Mettons les choses au clair dès le départ, nous ne parlerons pas de Dealer comme de n’importe quel autre film, parce qu’il représente un cas à part actuellement. Monté uniquement sur les fonds personnels d’une poignée de passionnés, Dealer ne devrait pas exister parce qu’il ne répond à aucune contingence du cinéma français. Pas de subvention, pas d’appui du CNC, aucune chaine de télé derrière, Dealer réussit l’impossible en existant tout en s’affranchissant des voies officielles. Un véritable défi, périlleux et qui sous-entend qu’on n’a pas le droit à l’erreur. Privé de sortie salles, le film est disponible dès aujourd’hui sur la plateforme Vimeo on Demand avant de connaitre une exploitation plus classique en VOD dès le 1er novembre. Ceci étant dit, passons au film en lui-même.
Thriller nerveux tourné en mode sauvage, Dealer fait immédiatement penser au Pusher de Nicolas Winding Refn (dont il reprend quasiment l’intrigue) saupoudré d’un peu de Guy Ritchie, pour les sursauts décalés inattendus. Et c’est peut-être son plus grand défaut. Il nous propose de suivre 24h de la vie de Dan (Dan Bronchinson), dealer parisien qui rêve de raccrocher pour partir vivre avec sa fille en Australie. Mais quitter un tel milieu n’est pas facile, surtout lorsque l’on ne peut faire confiance à personne et que chacun est prêt à tuer l’autre pour s’en sortir.
On le voit, rien de révolutionnaire et pourtant la recette est efficace puisque Dealer est extrêmement sympathique à regarder. Entre la voix-off de Dan contrastant intelligemment avec ce que nous voyons (bien que quelques lignes de dialogue soient ampoulées) et la folie furieuse qui se dégage de certaines scènes, l’amateur de film d’action sans prétentions en aura largement pour son argent. Si Dealer n’est pas là pour faire dans le social, il nous dépeint néanmoins un Paris que nous avons peu l’habitude de voir avec une belle énergie. Ici, les rues sont sales, les kebabs sont gras et les humains sont perdus dans leurs vies. Un constat sombre et noir que contrebalance un humour bienvenu à coups de torgnoles dans la tronche qui fait mouche à chaque fois.
La réalisation nerveuse et proche de son personnage de Jean-Luc Herbulot, sans être transcendante, est pleinement justifiée et l’économie de moyens à disposition de l’équipe très intelligemment mies à profit. On sent bien que le film a été tourné dans l’urgence, sans grand plan machiavélique en tête et que ce sont avant tout l’envie, la passion et le coeur qui ont servis de moteur. Dan Bronchinson campe un personnage un peu plus complexe qu’il n’y parait et, s’il n’évite pas quelques clichés un peu lourds, il sait nous le rendre sympathique et attachant.
Au final, Dealer est une très bonne surprise, alternative parfaite au cinéma de l’establishment mais aussi un combat pour une vision du cinéma. Voir et soutenir Dealer c’est aussi défendre l’idée que tout le monde peut arriver à monter un projet avec les moyens du bord et arriver au final à livrer un produit droit dans ses baskets, imparfait et référencé certes, mais diablement sincère.
Simplement le meilleur film français depuis longtemps. En partant de la sauce « PUSHER » concoctée par REFN, en la déglaçant de « french touch », HERBULOT parvient à nous faire savourer un plat délicieux au goût unique, toujours surprenant même pour ceux qui connaissent la trilogie PUSHER par cœur. Ce film enterre profondément le remake anglais inutile de PUSHER… On rêve déjà d’une trilogie DEALER…