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Deadpool & Wolverine : critique qui finito Marvel 

Par Antoine Desrues
24 juillet 2024
MAJ : 12 août 2024
88 commentaires

Attendu par certains, redouté par d’autres, Deadpool & Wolverine de Shawn Levy permet enfin au mercenaire immortel de Ryan Reynolds de rejoindre un Marvel Cinematic Universe mal en point depuis Avengers : Endgame. Conscient de cette position bâtarde entre rachat des droits de la 20th Century Fox, Multivers et formule fatiguée, le personnage méta ramène dans son sillage le Wolverine de Hugh Jackman, moins pour annoncer un renouveau réjouissant que pour confirmer la fin d’une époque. Critique garantie SANS SPOILERS.  

deadpool & wolverine critique finito marvel © Canva Marvel

Essai transformé ?

Sous couvert de sa déconstruction des codes super-héroïques et de son budget réduit, on oublie souvent ce qui faisait la vraie réussite du premier Deadpool. Tout Hollywood s’est jeté sur ses clins d’œil méta et sa moquerie connivente, quitte à omettre le contraste qui donnait un sens dramatique à cette origin-story. Entre l’annonce de son cancer et son envie de préserver de son dépérissement la femme qu’il aime, Wade Wilson est un super-héros qui “essaye”. Il rate beaucoup, et comme la plupart des modèles masculins actuels de la pop-culture, il enfouit ses insécurités derrière ses blagounettes, exactement comme son alter-ego Ryan Reynolds.

Mais la sincérité finissait toujours par pointer le bout de son nez, attachée à la profonde imperfection de sa figure héroïque. À ce titre, Deadpool 3 est un film qui “essaye”. Un film qui veut se trouver un petit cœur qui bat derrière les contraintes inhérentes à l’arrivée du personnage dans le giron du MCU. C’est même, d’une étrange manière, l’aveu d’échec qu’il choisit dans un premier temps de mettre en scène.

Si Deadpool fait son beurre en brisant le 4e mur et s’adressant directement aux spectateurs à travers l’écran, c’est peut-être parce que le cinéma populaire américain n’a plus que ça à proposer : des ramifications de franchises, où la connaissance des ayants-droit, des coulisses et du calendrier de sorties importe plus que l’histoire en elle-même.

L’existence pure et simple du “Merc with a mouth” (surnom de Deadpool) au cinéma, après des années de réticence par la Fox, était à l’époque du premier volet l’un de ses arguments de vente. Pour sa part, Deadpool & Wolverine est avant tout très heureux de son crossover. Mais plus encore, il est ravi d’avoir pu garder son ton de sale gosse adolescent au sein de la marque Disney, comme le montre la première séquence du film (de loin la meilleure), sous la forme d’une géniale désacralisation gorasse.

Logan Pool

Marvel est mort. Vive Marvel !

A partir de là, personne n’est dupe quant à la nature du long-métrage. Qu’importe que le TVA (l’Autorité des Variations Temporelles surveillant les différentes réalités du Multivers) de Loki serve de béquille pour raccorder les univers (et pousser Wade à sauver le sien d’une oblitération certaine), Deadpool & Wolverine suture à la truelle les licences de la 20th Century Fox à Marvel Studios dans un ultime baroud d’honneur. L’occasion peu surprenante d’assister à une foire à la saucisse du caméo gratuit et du fan-service, si ce n’est que le film en fait son véritable sujet.

Alors que Deadpool lui-même a essayé de survivre au sein de rachats de multinationales et de décisions économiques qui dépassent largement son acteur principal, le long-métrage de Shawn Levy (toujours l’un des yes-man les plus impersonnels mais efficaces d’Hollywood) ne parle au fond que de ça. Avec une tendresse certaine, il iconise ceux “qui ont essayé”, depuis plus de vingt ans, de trouver leur place sur grand écran, de rendre justice aux comics et à leur transposition malgré les désidératas des costards-cravates des studios.

Ok, revoir Hugh Jackman fait quand même sacrément plaisir

Il retrace un parcours, fait de fautes de goût, de mauvaises décisions, d’œuvres oubliées… en revenant toujours à la dimension humaine, à l’investissement de celles et ceux qui ont voulu faire de leur mieux, quitte à essuyer les plâtres pour une formule désormais contrôlée.

Bien sûr, le procédé est parfait pour reproduire les surprises calculées de Spider-Man : No Way Home, et il faut bien admettre que certaines apparitions font leur petit effet. Et elles touchent au-delà de leur simple potentiel nostalgique. Pour une fois, Deadpool raconte quelque chose de cette intertextualité envahissante, qui en vient à s’auto-dévorer (les piques envers l’état du MCU sont assez savoureuses). On pourrait même dire que le choix de Shawn Levy à la réalisation trouve un sens nouveau à l’aune de cette approche.

Ryan Reynolds a beau s’être tourné vers lui suite à leur collaboration sur Free Guy et Adam à travers le temps, le cinéaste ne fait pas que s’encanailler avec du gore et des gros mots après des années de cinéma familial (La Nuit au musée, Real Steel, Stranger Things…). Le petit cœur de Deadpool & Wolverine, c’est peut-être son parallèle avec Toy Story 3 (oui oui…) et sa façon de jeter ses super-héros dans le Vortex, une sorte de décharge du Multivers où ils ont plus que jamais des airs de figurines avec lesquelles on ne voudrait plus jouer.

Deadpool : Homecoming

Les copains d’abord

La démarche est étonnamment pertinente, même si l’exécution de ses idées s’avère beaucoup plus inégale, à commencer dans ses scènes d’action. Tantôt inspiré (la montée en crescendo d’un combat étriqué dans une voiture), tantôt brouillon (la bataille générale qui conclut le deuxième acte), le long-métrage laisse poindre la pauvreté de sa direction artistique, encore plus aride et grisâtre que l’aéroport de Captain America : Civil War, sans parler de son climax réduit à une ruelle de studio et un pauvre sous-sol.

En même temps, difficile de ne pas y voir l’illustration de son discours sur la fin d’une époque et sur le début incertain d’une autre dans une franchise surchargée. Face à la mort de la Fox, Deadpool 3 épure au maximum la marque Marvel de ses atours, et fait de ses terrains vagues un bac à sable où ne restent plus que les symboles poussiéreux du passé, et ses jouets qui s’entrechoquent.

Par la force des choses (et surtout de sa réflexivité), le film ne met pas longtemps à abandonner ses enjeux et ses connexions forcées au MCU. On peut le voir comme une déception, en particulier du côté de l’antagoniste Cassandra Nova (Emma Corrin), sœur jumelle maléfique de Charles Xavier que les fans attendaient au tournant. Pas de chance, elle n’est qu’un outil narratif comme un autre, assez vite sacrifié.

Petite déception du côté de Cassandra Nova

Néanmoins, la lassitude face à l’intertextualité marvelienne, qui a dépassé sa date de péremption depuis Endgame, nous amène à apprécier Deadpool & Wolverine plus que de raison pour son approche sarcastique de la saga. Pour le coup, le film ne tente même pas de feindre son intérêt pour l’étendue de son monde et son potentiel avenir (Wade assume que son univers est réduit aux neuf personnes qu’il aime).

La caméra n’a d’yeux que pour la rythmique comique de Ryan Reynolds et pour le charisme de Hugh Jackman. Deadpool a d’ailleurs le mérite de s’effacer pour laisser ce Wolverine déchu devenir l’ancrage émotionnel logique du long-métrage. Lui aussi “essaye” de se forger une forme de rédemption, de corriger les échecs du passé. Dans cette dynamique de buddy-movie fantasmé, le film trouve un équilibre vraiment fun entre la gaudriole facile (mais souvent drôle) et une ampleur dramatique insoupçonnée. Ça ne fonctionne pas toujours, mais au moins, ils “essayent”.

Rédacteurs :
Résumé

Derrière l’opportunisme de ce rapatriement chez Marvel, Deadpool & Wolverine surprend par son regard tendre sur la fin d’une époque (celle de la 20th Century Fox), qui sonde les tréfonds d’un coffre à jouets poussiéreux pour donner à ses figurines cassées un ultime tour de piste. Certainement pas un grand film méta, mais celui dont le MCU a besoin aujourd’hui.  

Autres avis
  • Geoffrey Crété

    Qu'est-ce que c'est long. Et monotone. Et répétitif. Et vide. Et triste.

  • Mathieu Jaborska

    Voyage au bout de la boutique Funko Pop.

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Commentaires
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davidberthelot

Critique très pertinente et réfléchie mais je ne suis pas d’accord sur un point:le film ne met pas longtemps à abandonner ses enjeux et ses connexions forcées au MCU Pardon ? Le film est très TRES lourd sur ce sujet mais alors d’une lourdeur ! Ils ont tordu deadpool dans tous les sens pour qu’il rentre dans le moule Disney et c’est forcé ça se sent… Dommage le moins bon des 3 films pour moi

Mrbendix

Très décevant de ce deadpool , Ryan renolds ne change pas son habitude de jouer son personnage( heureusement qu’il redresse le film ,hug jackman pour moi était clairement pas dans ce côté comique wolverine, j’ai l’impression que les studios Marvel on fait une soupe de tous les ingrédients qui restaient .

Justine

Nul à chié

des-feves-aux-beurres-et-un-excellent-chianti

LEGERS SPOILS A SUiVRE

Vu en fin d’après-midi , déjà oublié ce soir au moment où j’écris.C ‘etait quoi déjà les enjeux et c’est quoi un Logan gardien de sa terre dont Wade a besoin, gardien c’est pas le mot utilisé dans film mais genre il est important Lolo.Et pourquoi la terre numéro je sais plus de Wade va t elle se faire éradiquer ?
Scénario fourre tout juste prétexte à faire évoluer les perso.La méchante -on sait pas pourquoi elle est si méchante- est pas si forte que ça au regard du potentiel aperçu dans les bd. C’est la soeurette de Xav’ pourtant. Les pontes d’Hollywood devraient faire une statue au scénariste qui a proposé le Multivers .
Évidemment c’est du Deadpool donc beaucoup d’hémoglobine (CGI mal faites) et beaucoup de bonnes blagues, j’avoue j’ai bien rigolé à quelques vannes très drôles et mes ados se sont poilés tout le film même s’ils leurs manquaient parfois des ref( dans les vannes commes dans les images d’autres films et surtout les gros Cameos ).Faut avoir un peu de culture BD et cinématographique pour bien apprécier certaines séquences fan-service (old Logan , le petit Logan qui est en fait à la bonne taille des bd, les méchants des films X-Men) sinon ça passe quand même.
Le 4em mur et la pseudo irrévérence impertinence ça m’allait très bien dans le très frais Deadpool 1er du nom , moins dans le 2 et ça me soule dans le 3 lorsque c’est érigé en marque de fabrique .
Le bureau TVA vu dans Loki je pense qu’on va encore le voir et le revoir.
Désormais je accompagnerais plus jamais mes ados pour un Marvel et pour ce qui est des univers parallèles et des voyages dans le temps, je vais me rematter la série Dark et Retour vers le Futur

Berlingo

Plus bof que bof, Deadpool 3 prouve à nouveau que le film de 2016 n’avait pas besoin de suite. Le personnage est tellement too much qu’un seul film suffisait, il était d’ailleurs très réussi. La machine Disney-Marvel est au bout du rouleau, et quoi de plus normal quand on a autant tiré sur la corde du business de la suite facile où on reproduit le même film à l’infini (et au-delà). Et ne parlons pas de cette énorme arnaque du multivers.
Et ben malgré tout ça, Deadpool 3 n’est pas si nul que ça, malgré ses bons sentiments artificiels et son scénario ridicule qui semble écrit par 4 potes geek défoncés un soir de déprime célibataire. C’est tellement con et tiré par les cheveux que ça en devient drôle, les punchlines sont tellement trash qu’on se marre sincèrement, et les deux persos sont tellement bouffons qu’ils finissent par nous attendrir. Et puis quel plaisir de revoir Hugh Jackman en Wolverine, le rôle de sa vie! Même si il n’est pas aidé par le scénario et les dialogues ineptes, le charisme de l’acteur fait encore une fois s’enflammer le Wolverine, comme toujours depuis le premier X-Men.
Conclusion, à voir pour se marrer et se vider (profondément) la tête, un soir de canicule. Mais il est grand temps pour le MCU de raccrocher définitivement le costume.

CIDJAY

Vu cet après-midi et j’ai tout simplement kiffé ! C’était drole, bien rythmée abec de bonne baston et un peu de gore et cest au final tout ce que je demande a un film Marvel du Calibre de Deadpool !

Marc en RAGE

Le retour de LOGAN/// en 2017 dans LOGAN nous voyons la mort du plus emblématique Héros . Personne n’avait envisager que son retour était possible.

 ☆☆☆☆☆

Flo

Deadporn cameos…
Deadporca miseria !

En préambule, il faudrait citer cette règle non écrite : quand Marvel va, Deadpool va (bien). C’est à dire que l’existence de ce personnage ne trouve toute sa pertinence que si l’univers dans lequel il vit tient sur ses jambes, avec ses héros vertueux, admirés et solides. En gros, il est à Marvel comics ce que Marvel est à DC comics… une opposition iconoclaste, sarcastique, impertinente, subversive.
Or depuis 2018 (donc au moment de la sortie du deuxième film), Deadpool est un personnage qui est arrivé en bout de course, incapable de se relever d’un run formidable de plusieurs années dirigé par le scénariste Gerry Duggan, où le mercenaire à grande gueule a vécu ses heures les plus controversées et les plus émouvantes. 
Bien sûr tout le monde ne va pas goûter la qualité de ces scénarios, mais le fait est là : depuis, Deadpool n’a plus eu de série fixe, menée par le même scénariste et capable de durer plusieurs années. Chaque relance a vu son lot d’artiste durer le temps de un an max, avec des propositions narratives pas vraiment à la hauteur, obligeant les gugusse à squatter les comics de ses congénères. Les autres comics Marvel ayant eux-aussi bien baissé en qualité (on a toutefois une poignée de bons scénaristes à suivre), on peut y voir un lien de cause à effet…
Tout comme un signe que les héros principaux sont eux-mêmes devenus bien trop légers, et n’ont donc plus autant besoin que Deadpool vienne jouer au bouffon du roi.

Et voilà qu’en plus de ça le studio Fox a perdu son indépendance, faute d’avoir su négocier l’évolution des blockbusters – s’il fallait attendre James Cameron pour atteindre le pallier du Milliard de recettes…
Le temps de fusionner avec Disney, les embûches imprévues vont pleuvoir sur tous les films à gros budget, même si ça sera bêtement plus facile de tout mettre sur le dos d’un seul studio, et des femmes, des gens de couleurs etc… bref l’arnaque, la fameuse, consistant à cacher l’intolérance et l’envie de pureté derrière une pseudo recherche d’excellence.
Fallait-il alors tomber des deux pieds dans la flatterie pour mieux remettre les compteurs à zéro ? Car Deadpool normalement, c’est pas ça : le premier film était un acte de piraterie gonflé (l’essai qui a fuité sur le Net), rentre-dedans, malpoli, à la promo inventive, un pastiche des origin stories etc… Le tout avait aussi le culot de raconter quelque chose sur son acteur principal Ryan Reynolds, jouant son va-tout dans une comédie d’action également funèbre, pour donner un nouveau souffle à sa carrière (et avoir un succès surtout).
Le deuxième film, pastiche des films d’équipe, enfonçait le clou en étant moins moche visuellement, plus mélancolique, plus doux au milieu de toute cette barbarie jouissive (le gag de « Basic Instinct » avec un zguègue de bébé, scandaleusement drôle)…
Et ensuite… ce sous-genre anti-héroique trash s’est complètement démocratisé, « The Boys » (visuellement pompé sur le premier film) s’est imposé directement dans les foyers, et les vrais héros, les gens qui réfléchissent, sont devenus peu à peu des parias, y compris dans la vraie vie…
Comment Deadpool peut alors survivre sans eux, là est la question… que va à peine poser le troisième film :

La scène introductive promettait pourtant le meilleur en confirmant que le personnage ne respectait toujours rien ni personne, enchaînant ensuite sur une série de bastons frimeuses… sur un standard musical lointainement croisé dans un film des X-Men. Et avec de vrais noms au générique, pas des commentaires acides sur la conception du film, comme avant. 
On comprend alors que, même si le film ne se répète pas, il met tout de même la pédale douce sur l’autodérision maso. Et ce n’est pas le gentil Shawn Levy qui va changer la donne, cinéaste qui n’a aucun style, aucunes thématiques qui s’étaleraient sur plusieurs films (au contraire de la majorité des artisans du MCU, oui et oui). Tout au plus il sait gérer les acteurs par paquets, fait un peu de SF, mais avant tout il se met au service docilement, surtout pour de grandes marques (même Google !).
Ne pas compter sur lui ni Reynolds ni qui que ce soit d’autres pour mettre de l’ordre dans les univers de la Fox, le résultat reste blindé d’incohérences, en rajoutant une couche par pur opportunisme : on saute d’un univers à un autre n’importe comment, avec Wade Wilson qui recherche désespérément la gloire pour compenser le vide de sa vie… les films « X-Men » sont capables de changer l’histoire quand on voyage dans le Temps, ce qui est incompatible avec le MCU (qui crée des branches parallèles)… le TVA n’est même pas aussi fort que les brisages de Quatrième Mur de Wade…

Et pour ce qui des cameos, en fait c’est horrible : tous des « tocards ». 
Certes déjà le cas dans le premier, Ajax étant le pire des super-vilains possible. Tandis que le deux récoltait les pires membres de l’équipe X-Force… il y a donc un parti-pris consistant à suivre de drôles de loosers, n’ayant aucun impact conséquent sur une saga, servant de chair à canon à quelques exceptions près (l’incompréhensible Peter, ni Wisdom, ni Parker, juste le copain Rob Delaney).
Idée qui se retourne maintenant contre le troisième film, plus ou moins une satire des gros crossovers cosmiques :
On n’a que des guests (ou bien des doublures pas connues aux airs de clodos – la plaie des scènes de foules) ayant joués dans des franchises qui se sont plantés, ou même qui ont été avortées (ça commence à être une tendance à Hollywood)… Mais coup de chance, ce sont aussi plein de potes du réalisateur.
Même le Wolverine principal y est présenté comme un des pires, avec d’ailleurs un trauma si bidon qu’on ne nous le montre même pas. Ça fait pas vraiment rêver tout ça.
Il y ainsi un commentaire sur les productions passées de la Fox (étrangement pas trace de « New Mutants », pourtant lié au sacro-saint « Logan »)… mais avec aussi du New Line ou du Sony (garanti sans Spider-Man, trop précieux pour qu’on y touche)… Donc toujours un film sur Hollywood, normalement. Qui montrerait les faces positives et négatives de la machine à rêver.
Et plutôt que de parler continuellement des choses qui ne vont pas dans les blockbusters modernes (« les films qui font trois heures ! »), on reste centré sur son petit monde Marvelien passé, sans qui le MCU moderne n’aurait pas pu exister – c’est à dire en se bâtissant aussi sur les erreurs d’antan… pour mieux faire de nouvelles erreurs, ou ces éternels (!) problèmes de communication avec le public.

Au moins le duo bourru/bavard de Logan/Wade-Moutarde/Ketchup, ne bégaye pas avec celui de Cable, restant ainsi collés l’un à l’autre pendant presque toute l’histoire. Avec l’ambition d’émuler « 48 heures »… mais dans ce cas il fallait Vraiment faire « 48 heures », c’est à dire une enquête policière menée par deux types cassés de l’intérieur, se la jouant en solo malgré eux, ne se faisant pas confiance pour cause de préjugés, et finissant par s’apprécier mais en s’exprimant toujours par des invectives. C’est ça qu’on aurait pu attendre, pas des batailles de chiffonnier immatures, faux culs, incompréhensibles (les transformations régulières de Logan en sauvage trapu) et mouchardeurs.
Ça ne raconte rien, et même quand au bout d’une heure on rappelle des enjeux personnels et qu’on assène des faits blessants, on finit par laisser tomber et se reposer encore sur des références copiées-collées, des tubes musicaux vintages, et des vannes méta, certaines crypto gay, montées au dernier moment pour être réactif envers l’actualité. Comme ça, on évite de se confronter à la douleur morale, avant d’arriver à la fin de l’histoire – dégonflés !
Pire, niveau méchant on en a un, puis une autre méchante et ses sbires sans âme, qui deviendra alors brièvement gentille, puis à nouveau méchante destructrice classique – dans un final pompé sur celui du premier « Gardiens de la Galaxie » (l’union fait la force etc). Aucun des deux vilains n’a de problématiques personnelles qu’on aurait pû lier aux protagonistes principaux (à part que ce sont eux-aussi des gros bavards ironiques), donc ils ne sont que des archétypes remplaçables.

Le côté autocentré de l’entreprise se borne à piocher dans un énorme coffre à vieux jouets, sans partager et sans créer quoi que ce soit de neuf à partir de ça. C’est la même limite que les adaptations de jeux vidéos : si c’est pour regarder un autre jouer, ça finit par être ennuyeux. Si ce même joueur transforme son matériel devant nos yeux, là ça peut devenir intéressant.
Le terme de « Fan service », tellement utilisé aujourd’hui, devrait toujours être associé au mot « transcender », ou au moins à sa possibilité… C’était le cas dans « Avengers : Endgame » (film Proustien) et « Spider-Man : No Way Home » (réflexion sur les migrants, les expériences traumatiques communes et la puissance des aînés face à un abus de confort).
Ce n’est pas le cas ici, le film partageant avec le deuxième « Dr Strange » une désinvolture dans les meurtres de héros (au lieu d’être critique, ils feraient mieux de les défendre) et des tas de variants en guise d’adversaires qui sortent direct des comics… mais tous ayant souvent l’air de cosplayeurs.
Sauf qu’on n’est Pas dans des comics, il faut préparer ses effets avant de les balancer à l’écran, il faut un minimum d’iconisation quand on a des uniformes aux couleurs vives… et ici ça n’arrive que de façon sporadique (avec un masque de Wolverine aux formes aussi emblématiques, il y avait pourtant de quoi faire).

Comme dans « Free Guy » il n’y a pas de structure narrative claire, on passe du coq à l’âne grâce à tel artefact sorti de nulle part, alors que même les Marvel les plus honnis savent être découpés en trois actes… 
Les cascades chorégraphiées sont fonctionnelles (pour des surhumains qui ne peuvent pas mourir), sans rien créer qu’on n’ait déjà vu un jour. C’est dommage, quitte à avoir un scénario léger, autant miser alors sur du classique et besogner à mort les scènes d’action pour que celles-ci engendrent du fond. N’est pas « Blade II » qui veut, n’est-ce pas ?
Tellement de faux sang numérique que ça en devient déréalisé, même pas dérangeant… Et même les grands espaces déserts ne se justifient pas – à un moment on cite honnêtement la règle « d’évacuation des civils » (on n’est pas dans « John Wick » ici, c’est pas des PNJ), mais dans le reste du film la seule façon pour que ça reste pertinent ça aurait été de faire une quête à la Heroic Fantasy. Ou d’assumer complètement le look Mad Max (on se retrouve à nouveau avec un sous Old Man Logan). De toute façon y a plein de films en un là dedans, et aucun n’est abouti.
Et le plus pénible (en dehors de Deadpool lui-même), ce sont ceux qui se diraient que c’est pas grave, n’y pensons pas trop, c’est pour s’amuser… Mais il n’était pas question Que de s’amuser là dedans, il y avait l’opportunité d’être ludique en faisant aussi émerger une forme de noblesse, créant des ruptures de ton mais de façon sérieuse.
Pour avoir une boîte de production du nom de Maximum Effort, l’équipe de Reynolds n’en fait justement pas beaucoup, d’efforts – même la VF d’ailleurs (pas de retour de Joël Zaffarano ou de Thierry Desroses).

Bon on va s’arrêter là…
En bref : Ryan Reynolds a tenu la promesse faite à la fin du précédent film (c’était déjà le cas dans le premier, où il teasait Cable etc)… il a enfin eu son duo avec Hugh Jackman, et offre à Wolverine une fin optimiste – ce n’est que la troisième fois après tout. Avec ce foutu costume jaune qui, s’il n’est pas totalement justifié par le scénario (pourquoi un uniforme aussi flashy ?) est toutefois homogène avec celui de Wade.
Lequel a donc maintenant un orteil dans le MCU, et on peut compter sur de futurs cameos dans les prochains films, histoire de créer artificiellement de l’excitation.
Reynolds continue de se moquer de lui-même, et n’arrive plus à trouver de nouveaux gags – on sait qu’il est beau gosse etc, mais quand est-ce qu’il va tourner en dérision son propre mode de fonctionnement ?
Le foisonnement de blagues de sales gosses essaie de compenser avec le festival de références Pop, et bien entendu ça empêche le film de penser à représenter une violence qui fait très mal, s’abstenant ainsi de toutes velléités radicales… l’objectif final de Reynolds et Shawn Levy restant le même que dans « Free Guy » : prôner les vertus de l’amitié, la tranquillité, dans un monde où tout vous pousse à réagir de façon extrême.
Film qui remplit son contrat (sans le moindre extra), fait son petit hommage nostalgique à l’ancienne Fox… et ne sauve rien du tout si ce n’est le bilan financier du studio – de toute façon il faut toujours être méfiant et prendre le contre-pied quand on a ce genre d’élément de langage.
Mais à quoi pouvait-on s’attendre avec une histoire de mercenaire ?

Bob

Voilà.
Marvel à tout misé sur son MCU.
DC s’est mis plus tardivement tardivement à son DCU. Et ses meilleurs films sont hors du DCU.

Cette histoire d’univers étendu, c’est quand même bien un concept casse-gueule. Juste une manne de fric facile. Faut assumer les conséquences.

Ludospace

Pour les amateurs des blagues de Jean-Marie Bigard…