Cela dit, Nikita n’est pas au-dessus de tout reproche. Près de deux décennies plus tard, sa parenté avec le cinéma chic et toc des eighties saute toujours plus aux yeux… et aux oreilles surtout quand la musique tapageuse et pompière d’Eric Serra n’en finit pas de subir les outrages du temps. Au même titre, son ultraviolence tant décriée à sa sortie prête aujourd’hui à sourire : depuis, on en a vu d’autres et sa représentation flirte trop souvent avec le grotesque.
Nikita, film surestimé ? Indéniablement. Nikita, film à oublier ? Pas nécessairement. Le film de Luc Besson fait preuve d’une maîtrise technique indéniable et délivre des morceaux de bravoure tenant encore bien la route. D’une certaine manière, son montage cut et le dynamisme de ses cadrages préfigurerait presque le standard du blockbuster de la décennie à venir. Enfin, si l’on fait fi des dialogues quelques peu tartes, il est difficile de ne pas saluer la performance d’Anne Parillaud qui trouve là le rôle de sa vie.
Par son approche instinctive, elle insuffle à son personnage une bizarrerie tantôt nihiliste, tantôt touchante qui contamine toute la tonalité du film. Elle est incontestablement la clé de voûte de Nikita, celle qui dirige Besson et non l’inverse. Dans un double mouvement, l’héroïne « bessonienne » naît, existe le temps d’un film et meurt. Car, avant d’être une dérangée du bocal ou une guerrière, Anne Parillaud n’a pas laissé son humanité au vestiaire. En comparaison, tous ses avatars ultérieurs sont des mortes-nées. Des pantins sans vie évoluant dans des films toujours plus moribonds et cyniques.