mis en place jusque-là (le mutisme saisissant de Dracula, l’inéluctabilité du sort des marins, la manière dont le vampire peut se déplacer…). Petit à petit, tout ce qui laissait espérer se change en déception grotesque, tant les écueils dans lesquels le film tombe sont épais et évitables.
Javier Botet se cache sous le costume de Dracula
La même mécanique s’observe aussi à la mise en scène, car là où la préparation des apparitions de Dracula est soignée et prenante, la révélation elle-même et l’action qui s’ensuit souffrent d’un montage et d’une réalisation très bancales, qui ôte immédiatement le souffle de chaque moment de tension ou de combat. A cela, la toute dernière scène ajoute un point final de ridicule, tant elle est superflue, maladroite, et ruine encore un peu plus la sublime intention de départ.
Avancée chaotique d’un film qui a de magnifiques chaussures mais qui ne sait pas mettre un pied devant l’autre, l’histoire du Demeter aurait pu être soutenue (et peut-être sauvée) par ses acteurs. Mais, trop empêtrés par les dialogues immatures et une écriture simplette, Corey Hawkins peine à dégager un semblant de charisme, et Aisling Franciosi est à mille lieux de la force qu’on lui a connue dans The Nightingale de Jennifer Kent. Les rôles secondaires tenus par Liam Cunningham et David Dastmalchian ne sont, eux, qu’une esquisse de ce qu’ils auraient pu être.
C’est donc ça, monter sur les planches
pas un chef-d’Øvredal
Pourtant, celui qui est encore bien en-dessous de son propre talent, c’est André Øvredal lui-même, puisque le public était en droit d’attendre bien mieux du réalisateur de The Jane Doe Identity. Si sa filmographie est inégale, un tel projet semblait fait pour lui, et coller à ce qu’il avait fait de meilleur dans Jane Doe. Une atmosphère de huis-clos transposée sur un bateau, une présence insaisissable qui plane autour des personnages et des apparitions terrifiantes : c’était tout ce avec quoi le réalisateur avait brillé dans son film de 2016.
Comment expliquer cette perte de contrôle totale sur les moments censés être effrayants et sur la montée de la tension ? C’est bien de là que vient la plus grande déception du film, parce qu’Øvredal avait le profil idéal pour faire du Dernier Voyage du Demeter le film qu’il méritait d’être.
Pourtant, son manque évident d’inspiration transpire dans chaque séquence (à part, comme mentionné plus tôt, dans les plans qui ressemblent à des scènes marines picturales), à tel point que l’une des séquences finales semble être complètement pompée sur une autre fiction récente de vampires. Sans trop en dévoiler, la scène en question reprend de manière assez frappante le concept de la meilleure séquence des Midnight Mass, la mini-série de Mike Flanagan qui mettait elle aussi en scène des goules aux dents longues.
La série étant encore très récente dans l’esprit des spectateurs, cette reprise intentionnelle ou non est lourde à digérer, d’autant qu’elle souffre fortement de la comparaison, l’écriture et la qualité des CGI réduisant à néant la moindre émotion. Bref, un ratage dans les grandes largeurs pour un réalisateur et une histoire qui valaient bien mieux que ça. Reste plus qu’à espérer qu’Øvredal fasse mieux la prochaine fois, et que quelqu’un d’autre redonne sa chance à l’histoire du Demeter.
Et bien moi j ai beaucoup aimé, la photographie est magnifique, les effets spéciaux et design de la créature sont très aboutis. J ai passé un excellent moment de cinéma !
Effectivement, une promesse non tenue. La très belle photographie et la belle ambiance générale ne sauveront pas une histoire cousue de fil blanc et dont on sait tres bien de quelle manière tout cela va finir. Et surtout, on a rarement vu des marins aussi bavards (les dialogues sont épouvantables) et aussi craintifs. Aussitôt vu, aussitôt oublié.
@Rafe547
je te le conseil c’est flippant angoissant le design de Dracula es incroyable
J’en étais sûr qu’il
Allait être descendu en flamme. J’irai le voir dimanche et je jugerai par moi même.
Je viens de voir LE DERNIER VOYAGE DU DEMETER , frisson tout le long du film renouveler une histoire si connue j’ai accroché . Le design de DRACULA est juste flippant horrible sanglant . j’en dit pas plus je le conseil pour un public avertis de ce genre de film.
C’est vraiment dommage d’une part que le film ne soit pas terrible selon la critique d’EL et d’autre part car j’ai énormément ce passage du roman qui a été peu adapté à l’écran.
Comme l’a dit Rorov94m, je ne pourrais pas voir le film tout de suite car plus de 3 ans après j’ai encore trop à l’esprit le 2ème episode de la série Netflix qui est consacré à ce chapitre justement.
@Et nous alors ? Ouvre des bouquins, fais toi une culture et on en reparle après.
@Et nous alors ? : marre des cassos qui ne peuvent pas s’empêcher de traiter les autres de demeurés.
On te dit que le film est nul, pas que les gens sont des demeurés.
Laisse les gens aimer ce qu’ils veulent.
Ah ça m’enerve ces gens qui ne savent pas s’exprimer.
Plouf !
Je l’ai trouvé plutôt réussi et au vue des tourments de notre époque, ce Dracula survivant dans les mers houleuses et capricieuses est très »climatique ». La présence d’une femme power et d’un noir leader dans le film démontre que notre Dracula post Covid est plutôt wokiste, limite non genré et binaire car la créature est de sexe indéfinissable. Les effets spéciaux sont super bien, la monstruosité est là, le suspense bien mené, bon les dialogues juste trop longs mais le film se regarde passionnément !