Ricky Gervais est Dieu ! Mais ça, les téléspectateurs de The Office et Extras le savent déjà. Par contre, le voir devenir littéralement Dieu, qui plus est sur grand écran, a de quoi affoler les sens et les zygomatiques. Il faut dire que jusqu'à maintenant, le comique anglais ne semblait pouvoir prétendre au cinéma qu'à une guest (Stardust, La Nuit au musée), mais pas plus. Genre, l'acteur le plus drôle du monde réduit à faire les guests les plus drôles du monde ?! De ce point de vue, La ville fantôme était une belle tentative de capter l'esprit du bonhomme, sa misanthropie, sa folie mais aussi son romantisme.
Avec un pitch aussi improbable que Ricky Gervais comme premier menteur d'un monde où on ne peut dire que la vérité, et aussi pour la première fois comme (co-)réalisateur, The Invention of Lying avait encore un plus gros potentiel. Mais le film ne l'exploite pas tout de suite, il fait d'abord mumuse avec son univers-concept. Du genre petites vacheries entre amis (Tina Fey, Jason Bateman, Jonah Hill, Martin Starr). L'humour est à froid, les tics imperceptibles, l'ambiance taciturne, Ricky Gervais en mode mineur voire dépressif. Mais dès qu'il se met à mentir, il créé aussi. Il n'invente alors pas seulement le mensonge, mais aussi la fiction, le cinéma.
Impossible alors de ne pas penser à Jim Carrey dans respectivement Menteur, Menteur et Bruce Tout-Puissant, mais plus encore à Un jour sans fin de Harold Ramis avec Bill Murray. Car la farce tourne court pour devenir une comédie existentielle passionnante, virtuose et jusqu'au-boutiste. La remise en perspective du cinéma et de la religion se fait avec un tel naturel, et un tel talent, que le spectateur reste sans voix. Il ne peut alors que rire, pas seulement jaune, de toutes les couleurs. Mais Ricky Gervais est un indécrottable romantique, il a trop de cœur, alors que le film demandait surtout à se voir avec le cerveau. Et comme il est amoureux de Jennifer Garner, il devient vite chiant. Ricky Gervais est aussi un homme comme les autres.