Films

Parthenope : critique je t’aime à l’italienne 

Par Antoine Desrues
11 mars 2025

Depuis l’interminable Silvio et les autres en 2018, on n’avait plus vu Paolo Sorrentino sur grand écran. Le réalisateur de La Grande Belezza et Youth était parti du côté de la série télé (The New Pope) et de Netflix, le temps d’une autobiographie déguisée plutôt touchante (La Main de Dieu). Dans la continuité de ce film sur sa ville natale de Naples, le roi du bling-bling était de retour à Cannes en 2024 avec Parthenope, à la fois synthèse et caricature de ses obsessions porté par la jeune Celeste Dalla Porta. En salles le 12 mars.

Parthenope : critique je t’aime à l’italienne © Pathé

Femme objet ou femme lieu

À l’instar de la sirène qui porte son nom (et nom antique de Naples), Parthenope sort d’une eau bleutée et fantasmatique. Paolo Sorrentino n’y va pas par quatre chemins : son personnage est une pure allégorie, une personnification de la ville qui l’a façonné. Tandis que La Main de Dieu se voulait une introspection teintée d’autobiographie sur l’adolescence et ses épreuves, son nouveau film en est le pendant féminin.  

On pouvait craindre le pire, et on avait raison : sous couvert de son obsession pour la beauté et ses “réflexions” sur une certaine vulgarité à l’italienne (Sorrentino est-il la critique ou le produit de l’époque Berlusconi ? Vous avez quatre heures), le réalisateur se complaît dans le filmage de cette femme sublime. Celeste Della Porta, dont le magnétisme reste évident, est scrutée comme un bout de viande au bronzage parfait.  

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Déesse ou des seins ?

Pendant plus de deux heures, on a l’impression de voir la caméra agir comme le Loup de Tex Avery, et c’est bien normal, puisque Sorrentino met en scène son propre désir via celui des autres personnages. Parthenope attire tous les regards qu’elle croise au cours de ses déambulations napolitaines, et fascine au-delà de sa plastique.

Le réalisateur veut bien nous marteler qu’elle est brillante, dans ses conversations comme dans ses études d’anthropologie qui lui valent le soutien d’un professeur important. Il en fait un mythe et une muse, mais l’abstraction s’efface chaque fois que les images tape-à-l’œil s’efforcent de tout glamouriser (c’est-à-dire à peu près tout le temps).  

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Capri, c’est fini

Week-end à Naples 

Beaucoup avaient déjà pointé du doigt la présence importante de la maison Saint Laurent en tant que productrice de films de la compétition cannoise. Parthenope était taillé pour, avec ses airs de défilé publicitaire pour mannequin. On pourrait évidemment parler de male gaze, qui essaie assez pitoyablement de se planquer derrière l’admiration qu’il a pour sa protagoniste. On préférera cependant parler de no gaze, tant cette iconisation permanente perd tout sens et toute beauté. 

Au fond, cette anesthésie, voire ce vide, ont toujours été au cœur de la filmographie de Sorrentino. C’est même dans cet équilibre primaire entre la réflexivité et l’auto-satisfaction de son regard bling-bling que le cinéaste a pu fasciner. Parthenope montre que la balance pèse désormais d’un seul côté, et qu’il recycle les mêmes motifs, mieux traités dans ses films passés (en particulier La Grande Belezza).

Celeste Dalla Porta et Gary Oldman dans Parthenope
Gary Oldman qui passe une tête

Face à cette oisiveté, cette peur de l’ennui et ces névroses de la bourgeoisie, l’auteur observe, plein de désillusions, le parcours de celle dont la pureté va le rejoindre dans ce désenchantement inévitable. Ce vernis napolitain se voudrait mélancolique, mais sent plutôt la naphtaline qui n’a plus grand-chose à raconter. S’il reste ici ou là de trop rares moments de grâce (cet été idyllique qui semble filer entre les doigts du personnage), la vulgarité si caractéristique du réalisateur vire à l’auto-parodie.

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Résumé

Sorrentino voudrait faire de cette personnification de Naples un fantasme total. Il en tire surtout une coquille vide empêtrée dans sa vacuité.  

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