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47 Ronin : critique sabrée

Par Simon Riaux
14 juin 2020
MAJ : 21 novembre 2023
9 commentaires

Keanu Reeves en samouraï dans un gros film vendu comme un mix entre Gladiator et Le Seigneur des Anneaux, réalisé par le novice Carl Rinsch, écrit par un des scénaristes de la saga Fast & Furious, et repris en post-production par le studio avec notamment des reshoots importants : 47 Ronin est un film étrange à tous les niveaux. Et ça en fait une curiosité pas inintéressante.

photo, Keanu Reeves

C’EST PAS MA GUERRE

Précédé d’une sale réputation et largement rejeté par le public (plus de 175 millions de budget et environ 150 millions en salles), 47 Ronin est arrivé sur les écrans après une post-production compliquée, et une date de sortie plusieurs fois repoussée (prévu fin 2012, il est finalement sorti plus d’un an après). Un vrai parcours du combattant, à peine étonnant au fond. Les tentatives américaines d’assimiler les cultures orientales (japonaise en particulier) se soldant le plus souvent par de cuisants échecs, on craignait de se retrouver face à un énième nanar hybride, gorgé d’un odieux mépris pour son sujet et ses spectateurs. Si Keanu Reeves nous revient la lame émoussée, le déshonneur annoncé n’est pas au rendez-vous.

On se demande parfois si nos confrères ont l’habitude de voir de mauvais films. Car si l’exercice est toujours douloureux, il est encore le seul thermomètre fiable de la nullité. En effet, pour considérer 47 Ronin comme une purge, il faut pour ainsi dire n’en avoir jamais vue. À bien des égards, le métrage de Carl Rinsch est tout à fait recommandable en dépit d’indéniables défauts. Sa direction artistique, qui n’est pas exempte de fautes de goûts, s’avère soignée voire fastueuse. Si le numérique fait ici et là des ravages, décors et costumes nous offrent un dépaysement réel, composant un livre d’images divertissant. De même, si le récit prend des libertés avec le mythe dont il s’inspire, le film s’efforce clairement de rendre un hommage respectueux à la culture qu’il visite, jusque dans sa conclusion sanglante.

 

photo, Keanu ReevesKeanu ramené par le studio en reshoots

 

SAMOU-RÂLE

Hélas, application et bonnes intentions ne sont pas toujours suffisants. Empêtrée dans une légende particulièrement dense, la narration souffre d’un montage bâtard de deux heures, qui prend trop son temps, sans durer assez pour développer ses nombreux personnages. En résulte un sentiment de confusion, puis de répétition, qui sied mal au cinéma d’aventures. Les affres d’une production houleuse auront eu raison de certains maquillages (les horribles Tengus) et interdit aux créatures numériques de connaître un traitement digne du scénario.

 

photoCG-aïe

 

Il en va de même pour le traitement de la violence, bien présente mais reléguée hors champ, ce qui est un comble pour l’adaptation d’une légende dont tous les personnages sont appelés à mourir. Ainsi suit-on avec un relatif ennui une conclusion terriblement bordélique où nos deux héros mollement monolithiques (Keanu Reeves et Hiroyuki Sanada, deux farouches ennemis de l’expressivité faciale) affrontent démons et autres dragons de synthèse. Beaucoup de bruit et CGI pour pas grand chose, si ce n’est le sentiment d’un film saboté, et perdu en cours de route.

 

 

Affiche fr

Rédacteurs :
Résumé

Jamais honteux ou visuellement hideux, 47 Ronin témoigne malgré lui d'un système hollywoodien bien mal adapté aux particularismes culturels, qui perd en efficacité et force épique ce qu'il gagne en honnêteté artistique.

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Andarioch

Moi ça me tue que ce film soit à ce point passé inaperçu.
Pour une fois qu’Hollywood rend un hommage digne à la culture japonaise, on se dit que pour avoir été à ce point discret on doit être sur de la bouse cosmique.
Alors je l’ai maté sans espoir, sans attente, sans vraiment savoir à quoi j’avais affaire.
Guerriers et magie, je me met à craindre un clone de la grande muraille. Mais le Japon n’est pas la Chine, il y a quelques valeurs qui donnent à cette histoire de vengeance un sel tout particulier. Et finalement la chose se regarde avec un vrai plaisir comme une sorte de LOTR nippon. Pas le chef d’oeuvre du siècle, c’est sûr, mais meilleur que 90% des gros films produits ses 5 dernières années.
Pourtant gros bide.
Ma théorie: l’occident ne peut pas se ruer sur un métrage qui fini bien, mais par la mort rituelle de tout les personnages principaux.

M1pats

A partir du moment où j’ai vu que les japonais parlaient en anglais entre eux j ai laissé tomber, je m en fous que le film soit bon mauvais ou moyen, c est juste pas possible de le regarder pour moi, y a des limites

dams50

Bon, pas si mal pour un film américain.

Mais bon, clairement, je préfère voir le même Hiroyuki Sanada dirigé par Yoji Yamada dans « Le samurai du crépuscule ». La grande classe.

Gregdevil

Quelque jolie plan par ci par la, mais le tt passé à la moulinette Hollywoodienne donne un film bien fade. Dommage.

A@的时候水电费水电费水电费水电费是的 M1pats

Tu as tt à fais raison. De même que la trilogie du dollar de Leone, en VO ils parlent tous italiens. Ça dénature vachement le produit. Bon ça reste de très bon film mais c’est toujours dommage.

Flash

Pas mal du tout ce film et assez respectueux du genre, du bon cinoche de samedi soir.