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Sugarland Express – critique

Par Sandy Gillet
22 février 2012
MAJ : 22 décembre 2018
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Alors âgé de vingt-six ans, Steven Spielberg réalisait Sugarland Express, son premier film (faut-il encore rappeler que Duel est à la base un téléfilm ?). Ce fut un échec commercial adoubé par la critique du moment très nouvel Hollywood : Pauline Kael ayant par exemple écrit qu’il s’agissait là d’« un des films les plus phénoménaux de l’histoire du cinéma ». C’est aussi le film le moins personnel de son auteur et donc, paradoxalement, l’un des plus réussis.

Sugarland Express : Photo Goldie Hawn

En effet, Spielberg a dû choisir Goldie Hawn, alors star internationale, pour le rôle principal, dans le seul but d’assurer les recettes du film (« erreur » qu’il ne commettra plus dès Les Dents de la mer, préférant, tout du moins jusqu’au premier Indiana Jones, caster des acteurs peu ou pas connus). Il a dû aussi changer sa fin beaucoup trop « happy end » aux yeux des producteurs (un comble !) et respecter du coup plus à la lettre l’épilogue de ce fait divers à l’origine plus noir et plus sanglant. De fait, Sugarland Express est devenu avec le temps un film culte, limite renié par son auteur (le côté désertique de cette édition en terme de bonus peut-être en effet analysé comme un refus du réalisateur de revenir dessus et pas uniquement comme une simple volonté de l’éditeur) qui s’est depuis façonné une image beaucoup plus consensuelle, voire conservatrice.

 

Ceci dit on trouve déjà dans Sugarland Express la formidable propension de ce réalisateur de génie à divertir selon des codes qu’il aime à pervertir d’un film à l’autre. Ici, la mise en scène, outre son efficacité (comme dans Duel les plans sont à la fois simples et complexes mais toujours mis au service de l’histoire), prend son temps avec les personnages leur donnant une épaisseur sociale peu commune dans le cinéma de Spielberg. C’est ainsi qu’on en vient même à s’attendrir de l’interprétation de Goldie Hawn, pourtant l’actrice la plus tête-à-claques qu’Hollywood ait jamais façonné, en mère cherchant à récupérer à tout prix son enfant.

 

Sugarland Express est aussi et d’abord un road-movie comme seul l’Amérique sait les faire et Spielberg n’aspirait là qu’à suivre le mouvement d’une décennie entamée avec Easy Rider qu’il abandonnera bien vite par la suite (l’échec commercial du film l’ayant définitivement convaincu du bien fondé de ses convictions quant aux codes immuables à respecter en vu d’un succès public). Aujourd’hui encore on ne peut qu’être admiratif devant tant d’ingéniosité et de profondeur dans la démonstration d’un système mixte : film à message doublé d’une réelle signature « entertainment ». On regrettera simplement que Spielberg ait dû faire par la suite un choix, poussé en cela par sa propre nature et le diktat populaire.

 

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