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Blue & Compagnie : critique qui donne les poils

Par Judith Beauvallet
6 mai 2024
MAJ : 11 mai 2024
18 commentaires

Après avoir versé dans l’horreur post-apocalyptique avec Sans un bruit et Sans un bruit 2John Krasinski repasse derrière la caméra pour s’adonner au film pour enfant. Blue & Compagnie, au casting duquel on retrouve Ryan Reynolds, la jeune Cailey Fleming et les voix de Steve Carell et Phoebe Waller-Bridge, est une fable sur le réconfort que peuvent apporter les amis imaginaires tout au long d’une vie. Un bonbon sucré qui ne révolutionne rien, mais qui ne fait pas de mal non plus. Au contraire. Au cinéma dès ce 8 mai 2024.

Il était (encore) une fois…

Développé par Krasinski et Reynolds, Blue & Compagnie n’a, sur le papier, rien d’original à proposer. Une adolescente doit faire face à la possibilité d’un deuil, et pour l’aider à surmonter cette épreuve, un monde magique peuplé d’amis imaginaires va s’ouvrir à elle… On connaît la chanson, et à aucun moment le film ne cherche à proposer une autre musique.

D’ailleurs, Blue & Compagnie se repose énormément sur les acquis de beaucoup d’œuvres qui ont déjà exploré l’univers de l’enfance avec succès : Emilie Jolie, Monstres & Compagnie (il est évident que le titre français de IF, titre anglais, cherche à jouer sur la comparaison), Vice Versa, Big Fish… Même le dragon qui pointe le bout de son nez le temps d’une seconde est un copié-collé de la dragonne de Shrek. La résidence dans laquelle vivent les amis imaginaires, elle, est une reproduction presque publicitaire des hôtels Disneyland.

 

Blue & Compagnie : photo, Ryan Reynolds, Cailey Fleming Bienvenue à Disney World

 

Bref, plus que de citer des références, le nouveau Krasinski brasse dans tous les sens des imageries déjà (mieux) exploitées maintes fois. Par ailleurs, le classicisme (si ce n’est le traditionalisme) de fond et de forme du réalisateur, qui était déjà présent dans les Sans un Bruit, n’aide évidemment pas à sortir du cadre des clichés, et l’on pourrait se demander qui peut encore croire, aujourd’hui, à ce portrait vintage d’une adolescente parfaite sans un cheveu qui dépasse et de son papounet idéal qui parle comme une marraine la bonne fée.

Jouant sur des cordes un peu faciles pour faire tenir son histoire – papa à l’hôpital et personnel soignant étonnamment doux, contraintes de la vie réelle apparemment inexistantes (mais qui surveille cette gamine ?? Y’a pas école ?), grand et magnifique appartement dans un non moins grand et magnifique immeuble du centre de New-York – Blue & Compagnie est en réalité assez vieillot dans sa manière de concevoir un conte qui parle d’enfance : un type d’enfance qui est, pour le coup, franchement imaginaire.

 

Blue & Compagnie : photo La vie en Blue

 

Les bons contes font les bons amis (imaginaires)

Toutefois, en dépit de ses aspects éculés et trop sages, le film parvient à surprendre agréablement pour plusieurs raisons. En premier lieu, il faut déjà souligner la réussite de l’un de ses éléments essentiels : les effets numériques. À une époque où les productions Marvel font étalage du pire de ce que peut produire le numérique au cinéma, à cause des conditions de travail invivables imposées aux équipes VFX, on en oublierait presque que les longs-métrages qui mêlent acteurs et personnages 3D sans se couvrir de ridicule existent encore.

À la manière des créatures qui peuplent les Pixar, les amis imaginaires de Blue & Compagnie sont joliment modélisés et animés (à défaut d’avoir des designs originaux), s’insérant parfaitement dans la splendide photographie de Janusz Kamiński, chef opérateur fétiche d’un certain Steven Spielberg, lui-même grand maître de la peinture des angoisses et des rêves de l’enfance. Ce sérieux de l’image – et d’ailleurs aussi de la musique, puisque la bande originale enchanteresse est composée par Michael Giacchino – traduit l’honnêteté d’une démarche qui, pour une fois, ne prend pas les enfants pour des imbéciles.

 

Blue & Compagnie : photo, Cailey Fleming Nounours et paillettes, le ton général est donné

 

Au-delà de parler de la possibilité de perdre un (ou deux) parent(s), certes avec enrobage mais sans mensonges, Blue & Compagnie prend son jeune public au sérieux, en offrant un spectacle foisonnant et bien fait. Le minimum syndical, a fortiori quand on s’adresse à des enfants ? Pas toujours, malheureusement. Et si le film est tout à fait en mesure de toucher aussi les adultes (le message global étant d’ailleurs qu’il n’y a pas tellement de différence entre la sensibilité d’un môme et celle d’un daron), il ressemble avant tout à une envie pressante de Krasinski et Reynolds d’en mettre plein la vue à leurs gamins.

Certes, les personnages sont trop peu détaillés, les règles du monde imaginaire sont mal établies, le film manque de la mise en valeur d’un vrai fil rouge… mais il en résulte ce joyeux bazar coloré, finalement pas dérangeant, qui ressemble au spectacle que le couple de comédiens pourrait proposer aux malades d’un hôpital pour enfants. L’envie de distraire et d’émerveiller occupe chaque recoin de l’écran, et même si la mise en scène et la direction artistique ne transforment pas toujours l’essai, l’enthousiasme est communicatif. Même Ryan Reynolds, entièrement dédié aux clowneries qui feront rire les plus jeunes, oublie de se regarder le nombril et s’avère plus charmant qu’exaspérant (pour une fois).

 

Blue & Compagnie : photo Blossom : doublée par Phoebe Waller-Bridge en VO, et par Mylène Farmer en VF

 

tout est bien qui finit bien

En somme, le film de Krasinski fait vœu de s’inscrire dans la tradition spielbergo-pixarienne des fables pour petits et grands, qui changent l’histoire du soir en grand spectacle, avec séquence émotion et larmes à la clef si possible. Le scénario trahit d’ailleurs comme un palimpseste l’inspiration du modèle E.T., selon lequel un enfant se retrouve avec un parent en moins et arrive à surmonter une épreuve et à grandir par l’accompagnement d’une figure paternelle et non-humaine de substitution. Encore un modèle éculé, oui, mais encore une jolie manière de le raconter.

En définitive, si Blue & Compagnie souffre de (gros) défauts qui l’empêchent d’être une vraie perle, sa chaleur et son charme quelque peu désuet lui permettent malgré tout de mettre quelques étoiles dans les yeux et d’émouvoir avec tendresse. Et, finalement, c’est l’essentiel. À voir avec ou sans gamins : le bon moment est garanti, dès lors qu’on ne craint pas l’overdose de sucre.

 

Blue & Compagnie : photo

Rédacteurs :
Résumé

Après le post-apo horrifique des Sans un Bruit, John Krasinski fait un virage à 180° vers le conte pour enfants. Empesé du traditionalisme nostalgique qui caractérise son réalisateur, Blue & Compagnie reste un bel hommage à ses références et, surtout, un moment de douceur et d'émotion qu'on aurait tort de refuser (même à l'âge adulte).

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Flo

Da ba dee da ba di…

L’acteur John Krasinski est passé à la mise en scène quelques temps après être devenu père… Et en voyant quels thèmes il brasse dans ses films, on ne peut que se demander si l’auteur n’a pas des craintes pour sa jeune famille, pour ce qu’il va leur laisser, et s’ils sauront se débrouiller sans lui.
Son premier opus, « Sans un bruit », se passait déjà avec des créatures invasives, une famille frappée par le deuil et encore en sursis… et sa suite était assez similaire, enfonçant le clou au bénéfice de la fille ainée de l’histoire, vraie héroïne/élue principale.

Comment se renouveler ensuite, tout en restant fidèle à ses obsessions ? Simple : en renversant complètement le contexte.
À l’un la vision sombre d’un Monde (assez bien construit, codifié, foisonnant) où les pères autoritaires échouent dans leur tâche, laissant le pouvoir à des femmes plus coriaces…
À l’autre la vision optimiste d’un Monde (simplifié, peu codifié, très familier) où les mères sont absentes, les grands-mères larguées, et aux hommes de devenir des êtres plus sensibles.
Du film d’horreur et d’action apocalyptique, jouant sur le contrôle du Son, à la comédie enfantine, reposant sur ce qui est Visible ou hors-champ… Tout ça avec une maîtrise imparfaite mais, a priori, beaucoup de sincérité.

Toutefois, ce qui alourdit un peu ce « Blue et cie », c’est sa façon de puiser dans une multitude de références connues, pour mieux les agglomérer dans un Tout cohérent. Et ça a beau être un film Paramount, Krasinski semble surtout avoir pioché l’inspiration dans une grande partie du catalogue Disney, incluant les studios dont ils sont propriétaires (même récemment)… 
Vous y retrouverez facilement des idées sorties d’un Fincher ou Shyamalan (prévisible), ou un mélange réel/animation cartoon aussi fluide qu’un « …Roger Rabbit ».
Et une grosse, grosse partie des thématiques Pixariennes, ce qui en fait le premier film en Action Réelle à rendre hommage Et à solder toute l’œuvre créative du studio… justement, au moment où ce dernier a atteint une telle apogée que les spectateurs lui interdisent même de se réinventer, d’explorer d’autres voies encore plus personnelles et radicales, générant ainsi une incompréhension continue (et des tas de suites commerciales en conséquence, sensées rassurer à nouveau le public).

On a donc ici un mélange de « Toy Story », « Monstres et cie », « Là-haut », « Vice-versa »… C’est à dire une petite fille, son deuil, ses peurs, ses amis « invisibles » qui lui donnent de l’inspiration, boules d’angoisse (et souvent de poils), craignants d’être oubliés et de disparaître. Mignon, drôle, un conte avec de la morale pré-Adulte.
On y trouve même des points communs avec un autre film d’animation (de la Paramount, tiens donc !?), « Le Parc des Merveilles », qui mettait aussi en avant la maladie, et la création artistique/fictionnelle comme façon d’exorciser la peur de la Mort, de la perte de l’enfance…
Dites donc ça fait beaucoup tout ça ! Krasinski aurait-il écrit son film avec ChatGPT ? 
Il n’est pas interdit de se poser la question devant un opus qui contient aussi de grands points communs avec (encore !) un autre film Disney, pas si éloigné de Pixar, mais pas animé celui-là : « À la poursuite de demain ». 

Gamine pugnace, tâches de rousseur, vraie croyante face à un adulte désabusé et émotionnellement bloqué, ambiance Rétro, émule des « Voyages de Sullivan »… Comme avec Brad Bird, on a une histoire qui n’est pas faite pour être complètement divertissante, ni parler entièrement aux plus jeunes (il y a « Harvey » à la télé, ok… mais quels gosses connaissent cette histoire ? surtout en dehors des USA ?).
Même si traversé par un climax central (la visite virtuelle de Tomorrowland pour l’un, la reconfiguration d’un Foyer pour l’autre), l’émerveillement n’y est pas une donnée principale, ce qui compte le plus ce sont les moments en creux, au détriment du reste. Ce qui était plus problématique avec Bird, qui s’est cassé les dents sur le scénario de Damon Lindelof, plutôt porté sur les échecs formateurs (re-Pixar)… tout en besognant les instants SF super rocambolesques, lesquels en devenaient bien trop incompatibles avec le sujet.
Krasinski s’en sort un peu mieux parce que son film n’a pas d’action et de course-poursuites, qu’il reste une petite comédie dramatique assumée, même si sa propre utilisation de la musique de Michael Giacchino (re re-Pixar) ajoute trop de rythme et d’émotions intempestifs.

Film qui repose sur tellement d’évidences, dont Ryan Reynolds – l’acteur (lui aussi père de famille, devenu très prudent) a plusieurs obsessions : les buddy-movies débilitants, le body-swap, et les gugusses qui parlent dans le vide comme ici. Au moins il n’est pas entouré d’une flopée de personnages sortis de franchises connues, et il se met au service du script et de l’héroïne, que joue avec conviction la jeune Cailey Fleming… Non sans quelques lassitudes, qu’on peut mettre en parallèle du statut de l’acteur (marre d’avoir trop joué les rigolos insolents ?).
Quant aux vedettes qui sont invitées à donner de la voix aux amis imaginaires, c’est carrément la famille et les potes (de Krasinski, de Reynolds, ou bien autour de « Killing Eve »)… Ce qui renforce encore plus l’impression d’un film fait dans son coin, à l’économie, sans esbroufe.

Et qui prend une dimension imprévue quand on pense aux récentes grèves à Hollywood, lesquelles ont participé au décalage de la sortie du film : toutes ses stars venues se prendre au jeu (certaines étant des gags Reynoldsiens récurrents)… ne craignent-elles pas elles-mêmes de devenir comme ses créatures semblant vivre dans un hospice, attendant qu’on vienne les adopter, attendant d’apporter réconfort et inspiration à des spectateurs ? – qu’ils soient bien portants ou non (on pense évidemment aux clowns d’hôpitaux).
Et si eux-aussi devenaient obsolètes, bien avant l’heure ?

Peut-on alors parler de problématiques réelles sur les talents qu’on galvaude, avec un script qui contient lui-même beaucoup d’automatismes ? C’est un sacré paradoxe, d’autant plus renforcé par la VF qui, non contente de faire du recyclage (titre calqué sur « Monstres et cie », des stars comme José Garcia, Mylène Farmer ou Marina Foïs qui sont déjà passées par le doublage), traduit forcément les « Imaginary Friends » en « Amis Imaginaires ». Ce qui nous fait passer des initiales IF (« Si ») à AI… comme Artificial Intelligence. 
Gaffe révélatrice ?

En attendant, le film remplit bien son « office », est suffisamment attachant et offre quelques jolis instants à la limite du tire-larme. 
Et si ça aide Krasinski à moins avoir peur de l’avenir, tant mieux pour lui.

Alan_gx

J’en reviens avec mon fils de 7 ans, c’est pas nul mais qu’est ce que c’est niais… je trouve au contraire qu’on prend un peu les enfants pour des idiots, c’est vraiment de la guimauve fourrée au bon sentiment.
Je trouve aussi dommage de dire que les personnages 3d sont cools « parce que maintenant marvel fait de la merde. » C’est bien fait mais c’est moin d’etre du pixar non plus, y a des problèmes d’incrustation et le character design n’est vraiment pas original. 2/5 maximum, sans etre à jeter c’est quand même difficilement défendable.

Dsluc

Film sympathique, mais réservé à un public ayant au moins 9 ans. Le film n’est pas forcément drôle et les enfants plus jeunes risquent de s’ennuyer ferme.

TailS_ttf

Hello l’équipe et les gens !
Je suis aller le voir hier et je malheureusement je valide cette critique (oui pas d’originalité dans mon commentaire). J’ai été bluffé par les incrustation qui passent vraiment bien (sauf les interactions directes entre perso réels et imaginaires, les couleurs par contre sont parfaitement raccords).
Le film m’a touché, malgré la simplicité manifeste du procédé, mais j’y ai trouvé un joli message.
Concernant le public, je dirais que c’est adapté à des enfants à partir de 8 ans pour la compréhension du message, des gens au ciné était venu avec des bambins de 3-4 ans, je doute qu’ils aient compris quelques choses, à défaut se rigoler quand même.
Bref un bon moment à passer en famille, un Reynolds que je reverrai peut être..

Flo1

Aucune comparaison possible avec des créatures dans des films de super-héros, qui ne sont pas faits pour être zolis à contempler, mais qui sont conçus comme bruts et vifs, faits pour l’action délirante.

Homer75

Pour avoir vu Arthur et les minimoys, le doublage de mylene farmer est moins gênant que lorie jennifer ou tal dans d’autres films. Et ne parlons surtout pas de malik bentala Denis brogniart,jamel debbouze et autres « célébrités « qui font plus de mal au métier de comédien doubleur qu’autre chose.

Fox

@cidjay

En fait, Mylène Farmer n’a la voix haute que quand elle chante.
Quand elle parle (en interview) ou quand elle joue (dans Ghostland, par exemple), elle n’a vraiment rien d’une voix de crécelle.

Pour ce qui est de l’avoir choisi pour le doublage, je ne peux pas vous dire si c’est un bon choix ou pas : je n’ai pas (encore) vu le film et si j’y vais, je le verrai en VO de toute façon. Ce n’est pas la première fois qu’elle le fait (Arthur et les Minimoys) donc peut-être qu’elle avait aimé l’expérience, qu’elle s’est représentée, qu’elle a aimé le pich du film et qu’elle a dit oui. Comme vous le dites si bien, elle n’a vraiment pas besoin de ça pour vivre et l’attention qu’elle porte sur ses choix (rares) – et donc sur son exposition – va plutôt dans le sens des décisions « coups de coeur » (il n’y a qu’à voir comment elle a accepté son rôle dans Ghostland !).

Nota : Je ne dis pas ça pour la défendre particulièrement (je ne suis vraiment pas fan de sa musique), j’essaie juste de comprendre le choix de casting vocal (et au passage reconnaître qu’elle est quand même plutôt sélective dans ses projets et qu’elle ne sature habituellement pas l’espace culturel et médiatique).

S2ada

L’affiche est affreuse purée, la fille semble passer à travers et je parle même pas du personnage doublé par Mylène Farmer qui est carrément coupé

Le maniaque du zodiac

@GeantRuisseau

Cette ref ne pouvait pas être mieux placée.

Geoffrey Crété

Oui oui, Judith a fait l’erreur classique des 360 degrés. On lui pardonne.