Une fois installé son postulat de départ, Lanthimos se focalise sur l’un de ses personnages, une infirmière, qui repère les « clients » potentiels grâce à son travail, et dont le hobby va peu à peu empiéter sur sa propre personnalité. De cette dynamique, installée en une dizaine de minutes, nous ne sortirons jamais, à peine pourrons-nous percevoir une timide évolution au cours de la dernière bobine du film. Le réalisateur se contente d’enchaîner les saynètes, toutes plus ou moins absurdes, plus ou moins grotesques, plus ou moins lentes, mais toujours glauques. On attend que ce funèbre puzzle s’assemble, mais la somme de ces séquences ne formera jamais un tout.
Si l’histoire fait du surplace pendant près d’une heure, le long-métrage convoque avec une exhaustivité agaçante les tares d’un certain cinéma d’auteur sur-représenté en festival, qui ne veut jamais prendre son récit à bras le corps, ne surtout pas s’abaisser à narrer, comme si divertir le spectateur était un acte du plus impardonnable mauvais goût. Tout y est : sexe mécanique et morbide, humiliations à répétition, personnages monomaniaques dont on ne saura rien, dialogues atones, une pincée d’inceste, une photographie d’une platitude éminemment « vraie… » Un dernier détail qui ne trompe pas : Lanthimos nous gratifie d’une scène de violence « colorimétrique » sensée nous glacer le sang, qui évoquerait plutôt un sketch déviant des Nuls.