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Borderlands : critique d’une adaptation encore foirée

Par JL Techer
8 août 2024
MAJ : 20 novembre 2024
37 commentaires

Eli Roth a gravi les échelons de la gloire avec ses films d’horreur : Cabin Fever, Hostel, The Green Inferno (et l’horreur d’Halloween pour pré-ado la Prophétie de l’Horloge)… Mais le bonhomme a l’esprit d’un couteau suisse et a aussi donné dans le remake décérébré avec Death Wish et dans la coproduction potache avec Baywatch. Pour sa nouvelle réalisation, l’adaptation de la franchise de jeux vidéo Borderlands, c’est plutôt le Eli Roth tournevis cruciforme à navets qui a pris les rênes. Et ce n’est pas sa brochette d’acteurs Cate Blanchett, Kevin Hart, Jamie Lee Curtis ou Jack Black qui parvient à sauver quoi que ce soit. Borderlands est une adaptation de jeu vidéo totalement ratée, digne de la fange des pires produits d’exploitation.

Borderlands © Canva Gearbox Studios

Borderlands en trouble borderline

Si la licence Borderlands est moins connue du grand public qu’un GTA ou que le duo de sauteurs Mario/Sonic, il s’agit tout de même d’une vraie machine à billets. FPS se déroulant dans un univers post-apocalyptique, et proposant des mécaniques de looter-shooter (on tue des sbires, on ramasse des armes, on perd 10 minutes dans l’inventaire à choisir son équipement, et on recommence). Avec trois jeux principaux et trois spin-offs, la licence franchise Bordelands désormais 86 millions d’unités au compteur. Un score colossal synonyme de ticket pour Hollywood.

Mais comment adapter au cinéma un jeu interdit aux moins de 18 ans, sanglant, impertinent, malin, et porté par une galerie de personnages tous plus cinglés les uns que les autres ? Eh bien, c’est facile, on le transforme en une comédie de science-fiction classée PG-13 (avec supervision des parents recommandée), on abolit toute notion de gore. Pour le service au verre de ce cocktail, Arad production vous propose de ne pas tenir compte de l’histoire des jeux, et de concocter une sorte de synopsis hybride mal fichu, sans souci de cohérence.

Vous prendrez bien un gros moment d’exposition ?

Le film impose de suivre la chasseuse de prime Lilith (Cate Blanchett) alors qu’elle retourne sur Pandore, sa planète natale, pour retrouver Tina (Ariana Greenblatt), la fille « très spéciale » disparue d’Atlas, le Jeff Bezos de cet univers. Celle-ci a été kidnappée par Roland (Kevin Hart) et est suivie par son protecteur, Krieg (Florian Munteanu). On rentre aussi au forceps Claptrap (Jack Black), un robot comic-relief. Si la mission de Lilith est de ramener la gamine au bercail, rapidement, grâce à des failles scénaristiques et au pouvoir de l’amitié, le quintet se trouve embarqué dans la quête de l’Arche, une relique alien.

Dès les premières minutes du film, les premiers problèmes sautent au visage. Cate Blanchett nous assène en voix off les enjeux de cet univers à grands coups de jurons, parce qu’il faut bien être subversif. Il est évident que cette voix off a été ajoutée a posteriori pour faire comprendre le contexte du film et on y voit le début du déraillement du train Borderlands. Quand dans le quart d’heure qui suit on assène 50 fois au public « il faut trouver l’Arche« , on a déjà un avant goût de l’enfer que va être ce film vide de sens et dépourvu de toute intention artistique ou narrative. 

Jack Black dans ses pires heures

Casting sauvage

En réalité les soucis étaient là dès le pitch de départ. Le choix a été fait de constituer une équipe avec des personnages de Borderlands 1 (Lilith et Roland) et de sa suite (Tina et Krieg), mais avec les enjeux du premier jeu. Les connaisseurs des jeux y verront un énorme je-m’en-foutisme qui témoigne du peu de considération que la production a accordé au matériau de base. Mais qu’importe, le propre des adaptations est de prendre des libertés.

Là où les choses empirent, c’est que si la promotion met en avant un casting « de choix », en réalité, ce ne sont là que des erreurs de casting. À commencer par Kevin Hart, dans le rôle du soldat d’élite Roland, devenu un pauvre tâcheron de seconde zone dont à du mal à croire qu’il arrive à tenir une arme sans se tirer une balle dans le genou. Cate Blanchett, trois oscars au compteur, nous gratifie de sa plus grande palette de non-émotion depuis sa lamentable Hela dans Thor 3, avec deux expressions faciales : avec froncement de sourcils, et sans froncements de sourcils. Chouette.

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Zéro crédibilité

Jamie Lee Curtis est venue cachetonner, Florian Munteanu doit dire 10 phrases de trois mots, Ariana Greenblatt n’a aucune idée de ce qu’elle fait là, et Jack Black est clairement en roue libre, se complaisant dans trois blagues scatophiles. Tout ce petit monde se contrefout royalement de ce qui se passe à l’écran, et joue comme s’ils étaient dans un mauvais épisode de Power Rangers. Personne n’est concerné, et c’est à se demander s’il y a eu la moindre direction d’acteurs sur le plateau.

À défaut d’acteurs ayant envie de faire le moindre effort, le monde de Pandore aurait pu donner vie à Borderlands : eh bien non. Outre la mise en scène ignoble, ne se souciant ni d’une quelconque lisibilité, ni de donner du sens à ce qui est filmé, la direction artistique ignoble brûle les rétines. Borderlands est moche de bout en bout : les costumes ont l’air d’avoir été fait par des amateurs de la Japan Expo, la colorimétrie ultra saturée pourrait tuer un daltonien, et les effets numériques semblent sorti d’une IA générative. Pour une production à 120 millions de dollars, on se demande où est passé le budget.

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Au fond du trou : là où se situent les spectateurs

L’enfer ce n’est pas les autres, c’est Borderlands

Après 1h40 de souffrance (en durée réelle, 4h25 en durée ressentie), il est évident que personne a bord n’a compris ce qu’était Borderlands. Arad Productions a cru qu’il s’agissait du American Pie du FPS et qu’il suffisait de dire « merde » et faire des blagues sur les golden showers pour conquérir les fans et le grand public. Le film est si stupide qu’il n’est pas destiné au cerveau d’un adulte. Sauf qu’il est interdit aux enfants. L’équation est simple à résoudre : à bord du vaisseau Borderlands, personne n’a su viser un quelconque public.

Le film est donc un enfer à regarder, subissant de plein fouet son intrigue ultra-prévisible et sa conception catastrophique ayant vu passer une dizaine de scénaristes et ayant changé de réalisateur (Tim Miller) pour des reshoots. Habituellement, ce n’est pas forcément rédhibitoire, mais ici, toutes ces turbulences se voient à l’écran. Borderlands est un amalgame foutraque de ce que le genre de l’adaptation de JV et du cinéma d’action ont fait de pire, un monstre de Frankenstein qui baigne dans une constante impression de déjà-vu.

L’une des pires scènes du film pseudo émotionnelle, qui finit en eau de boudin

Borderlands ne propose jamais rien de neuf. Une construction à la Suicide Squad/Gardiens de la Galaxie, une OST parsemé de morceaux qui n’ont rien à faire là : du Motorhead, du Electric Light Orchestra… Musiques rentrées là avec une bonne dose de lubrifiant pour essayer de faire croire au public que le film est « cool ». Avec un humour qui tombe toujours à plat, le film ne parvient jamais à faire sourire. Quant au fan-service obligatoire, il se résume à jeter des noms au hasard (Knox, Krom, Moxxi…) sans jamais se soucier de savoir si cela a du sens.

On a ainsi l’impression que la production balance des cacahuètes aux joueurs, les prenants pour des personnes aussi décérébrées que le film. Et c’est là la violence ultime dont fait preuve Borderlands : il prend les spectateurs pour des abrutis, et les joueurs pour des crétins finis. Eli Roth s’est dit fier d’annoncer que son Borderlands n’était que la première étape vers la construction d’un Borderlands Cinematic Universe (oui, encore un). Au vu de la non-qualité du film, il ne reste qu’à espérer que ce fiasco artistique, condescendant et absurde, enterre tout projet de ce genre.

Borderlands affiche
Rédacteurs :
Résumé

Borderlands est l’une des pires choses jamais arrivées à l’histoire des adaptations de jeu vidéo au cinéma. Eli Roth a transformé un FPS impertinent et malin en une comédie de SF premier degré, jamais drôle, toujours stupide, flanquée d’une écriture au rabais et sans aucune vision artistique.

Autres avis
  • Antoine Desrues

    Entre son adaptation sans âme et sa direction artistique ultra-cheap, Borderlands n'est pas juste un mauvais film adapté d'un jeu vidéo. C'est un mauvais film tout court.

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Commentaires
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Pimentalo

Moi j’aime bien. C’est une adaptation, ils ont choisi de saturer le couleurs (le jeu étant en cell shading, je trouvais cela malin), c’est une bonne série B, largement du niveau d’un paquet de films du MCU.

Pas le film du siècle, mais il y a, il y a eu et il y aura bien pire … Dans un monde où la VOD est saturée de trucs bâclés, non finis… Ca passe crème pour moi!

Julie

La bande annonce annonçait exactement ce fiasco

antoinebon

Eli Roth est une machine à navet.
L’univers de Borderlands est d’une laideur rare, je n’ai pas réussi à y jouer plus de 3h : le gameplay est immonde et redondant, l’univers vulgaire à souhait et sans aucun intérêt.
Pourquoi en faire un film ?

Cela dit je suis prêt à parier que cette purge interstellaire fera plus d’entrées que Furiosa.

Raiden

Impertinent OK mais malin Borderlands ? On a pas dû jouer aux mêmes jeux, c’est complètement con et premier degrès et c’est pour ça que c’est drôle.

Pseudo2

Peut-être que ce n’est pas tant une adaptation ratée qu’un film basé sur une licence sur-côté.

Borderlands est un jeu amusant, avec des blagounettes qui parfois fonctionnent, mais en soit, ce n’est ni un univers très intéressant, ni des personnages très charismatiques, ni une esthétique particulièrement marquante.

On a tendance à porter aux nues des jeux pour leur scénario ou leur univers seulement pour la simple et bonne raison que le niveau de scénario des jeux est en moyenne extrêmement bas.

Ça n’en fait pas des mauvais jeux : Half Life est un excellent jeu, mais son histoire est ridicule en soit. Elle fonctionne au sein d’un jeu, pas en film ou en roman et ce n’est pas grave.

Mickey

Des que tu vois adaptation d’un jeu vidéo tu économises 10€ merci Hollywood 🙄🤔🤣🤣💩

Satan LaBitt

Les jeux vidéos étant déjà à la base pour ados attardés, qu’attendre d’une adaptation cinéma ??

Pseudo1

J’avais pas fait gaffe jusqu’ici à la mention « par le producteur de Uncharted et Venom ».
(je laisse volontairement spider-man de côté, la licence mélangeant le bon – Raimi, Spider-Verse – et le foireux – Amazing, MCU)
.
Ca m’aurait suffi comme signal d’alarme, mais votre critique et les extraits entrevus jusque là confirment bien le ratage. Triste évolution que celle d’Eli Roth, surtout quand on se rappelle que le mec a été adoubé par Tarantino himself.

Seb34

Nous allons le voir en famille demain, j’espère que le film n’est pas trop vulgaire et que la présence de Kate Blanchet relève le niveau

Pat Rick

Pas terrible du tout en effet, ça se regarde mais sans plaisir.