Une promesse non tenue serait-on tenté d'affirmer d'entrée de jeu. Celle d'une adaptation étrangement insipide, alors que la nouvelle de Stefan Zweig contient en son sein quelques morceaux de bravoures romanesques qui emportent toujours le lecteur d'aujourd'hui vers une sorte de béatitude immédiate. C'est que Le voyage dans le passé fait partie de ces textes bâtards : à la fois intemporels de par les thématiques abordées (une histoire d'amour impossible) et ancrés dans leur époque par le style flamboyant d'une Europe déclinante de l'entre-deux guerres.
De ces écueils potentiels, Patrice Leconte et son acolyte d'écriture Jérôme Tonnerre n'en évitent quasiment aucun sans que paradoxalement Une Promesse soit un ratage complet. En cause une fidélité abrutissante au livre qui donne au film une linéarité rassurante dont les acteurs et surtout Rebecca Hall s'accommodent d'une façon délétère et plus que savoureuse. À elle seule, elle inscrit le film dans quelque chose de classique et de palpitant. La caméra de Leconte se veut quant à elle proche des sentiments brûlants qu'elle cherche à capter. Pour ce faire la mise en scène privilégie les regards, les axes caméras qui en découlent, les respirations sourdes, les frottements d'étoffe… Tous ces codes romanesques qui, à l'écrit, peuvent être magnifiquement décrits mais qui visuellement peuvent très vite sombrer dans une sorte de pathos un peu vulgaire. N'est pas la Jane Campion de La leçon de piano qui veut.
Leconte n'est tout simplement pas à l'aise dans ce registre. Son film manque de panache, d'envolées lyriques et de sels pour réanimer le spectateur en manque de vapeurs romanesques. De plus, Le voyage dans le passé donnait à lire une fin radicalement dépressive et en parfaite harmonie avec le reste du récit alors que le film se perd en des derniers plans quelque peu guimauve, reléguant en arrière plan la prescience de Zweig sur les heures sombres qu'allait alors vivre le Monde. Avec Une promesse Patrice Leconte confirme donc une filmographie en petite forme. Les dix dernières années n'ont en effet pas donné lieu à des réalisations remarquables à l'exception notable de Voir la mer en 2010 qui creusait un sillon par ailleurs connu dans son cinéma. On est bien loin du metteur en scène qui nous livrait Ridicule en 1996. Aujourd'hui, le sentiment est plus aux Précieuses ridicules…
En bref : Porter du Zweig à l'écran n'est pas une mince affaire. Leconte n'évite pas les écueils mais arrive tout de même à transmettre une parcelle des émotions du livre, en partie grâce à une Rebecca Hall lumineuse.