Acclamé à Gérardmer, Ghostland fut une des très belles surprises de l’année horrifique. C’est donc avec impatience et curiosité qu’on découvre le film en Blu-Ray.
LE DIABLE DANS LES DÉTAILS
Bien sûr, le film en lui-même n’a pas changé, et le format Blu-Ray permet d’en magnifier les forces, comme d’en souligner les rares faiblesses. Le travail de la lumière retrouve, grâce au très beau transfert qui nous est proposé, toute sa finesse et sa richesse. On apprécie tout particulièrement que ce nouveau visionnage dans des conditions optimales permette de mieux apprécier la grande richesse de la direction artistique.
Disponible en VOD, DVD et Blu-Ray dès le 17 juillet chez TF1 Vidéo
La pléthore de textures, la direction artistique à la densité invraisemblable, et les multiples jeux entre premiers et seconds plans peuvent désormais être décortiqués, scrutés, grâce à un support souvent proche de la perfection en termes de définition. On relèvera d’autant plus nettement les jeux discursifs et thématiques déployés par Ghostland, qui feint dans sa première partie de déployer une esthétique proche de l’American Gothik, pour finalement marier les influences et interroger le cœur de la notion de cauchemar.
En revanche, la haute définition est parfois impitoyable avec certains (rares) segments, qu’on devine filmés dans l’urgence, ou victimes du modeste budget de l’œuvre. Ainsi, les segments où Beth évolue dans son fantasme littéraire sentent le gros numérique qui tâche, et la fuite des deux ados dans les plaines détrempées et désertiques du Manitoba, malgré la splendeur du décor, souffre d’une définition moins aboutie et d’un étalonnage qui semble parfois lâche.
Un décor en trompe-l’oeil, impressionnant en haute définition
Ghostland demeure néanmoins une création mutante, qui sublime beaucoup des thèmes chers à Laugier, les condense et les tord jusqu’à l’abstraction. Le résultat est un faux shocker, qui secoue le spectateur selon les niveaux de réalité qu’il lui fait traverser. Soit la promesse de véritables bouffées d’horreur et d’angoisse, emballées au sein d’une jolie réflexion sur l’éthique de la création et le courage.
TIENS, VOILÀ DU MYLENE !
La star de la chanson française, principal argument promotionnel lors de la sortie du film, est logiquement au centre des bonus proposés par cette édition. L’interview qu’elle accorda en direct au 20h de TF1 (qui édite le disque qui nous intéresse est présente in extenso). Elle est parfaitement dénuée d’intérêt et n’est finalement là que pour rappeler combien les plateaux du grand’messe « informatif » sont mal éclairés et leurs présentateurs incapables de mener une interview décente.
Une des séquences les plus éprouvantes du film
Passons sur les interviews des comédiennes, promotionnelles mais sans substance. C’est d’abord du côté du making-of que l’on trouvera de quoi se mettre sous la dent. Ce dernier, s’il manque un peu de liant et de structure, propose une très belle plongée au cœur du tournage.
Alors que le support vidéo se meurt un peu plus chaque année, rares sont les éditions de films contemporains proposant de véritables aperçus de leur processus créatif. L’occasion ici de ressentir toute la rugosité du tournage, son constant besoin de prises de décisions tranchées, voire d’improvisation, mais aussi la formidable humanité qui s’en dégage.
Il a beau s’agir bien sûr d’un document promotionnel, il recèle quelques très beaux moments d’abandon, d’exploration, de saynettes volées entre Mylène Farmer et le réalisateur, au moment de définir l’angle d’une scène, son intention, puis sa mise en place. Autant de moments qui battent en brèche avec intelligence la réputation de bourrin patenté qui colle à la peau de Pascal Laugier.
C’est d’ailleurs son interview qui compose peut-être le bonus le plus intéressant de cette édition. On y retrouve certes le mélange de gouaille et de rodomontades, de cinéphilie aiguë et d’exigence stylistique, qui font le cinéma de l’artiste, mais c’est peut-être plus encore dans ces à côtés que la discussion passionne.
Quand il revient sur son admiration pour ses actrices, quand il évoque brièvement son incapacité à narrer des histoires ayant pour héros « des types, là, avec des barbes », Laugier livre autant de simili-clefs, de pistes d’interprétation, passionnantes, de ses propres codes et représentation. Au travers de cet entretien et de ce making of brut, ce n’est pas le cliché recuit du metteur en scène obsédé par la violence imposée au cœur féminin, mais plutôt un continuateur d’Argento motivé par une forme tordue et donc passionnante de réflexion sur le féminin sacré et le dépassement de soit.
Excellent ride horrifique, Ghostland consacre le travail de Laugier comme une cartographie de nos interdits et jachères morales, qu’il nous tarde d’explorer de nouveau en sa compagnie.
Et si tant que vous y êtes, il vous en faut encore, les copains de Cinetrafic tiennent à jour deux jolis classements des meilleurs films d’horreur, ou d’épouvante.
Joli film sur l’esthétique du cauchemar et belle réflexion sur la mise en abîme que traverse tout écrivain qui fait de soi la matière première de son œuvre. Je ne partage absolument pas les points de vue entendus et lus ici et là concernant la soi-disante dégradation de l’image de la femme : le réalisateur a, maintes fois, communiqué sa passion de la représentation des femmes et son souhait d’explorer l’autre (organique et psychologique) dans sa différence de l’appréhension du réel et sa perception des réponses possibles à la violence – réponses parfois étonnamment ou violemment contraires à l’attitude masculine classique dans les innombrables films sacralisant le mâle rationnel, brut, animal (au sens de l’a-réflexif et du comportement inné régi par l’instinct primaire). En toute sincérité, je n’ai jamais vu Martyrs mais reste chaque fois perturbé par les quelques photos ou vidéos du film. Si le gore de Martyrs ne m’intéresse pas(ce n’est pas un jugement mais un simple constat personnel), l’horrifique de Ghostland m’a séduit jusqu’au vertige. Au-delà du retournement (en fait… des retournements, non ?) de situation aux deux-tiers du film, c’est le jeu de genres auquel se livre Pascal Laugier qui m’a tenu en haleine. L’auteur vit, revit, rêve, dépassé, succombe aux événements tour à tour et les ultimes paroles de l’héroïne laissent deviner un ultime pied-de-nez : où est donc Vera ? Je ne suis pas persuadé qu’une lecture linéaire convienne, Laugier est bien trop retors pour se laisser enfermer dans une assimilation aussi tranchée de son film. C’est ce qui continue de m’attirer vers lui et son cinéma. Son Saint-Ange m’avait intrigué, son Secret définitivement séduit. Le dernier usait du même principe, déjà, mais dans un constat sociologique et presque politique – réflexion de classes (assez) rarement exploité par le genre. Ici, c’est l’oeuvre et son auteur qui se regardent et se confondent jusqu’à ne plus savoir qui engendre qui. Les décors m’ont étonné : la maison isolée si typique du genre est, dès le début, exploitée dans une vision très « maison de poupées » savamment entretenue par l’ancienne propriétaire (ou l’auteur de ce cauchemar éveillé ?). La poupée, fétiche du mâle dans sa représentation figée et donc exploitable du féminin se révèle contemplative, menaçante, effrayante, apaisante – avant de finir par incarner l’ultime rempart face à la violence du monde extérieur (au-delà même des deux meurtriers dont le sadisme n’est qu’une incarnation d’un monde que Laugierne comprend pas ou plus). Non, la caractérisation a-sexualisée de l’un des deux assaillants ne m’a pas choqué – et il n’y a guère que des médias américains pour ne rien y comprendre dans cette recherche éperdue du normalisé à outrance et le déni de toute analyse filmique même peu élaboré : il suffit de se pencher sur la représentation que donne à voir ce personnage. Mère (par défaut ?), fétichisation d’un corps « autre » pour tenter d’en capter et d’en offrir une image (forcément caricaturale) a cet enfant-meurtrier qu’est resté son compagnon de l’ultra-violence. Et non, l’homme n’asservit pas ; mais le monde, oui. Il suffit ici encore de contempler les autres incarnations masculines du film : le compagnon de l’auteur, la personnification de Lovecraft, les policiers ou l’ambulancier (j’en oublie peut-être) pour tenter d’appréhender la vision masculine de Laugier : l’homme peut être tour à tour aimant, inspirant, protecteur… mais demeure en-deçà d’une nature féminine qui seule ressent le monde dans sa chair puisqu’elle seule engendre et nourrit. L’homme est dépassé par sa propre création, une société se nourrissant de violence jusqu’à la démesure. La direction d’acteurs, pour finir, est un régal et laisse à voir, contempler, dévorer des yeux des êtres (parfois profondément) humains, désespérés à force de se débattre dans un univers hostile qu’ils ont, je le disais plus haut, parfois contribués à créer – y compris dans le laisser-faire. Tout cela symbole de l’auteur face à son œuvre, une fois de plus. Cinq actrices pour trois personnages, sainte Trinité de l’humain désépérement vulnérable, face à deux êtres mutants (il suffit d’en observer le physique, la gestuelle et le langage primaire), produits et émanations d’un monde en décomposition : la lutte s’engage et se poursuit au-travers du rêve/cauchemar, du récit dans le récit du récit, d’un point de vue face à l’autre (parfois ceux-là mêmes d’un seul personnage), d’une incarnation physique à l’autre (d’une actrice, l’une jeune, à l’autre, son double adulte ; d’une même actrice, vivante, morte puis rêvée). Et oui, c’est admirable de voir à quel point Pascal Laugier a su donner à ses cinq actrices ces traits et attitudes qui distinguent ces multiples tiroirs du récit. Alors oui, j’ai aimé Ghostland en salle – et j’ai hâte de le revoir. Si je n’ai pas la prétention de convaincre les personnes qui n’ont pas aimé ce film de le revoir, j’espère avoir encouragé ceux qui ne l’ont pas vu de se laisser séduire – cette « contrée de fantômes » mérite que l’on y passe un petit moment, quitte, comme moi, à y laisser un peu de soi au passage.
Le très haut du panier du cinéma français de genre!
J’irai même plus loin, en disant que le film est bien supérieur à bon nombre de productions US bien merdiques!
Très belle réussite que ce film du brillant Pascal Laugier!
D’accord avec Greg… Cette obsession de Laugier pour la maltraitance féminine devient franchement dérangeante, d’autant plus que plus sa filmo avance, moins les scénarios la justifient.
bluffant et esthetique, belle exercice de style avc tjrs une surprise chez laugier.
Ce film est une formidable proposition dans le cinéma « français » actuel qui, en cherchant à ne deplaire a personne, indiffére tout le monde.
Quand on crée un univers avec 4 Millions, qu’on a l’intelligence de le tourner en anglais pour qu’il puisse être diffusé plus largement, ça rattrape un peu le théâtre filmé à 15 Millions d’euros avec 4 acteurs et 3 décors…
super film
Bon ben moi j’ai mis un casque audio et j’ai sursauté plusieurs fois…. je trouve cela mieux qu au cinéma car on se sent bien plus captivé. Mylène n’est que très peu présente finalement. Les actrices principales m ont bluffé. L histoire est très glauque. De temps en temps pourquoi pas. Je ne le reverrai pas une seconde fois mais il m’a plu. Pour un film français !
@的时候水电费水电费水电费水电费是的 « seule l’actrice principale ne s’en sort pas trop mal »…vraiment ? En réalité elles sont toutes excellentes, y compris Mylène Farmer (star de la musique pop et non pas de la « chanson française « , terme fourre-tout ). Et à la fin du film on devine très bien que la fan de Lovecraft va pouvoir surmonter son traumatisme grâce à l’écriture.
Magnifique film ghostland j’adore et mylene y joue remarquablement je conseil fortement le film
J’ai acheté le DVD et je ne suis pas vraiment d’accord avec cette critique un peu trop facile. Le film a bénéficié de 4 millions d’euros de budget ce qui est petit et le résultat en est bluffant ! Ce genre en France est unique ! Un film simple, super bien construit et au scénario original font de ce film une vraie réussite ! Il a quand même eut 3 prix dont le prestigieux prix jury GERARDMER !