En 1998 sortait Sexe Intentions (Cruel Intentions en version originale), un drame adolescent sulfureux perché dans le kitsch de l’Upper East Side New Yorkais, avec Sarah Michelle Gellar, Ryan Phillippe, Reese Witherspoon et Selma Blair.
En tirant son inspiration des Liaisons Dangereuses, et avec pour têtes d’affiche Sarah Michelle Gellar, Ryan Phillippe, Reese Witherspoon et Selma Blair, Sexe Intentions est facilement devenu culte. Plus de vingt ans après, ce classique de la génération Y continue de fasciner, rendant plus que jamais visibles les effets du temps sur les questions de genres, de sexualités, de rapports de classes ou sur les problématiques sociales.
Petit mémo pour ne pas oublier
XO XO, GOSSIP GIRL
En 1998, le thème du drame adolescent, de ses passions fiévreuses exacerbées par l’éveil chaotique à la liberté et par le bouillonnement hormonal de la jeunesse était loin d’être inconnu des écrans de cinéma. De La Fièvre dans le sang à Un amour infini, en passant par Le Cercle des poètes disparus, le genre avait d’ailleurs déjà été exploré par bien des facettes.
Et pourtant, les années 90 ont réussi à le renouveler en se nourrissant d’autres horizons pour augmenter ses possibilités, allant quasi naturellement puiser du côté des thrillers érotiques pour ouvrir plus encore les problématiques liées à cet âge de construction l’identité. Sexcrimes (1998 également) est certainement l’un des meilleurs exemples du triller adolescent poisseux et moderne, pour autant, le long-métrage avec Denise Richards et Neve Campbell est loin d’être le seul à avoir traversé les époques.
Sans crime, mettant en scène des personnages tout aussi portés sur la manipulation et les intrigues, imputant à la sexualité et au charnel un pouvoir bien plus destructeur, le drame adolescent Sexe Intentions, est toujours aussi culte aujourd’hui. Peut-être parce que son casting réunissait de jeunes actrices et acteurs adolescents en pleine ascension, comme Sarah Michelle Gellar, Ryan Phillipe ou encore Reese Witherspoon. Certainement aussi grâce à un certain baiser lesbien échangé entre l’actrice de Buffy contre les vampires et Selma Blair.
Le fait que Sexe Intentions soit une réécriture adolescente, contemporaine et New-Yorkaise de la conspiration libertine de la Marquise de Merteuil et du Vicomte de Valmont des Liaisons Dangereuses ne peut non plus être totalement étranger au succès du métrage. Roger Vadim (Les Liaisons dangereuses, 1959), Stephen Frears (Les Liaisons dangereuses, 1988), Milos Forman (Valmont, 1989) s’étaient déjà prêtés au jeu de l’adaptation, mais aucun n’était allé explorer les standards attendus des hommes et des femmes par le prisme de l’adolescence.
Et c’est là l’une des plus grandes forces de Sexe Intentions, dans la dissonance entre les protagonistes et leurs comportements les uns envers les autres, leurs évolutions dans l’espace et les décors… À tout instant, le film de Roger Kumble se moque de son public, tente de bousculer ses préjugés en le mettant face à ses propres attentes, et surtout aux limites de ces dernières.
Madame la Marquise et Monsieur le Vicomte
PAUVRE PETIT GARÇON RICHE
Plus de vingt ans après la sortie du film, nul doute que le portrait tiré de la société pourrait en heurter plus d’un. À commencer par le voile d’idiotie et de naïveté délicatement tartiné sur le minois des femmes.
Certes il est presque impossible de ne pas rire devant la caricature de que représente Cecile, quand elle fait le poirier, en mini-jupe, toute culotte dehors et jambes écartées devant l’homme dont elle est amoureuse, par exemple. Pour autant, certaines autres scènes s’attaquant directement à des questions de consentement, alors moins présentes dans les débats publics, paraissent beaucoup plus problématiques aujourd’hui. Naturellement, un certain malaise s’installe lors de la première scène intime entre la jeune femme et Sebastian : il s’agit d’un viol. Aujourd’hui, ce dernier est d’autant plus accentué lorsque Cecile conte cette nuit-là à Kathryn et que se mêlent alors les concepts de jouissance et de consentement.
Il serait difficile de qualifier ce film de révolutionnaire ou de résolument moderne, notamment à cause de son final, qui montre quand même qu’après avoir manipulé, usé et jeté les femmes, les hommes ont toujours le monopole de l’impunité. À la fin, Sebastian meurt, perçu comme un ange laissant derrière lui un doux souvenir, quand Kathryn est jugée par tous comme une déviante sexuelle qu’il faut punir…
Cruchotte pré-sexe, bien protégée par sa maman
Mais une œuvre est forcément traversée par les codes sociaux de son époque, a fortiori les œuvres telles que les teen-movies, qui interrogent l’identité, sa construction au sein de la société ou encore le passage à l’âge adulte. Évidemment donc que Sexe Intentions est imprégné des valeurs patriarcales sans réussir à s’en moquer ou se questionner sur tous ses aspects. Évidemment que le patriarcat tout puissant paraît d’autant plus reposer sur des fondations gangrénées, aussi bien aujourd’hui qu’à l’époque.
Mais les biais par lesquels le film s’attaque au racisme, à l’homosexualité ou aux genres sont-ils vraiment aussi datés ? Les hommes noirs directement pointés comme « inférieurs », les hommes en général n’ayant pas le droit d’avoir de sentiments ou de les exprimer, les vierges perçues comme pures tout en étant « accusées » d’être lesbiennes, l’homosexualité masculine utilisée pour faire chanter… Toutes ces stigmatisations sont certes forcées, caricaturales même dans le métrage, mais elles ne sont pas complètement inactuelles, même 23 ans plus tard, malheureusement.
Tentative de repousser les clichés
LE SEXE A SES RAISONS
Sexe Intentions va bien au-delà de la simple conspiration adolescente revancharde (celle déroulée en détail dans Gossip Girl par exemple), ou de l’envie de sexe d’un jeune enclin à s’adonner à ses passions, quoi qu’il en coûte aux autres. Les relations sexuelles ne sont qu’une excuse pour que des protagonistes adolescents, donc à l’âge où la construction personnelle se joue, questionnent la nature humaine.
Dès la première séquence, mettant en scène un Sebastian Valmont (Ryan Phillippe) tout en mensonge et en sentiments hypocrites, le film lance toutes les problématiques qu’il abordera au fur et à mesure. L’amour, la sexualité, le patriarcat, la domination de l’homme sur la femme, l’objectivation de cette dernière, l’absence des parents, la société de classe… tout est déjà là, plus ou moins en filigrane, pour tirer un portrait cruel et tortueux de cette fameuse nature humaine.
On fait un petit point sur nos réputations ?
La suite du métrage est logique. À mesure que Sebastian et Kathryn (Sarah Michelle Gellar) tissent leur toile autour des deux vierges Cecile Caldwell (Selma Blair) et Annette Hargrove (Reese Witherspoon), les jeux de pouvoir et de manipulation se referment autour d’eux. Le but ultime des coucheries programmées de Sebastian n’est jamais d’y trouver un quelconque plaisir physique, ce n’est d’ailleurs même pas une variable dans le système de pensées du duo principal. Et lorsque rarement il semble retirer une certaine satisfaction physique, il lui préfère toujours la frustration. La jouissance n’est jamais un sujet, non. L’important, c’est d’entacher la « réputation » de l’autre, de le faire souffrir et de l’écrabouiller pour mieux pouvoir briller.
Kathryn explique très bien les raisons de ses agissements, dans un court monologue en milieu de métrage : dans cette société, le sexe n’est qu’un moyen de contrôle. Une porte d’entrée vers la popularité et la reconnaissance sociale pour les hommes dès lors qu’ils enchaînent les conquêtes, un ticket menant tout droit vers la désapprobation, le jugement et le label « pute » à jamais marqué au fer rouge sur le front de celles qui oseraient s’adonner aux plaisirs charnels.
Cecile perd progressivement le respect de ses pairs, passant de jeune ingénue naïve à adolescente sans intérêt, Annette perd sa « pureté » dès lors qu’elle couche avec Sebastian et use des mêmes détours conspirationnistes pour se venger de Kathryn. Cette dernière aurait certainement juste voulu vivre sa vie sans que ses choix soient examinés et jugés, mais se voit obligée de cacher ses agissements. Dès lors, que ce soient l’homme ou la femme, personne n’est plus un ange, les rôles de bourreau et victime s’emmêlent et une question demeure : qu’est-ce qui pousse l’humanité à faire le mal ?
LIAISONS DANGEREUSES
Par le biais de son récit sulfureux et épistolaire, le projet de Pierre Choderlos de Laclos dans son roman publié en 1782 était d’interroger les assignations sociales attendues des hommes et des femmes dans la société. Voir l’inactualité de certains propos de Sexe Intentions, sorti en 1998, n’a donc rien d’étonnant (c’est même plutôt rassurant).
Quand bien même certains trouveraient aujourd’hui Sexe Intentions profondément raciste, sexiste, homophobe ou simplement maladroit, le regard qu’il nous est possible de poser dessus aujourd’hui est infiniment plus critique que celui d’alors.
Y‘a comme du chantage dans l’air
Qu’il ait encaissé près de 76 millions de dollars en 1998, pour seulement 11 millions d’investissement hors marketing, en dit beaucoup sur la génération qu’il a bercée. D’autant que son succès ne s’est pas arrêté. Il a d’abord engendré deux suites, la première, Sexe intentions 2, sortie en 2000 aux États-Unis, sorte de prequel avec une Amy Adams presque inconnue au bataillon, et la deuxième, Sexe intentions 3, spin-off relié aux deux premiers volets par la cousine de Kathryn, arrivé sur les écrans en 2004.
Et l’amour du public pour ce film a longtemps continué de rayonner. Notamment avec un projet de reboot en série abandonné en 2016 dans lequel Sarah Michelle Gellar aurait repris son rôle de riche intrigante. Mais aussi avec la comédie musicale, d’abord lancée à Los Angeles en 2015, avant de rejoindre les planches d’Off-Brodway en 2017.
À la revoyure, impossible de ne pas voir le chemin parcouru par la société au cours de ces deux dernières décennies. Impossible aussi de ne pas se rendre compte que, déjà à l’époque, une partie de ces dérives patriarcales étaient pointées du doigt, pour infuser d’autres idéaux dans les imaginaires collectifs.
@Numberz je plussoie pour Fear. Pas le film du siècle mais très sympa pour l’époque. Faudrait que le revoit pour voir comme ça a vieilli.
« tu peux me la mettre où tu veux… »
Rembobinage
« tu peux me la mettre où tu veux… »
Rembobinage
« tu peux me la mettre où tu veux… »
Bon j’ai déjà fait mon mea culpa sur la scène du motel dans s*x crimes, je vais pas le faire 36x hein…
Sinon, coffee black and egg white/bittersweet symphony, Reese whitherspoon/SMG, mouchoir/kleenex…
Un petit film super sympa d’ailleurs que j’aime beaucoup, avec Reese Witherspoon et un jeune Marky Mark, c’est Fear. Bonne bo, bon petit thriller sur sa dernière demi heure, et un soupçon d’experts pas ami-ami. Je recommande. A moins que ça ait vieilli. Sauf Wild Horses. Mais je suis un peu pervers.
des bons films pour l’époque….aujourd’hui quand on re regarde on se dit qu’on a bien pris un coup de maturité et de vieux. du coup ça passe moins bien, mais ça me rappel les années collèges.
@Tuk
« It’s beyond my control »
Quel film en effet et la révélation Malkovich.
La version Disney de s*x Crimes (film qui n’a pas non plus le mot « s*x » dans son titre original c’était vraiment la mode). Ca se regarde, ça permet de replonger dans une atmosphère 90’s pour les nostalgiques mais ça va pas plus loin. D’autre adaptations sont bien plus réussies. Ce film a juste intrigué les ados de l’époque par sa bande annonce qui suggérait une Sarah Michell Gellar – le fantasme de toute une génération – en peste nympho manipulatrice et ça faisait effectivement le job avec une petite scène de baiser entre fille qui aujourd’hui aurait laissé tout le monde indifférent. Pour le reste c’est juste un film vitrine pour les acteurs jeunes et beaux à la mode de l’époque.
Le film est une bomme adaptation à la sauce contemporaine, j’avais été surpris !
Pour ce qui est des moults adaptations de ce sublime roman qu’est « Les liaisons dangereuse » de Choderlos de Laclos (que je conseil vivement), la meilleur adaptation reste à mes yeux celle de Stephen Frears avec son casting de dingue (Malkovich, Pfeiffer, Uma Thurman K. Reeves, et l’exellente Glenn Close…)
Entre s*x Crimes et s*x Intentions, mon intention va vers le 1er. Sinon, je retiens bien la BO du film
Le détail amusant pour s*x Crimes et Sexe Intentions, c’est qu’il n’y a pas le mot « s*x » dans le titre original (respectivement Wild Things et Cruel Intentions). Il n’a été ajouté au titre français que pour attirer les adolescents libidineux. En fait, ce sont deux films avec un très bon scénario, de bons acteurs, et une BO magnifique pour Sexe Intentions (j’avais acheté le CD en sortant du cinéma).
Tout comme SeXe crime, je n’ai pas vu ce film.
Vos 2 critiques me donnent aujourd’hui l’envie de les regarder. Avec le regard et recul d’aujourd’hui et ce côté « vintage » ils me semblent être peut être plus intéressant qu’à l’epoque. Ce genre de film a complètement disparu, dont les thèmes ont été repris par moult série il me semble.