L’excellent Revenge est dans les salles et nous rappelle qu’une nouvelle génération de cinéastes hexagonaux s’emparent du cinéma de genre.
Et pas n’importe quel genre, puisqu’il s’agit ici du Rape and Revenge. Soit un genre parmi les plus controversés qui soient. L’occasion était trop belle de revenir rapidement sur une catégorie de productions souvent méconnues et caricaturées.
La Dernière Maison sur la Gauche
LA DERNIÈRE MAISON SUR LA SOURCE
Au commencement était une jeune femme, plus ou moins pure, qui fit la rencontre d’un grand méchant mâle, lequel, tout enivré de vice et de violence, lui fit subir les derniers outrages. Mais le monstre était loin d’ignorer que de proie, sa victime allait devenir prédatrice et lui faire passer un sale quart d’heure.
Voilà en gros la base du principe du Rape and Revenge (littéralement « viol et vengeance »). Base que l’on retrouve dans un conte médiéval suédois remontant au XIVème siècle, où une enfant se fait violer par d’affreux pêcheurs, ce qui déclenchera l’ire de ses parents. C’est l’origine d’un chef d’œuvre : La Source d’Ingmar Bergman.
Le métrage va marquer au fer rouge un jeune homme répondant au nom de Wes Craven et présidera à son inspiration lorsqu’il doit réaliser son premier long. Un temps envisagé comme un film pornographique émaillé de séquences gores, le métrage va se transformer en relecture de La Source et instantanément cristalliser les codes du genre.
Ils vont néanmoins encore s’affiner un tantinet, faisant de la victime non pas le tremplin d’une force revencharde extérieure, mais bien une incarnation même de la vengeance. Ainsi dans Thriller : A cruel picture, l’héroïne n’a pas besoin des siens ou de sa famille, c’est elle seule qui va chercher rétribution. Il faudra attendre un autre film d’exploitation devenu culte, Oeil pour oeil / I spit on your grave, pour que le schéma de la victime devenue bras armé d’une forme de justice immanente et bourrine soit totalement établi.
VOUS REPRENDREZ BIEN UN PEU DE VICE
Si ce sous-genre fait autant causer, s’il interroge, c’est pour plusieurs raisons. Tout d’abord, quand il surgit dans la forme qui est encore la sienne aujourd’hui, le genre aborde de front des sujets alors très peu ou pas traité par le cinéma, à savoir le viol et la justice personnelle. De plus, il le fait avec un jusqu’au boutisme et une radicalité qui vont marquer les esprits. Enfin, nombreux sont les personnages de ces films à boire ou consommer des produits stupéfiants, autant d’activités alors rarement représentées de manière aussi directes.
Mais surtout, c’est le regard des cinéastes qui est en cause. Le cinéma d’exploitation va bien sûr se réfugier derrière l’argument voulant que les femmes étant présentées comme des victimes, et triomphant de leur agresseur, ces films ne sauraient être qualifiés de sexistes, mais les choses sont plus compliquées.
En effet, nul besoin d’être un grand génie de l’analyse ou un devin pour bien se rendre compte que nombre de ces créations préfèrent jouer avec les zones d’ombre de nos fantasmes, avec le côté voyeur du spectateur, ainsi que notre intérêt instinctif pour toute représentation de sexe et de violence. Les viols y sont souvent interminables et complaisants, tout comme leurs conséquences sanguinolentes. Un cinéaste a d’ailleurs parfaitement assumé l’ambigüité inhérente au genre et à la démarche. Il s’agit d’Abel Ferrara, qui dans Mrs 45 se donne le rôle d’un des violeurs de l’héroïne, reconnaissant ainsi que son propre rôle en tant que cinéaste est ici dual.
CONTAGION AND REVENGE
Forme extrême de cinéma, qui secoue conventions artistiques, confort du spectateur et représentations morales, le Rape and Revenge dans sa forme la plus pure est éminemment discutable et ne craint pas de flatter les bas instincts de son public. C’est ce qui le rend intéressant, rugueux, et qui va lui permettre d’essaimer partout, dans nombre d’autres genres.
Ainsi, l’idée était déjà en germe dans Les Chiens de paille, qui n’appartient pas au genre à proprement parler, mais qui fait du viol et de la réaction qu’il engendre une charnière (Ô combien problématique) de sa structure narrative.
Lady Vengeance
Bien d’autres réalisateurs puiseront symboles et idées dans le Rape and Revenge, jusqu’à Park Chan-wook dans Lady Vengeance ou Pedro Almodóvar avec La Piel que habito. Dans l’Hexagone, Le Vieux fusil n’est pas loin d’appartenir au genre également. C’est parfois un cinéma aux limites de l’expérimentation qui s’emparera de ces codes, quitte à produire quelque chose de bien plus extrême encore, comme en témoigne le terrible Quand l’embryon part braconner.
Apportez-moi la tête d’Alfredo Garcia, ou un jeu diabolique entre sexe et violence
#BALANCETONRAPE
Et voici venir Revenge. Sur le papier, le film de Coralie Fargeat ne varie pas d’un iota du programme établi. Mais à l’écran, plutôt qu’un abîme crapoteux, c’est un grand huit survitaminé qui emporte le spectateur. On n’ira pas jusqu’à expliquer benoitement que le genre de la réalisatrice suffit à expliquer ce retournement stylistique et rythmique, mais il paraît néanmoins évident que son regard, s’il joue la carte de l’iconisation et de la réification du personnage féminin, y apporte une distance et une jubilation qui transforment l’ADN du film.
Il y a quelques années, l’imparfait Hard candy annonçait ce qui était peut-être sur le point d’advenir : un renversement plus ou moins total du sens du Rape and Revenge. À l’heure de #MeToo et de #BalanceTonPorc, on pourrait bien voir une tripotée d’œuvres et de styles, hier uniquement pensé et mis en scène par des hommes, se voir renouvelés et redynamisés par des réalisatrices désireuses de proposer des visions alternatives, ou tout simplement décalées de ces modèles.
Et ce serait Grave bien.
C’est un genre qui est traditionnellement prévu pour les hypocrites : le public se délecte du viol d’une femme pour ensuite hypocritement se ranger du coté de la victime qui se venge (un peu comme le collabo en 40 qui obéit au pouvoir et lorsque ce dernier change en 44 se met à faire du zèle pour l’autre coté). Dans les deux cas, les spectateurs qui aiment participer à cela sont des F…de P… que ce soit dans le « rape » comme dans le « revenge ».
Seul « Deliverance » trouve grâce à mes yeux car il dépasse ce cadre idiot et de bas instinct.
Et ils sont où les fachos du forum ? Se prononcent pas là ?
Dans le genre on a eut aussi Irréversible en france.
Un genre qui questionne sur notre sens de la justice, c’est comme celà que je l’ai toujours vu, j’attend impatiemment de voir ce que va donner la vision de Fargeat.
Boubbiedu06??? Tu peux expliquer??????