La mort de Jean-Paul Belmondo a rappellé beaucoup de souvenirs, parmi lesquels Le Magnifique, réalisé par Philippe de Broca.
Après ses deux premières missions, OSS 117 version Jean Dujardin a fait son grand retour dans Alerte rouge en Afrique noire, ainsi que les pluies de références qui traversent la franchise. Et avant Nicolas Bedos, c’est un grand expert de la parodie et de la reprise en tout genre, Michel Hazanavicius, réalisateur des deux premiers opus, qui a pris beaucoup de plaisir à revisiter ou à pasticher des œuvres antérieures.
La parodie intrinsèque d’Hubert Bonisseur de La Bath issue des romans de gares écrits par Jean Bruce en a fait le succès du Le Caire, nid d’espions, mais également Rio ne répond. Ce deuxième volet semblait, quant à lui, aller encore plus loin dans les références cinématographiques, mais également dans le gag pur. Les nombreux split-screen plongent tout de suite le spectateur à la fin des années 60 et rappelle la virtuosité de L’affaire Thomas Crown. Toutefois, le mélange du cinéma d’espionnage avec l’humour d’OSS 117 rappelle plus précisément les films d’aventures à la française popularisés par Philippe de Broca.
« J’aime être comparé à Steve McQueen. »
D’abord assistant réalisateur pour Henri Decoin, Claude Chabrol ou François Truffaut, Philippe De Broca a, par la suite, influencé plusieurs générations de réalisateurs (dont Steven Spielberg) grâce à des productions aussi stimulantes que virtuoses. Comparables aux bandes-dessinées de Tintin, sources d’inspirations évidentes du cinéaste, Les tribulations d’un chinois en Chine et L’Homme de Rio performent par leur audace visuelle et leur rythme effréné où l’action ne s’arrête jamais. Deux longs-métrages qui ont fourni à Michel Hazanavicius des bases solides pour faire du grand spectacle.
Cependant, au détour d’une séquence de piscine dans Rio ne répond plus, le réalisateur oscarisé pour The Artist a rendu un bel hommage au long-métrage Le Magnifique. Même si les œuvres précédentes de Broca ont eu un impact créatif sur les OSS 117, il est assez pertinent de revenir sur Le Magnifique comme ancêtre des OSS 117 moderne. En plus de cela, la comparaison concernant l’attitude de Bob Saint Clar incarné par Jean-Paul Belmondo et Hubert Bonnisseur de la Bath version Jean Dujardin semble être toute trouvée, tant et si bien qu’ils s’affirment dans leur comportement comme deux parfaites copies. Retour donc sur une des grosses influences des OSS 117.
Il va falloir revoir les chaussettes Jean-Paul
Une carrière de DJ ou héros de roman ?
Alors que les paysages paradisiaques et la gouaille d’un espion français campé par Jean-Paul Belmondo nous entraînent dans une bonbonnière d’action et de ridicule sur une plage d’Acapulco, une femme de ménage passe l’aspirateur à contre sens d’une fusillade jusqu’à ouvrir une porte collée au sable. À la suite de l’absurdité de cette entrée en matière, on y découvre François Merlin, l’auteur des romans de gare mettant en lumière les aventures du beau et grand séducteur Bob Saint-Clar.
Une cigarette, un appartement miteux et la pluie parisienne cassent l’esprit des premières séquences éblouissantes d’absurdité. Ici, François Merlin, le double opposé de Saint-Clar, vit les difficultés du quotidien et met sur le papier les frustrations de son existence. Philippe de Broca déroge à la règle et à l’esprit roman de gare des premières scènes, en instaurant une immense mise en abyme. Dans un premier temps, nous nous retrouvons perturbés par cette ironie manifeste, mais celle-ci rend compte de la complexité du film sur la figure du héros.
Tout d’abord, la puissance comique qu’entraîne cette mise en abyme est assez jouissive puisque François Merlin s’aide des événements au jour le jour afin de faire avancer le roman qu’il écrit. L’incrustation de sa femme de ménage en est un parfait exemple, tout comme le plombier et l’électricien dont Merlin se venge dans son roman en les réduisant en bouillie.
Tout le monde y passe, y compris son éditeur (matérialisé en Karpov, ennemi juré du héros) et sa voisine (Jacqueline Bisset), muse et compagne de mission de Bob Saint-Clar. Ces deux personnages auront une première influence sur la vie de François Merlin (professionelle ou relationelle), avant de voir leur destin changer dans le récit littéraire. Néanmoins, il se joue un questionnement plus profond entre Bob Saint-Clar et François Merlin : la quête d’identité.
Le roman de gare, genre littéraire populaire, mais déprécié par les experts, est une porte ouverte vers les fantasmes les plus fous et Bob Saint-Clar en est un parfait exemple. Comme l’explique François Merlin, il est « en représentation ». Une caricature d’un macho sur de lui et que rien ne peut arrêter, même pas une armada de militaire sur-armée.
Jalousé par son François Merlin, l’auteur frustré peut pourtant, d’un instant à l’autre, porter en triomphe son personnage ou le ridiculiser complètement. Les craintes de la page blanche et les coups de sang de Merlin, à cause d’un manque de temps ou de difficultés amoureuses, vont jusqu’à entraîner au milieu du film une mort longue et atroce à ce pauvre Bob Saint-Clar.
« Bob Saint-Clar devient DJ et se laisse pousser la tignasse… »
Au service secret de l’humour
Si le rythme déjanté de L’homme de Rio aura grandement contribué à l’aisance narrative et visuelle de Rio ne répond plus, le grand fourre-tout et l’extravagance des gags du Magnifique ont eu une incidence considérable sur le deuxième OSS 117. En effet, son burlesque si singulier conduit le spectateur dans à peu près toutes les directions, allant jusqu’au fou-rire le plus régressif.
Et Jean-Paul Belmondo n’y est pas pour rien puisque l’acteur français parvient à animer chaque fois une grande excitation. Le dénommé bebel est véritablement à son apogée et se trouve être à l’opposé de l’acteur qu’il était à ses débuts, plus prompt à accepter des rôles dont l’épaisseur psychologique faisait figure d’absolu (À bout de souffle ou Stavisky, par exemple). Ici, l’acteur s’immisce dans une dynamique proche du comique de bas-étage et ce second degré permanent l’aide à exprimer tous ses talents.
« On tire sur tout ce qui bouge Tatiana ! »
Toutefois, les ressources comiques du long-métrage du cinéaste français épaulent dans la diversification comique de Jean-Paul Belmondo, comme lorsque Saint-Clar récite une phrase poétique dont il est l’auteur à Tatiana. Le timbre de voix et la chute procurent un cocktail fort étrange et fournissent l’impression d’être plongé dans une pastille sans réel enjeu narratif. Ce que Broca signifie d’ailleurs en débutant sa séquence par une coupe sèche dans le montage. Car oui, le cinéaste français ne tergiverse pas et met en évidence l’inattendu, en n’incluant presque aucun raccord transitionnel (fondu enchaîné ou un volet temporel) dans son montage pour aider le spectateur à se fondre dans l’aventure de Bob Saint-Clar.
En soi, les aspects comiques les plus intéressants ne sont même pas les excès de violence ou de séduction de Bob Saint-Clar, mais plutôt les passages où François Merlin se moque clairement de lui en le mettant dans une position inconfortable. Déjà lorsque la lettre R de la machine à écrire de Merlin ne fonctionne plus, Bob Saint-Clar doit s’exprimer sans la 18e lettre de l’alphabet, le rendant amplement ridicule. Cependant, François Merlin ira beaucoup plus loin en décortiquant très précisément la sur-masculinité de son sous James Bond.
« Une dernière danse ma gâtée ? »
Et plus particulièrement lorsque ce dernier ne satisfait pas les désirs de sa partenaire et que le nœud de son kimono se coince, le faisant trébucher à plusieurs reprises. Merlin continuera dans cette voie, en mettant en exergue un rapprochement entre Saint-Clar et Karpov, au détriment de Tatiana, triste de ne plus être la lumière éclatante de la vie de son partenaire. Pour mieux démontrer le cheminement de ce personnage, Merlin fera dire à son héros : “Je suis impuissant et je vous emmerde”. De quoi voir en Bob Saint-Clar une simple image fantasmée et irréaliste d’un homme viril et sûr de lui.
« J’aime que l’on me regarde. »
Belmondo vs Dujardin, même combat
En pastichant la figure du héros de roman de gare, les OSS 117 visent la même dynamique en s’attardant sur le décalage entre Hubert et la modernité de son époque. Que ce soit au niveau de la place des femmes ou de la fin de la période coloniale, Hubert Bonnisseur de la Bath est sans cesse ramené à l’incompréhension qu’il véhicule face à n’importe quelle évolution.
Plus largement, OSS 117 agit en miroir de Bob Saint-Clar et c’est ce que la séquence de la piscine dicte en elle-même. Dans Le Magnifique, Bob Saint Clar passe devant un groupe féminin allongé sur des transats et alors qu’il s’allonge auprès de Tatiana et l’embrasse, celle-ci crache une dent du héros remplie de cyanure et empoissonne les nageurs de la piscine. Quant à Bonnisseur de la Bath, même schéma, sauf que cette fois-ci tente de plonger mais se trouve, comme Scottie (James Stewart) dans Sueurs froides, hanté par la peur du vide.
Ces têtons que l’on a envie de mordiller
Si la fascination pour le corps des deux interprètes est le noeud commun des deux séquences, cette réciprocité entre les deux films traduit une subtilité supplémentaire quand on se penche sur les deux interprètes. Régulièrement, la comparaison entre Jean-Paul Belmondo et Jean Dujardin a été mise en avant. Et quand on s’intéresse à leur goût commun pour la phrase qui tue, tout comme leur corps qui sont régulièrement des objets de regards ou bien lorsqu’ils doivent mettre leur corps à exécution dans des scènes d’actions, il y a en effet un jeu de miroir évident.
C’est pour tous ces éléments que la familiarité entre Le Magnifique et les OSS 117 se fondent. Et c’est sans nul doute une des raisons qui a poussé le comédien oscarisé à se lancer dans l’aventure en 2006, lui qui ne rate jamais une occasion de citer Le Magnifique dans la short list de ses plus grands chocs cinématographiques.
@Dirty Harry
Très beau message.
si vous voulez le voir avoir une franche rigolade avec coluche et boujenah,
se moquer de lui même avec son film hold up qui se prenait un four à l’époque…
cette séquence me fait toujours rire et surtout voir deux icones de mon enfance
https://www.youtube.com/watch?v=e94UqP7f8pA&t=6s
De la tradition des comédiens casse-cou (Buster Keaton, Jackie Chan, Tom Cruise…) il inspirait un panache et une énergie toute française avec un esprit de « cour de récréation » irrésistible (comme son sourire). Ça va commencer a manquer des profils comme ça : charisme, bonne humeur contagieuse, aimant le risque, parfois cabot mais gouailleur aux mots gourmands…une star tellement exportable qu’elle influença de la BD (Blueberry) aux mangas (Cobra). Une incarnation d’éternel masculin (appelé « stéréotype de genre » aujourd’hui par nos universitaires aux fesses plates) qui ferait hurler les déconstructeurs tellement ce type était bien dans sa peau de « vrai mec » bien viril.
Après Notre Dame, encore un monument qui s’effondre : il mouillait le maillot avec des acrobaties étonnantes, boxait (dans la vraie vie aussi) les malotrus, t’apprenais à dire bonjour et savait dompter un lion du regard… « Le croissant c’est pour mon ami ! »
Peu de gens savent qu’il était aussi producteur, pas seulement de ses films mais aussi ceux des autres. Peu de médias en parlent. Il a ainsi produit le 1er film de Claire Denis Chocolat, Hors-la-loi où des ados fuguent avec Clovis Cornillac dans son 1er rôle, et Tom et Lola un conte onirique sur des enfants-bulles.
Peur sur la ville…le polar a la française qui ce mettait au niveau des films ricains de l’époque ou du moins qui n’avait pas a rougir…cette claque la 1ere fois que je l’ai vu…
j’ai eu le courage d’aller le saluer alors qu’il prenait un café, seul et complètement incognito.
Très gentil et d’une grande sympathie.
Un grand monsieur.
Le magnifique est un petit bijoux….
Apres triste journée, ùùais de là à en avoir un choc. Ce n »est pas comme s’il avait 20 ans. Cependant cela reste et restera l’un des plus grands acteurs francais et c’est dur de ne pas lui rendre hommage. Merci Bebel !
Repose En Paix (REP en francais pour l’occasion)
Il était passé jouer sa dernière pièce dans le théâtre où je travaille, et sans surprise il était sympa, simple, souriant. Repose en paix, héros de mon enfance.
Ça fout un énorme coup de blues là. le choc. Il était devenu mon acteur français préféré toutes époques confondu, une icône, un symbole, découvert à la TV puis suivit pour certains films au ciné mais pas tous. Je me souviens du Professionnel au ciné, j’étais en colère à la fin, secoué par sa mort injuste et je suis parti direct acheter la k7 pour revivre le film (merci Morricone et son presque unique thème). Dernier film vu de lui au ciné L’As des As. Fan de l’acteur, de l’homme mais pas de tous ses films même si lui était toujours au top dedans.
Belmondo est parti, difficile d’y croire, les légendes, les lumières ne meurent jamais.
Reste tous ses films et son éternel sourire qui fait un bien fou gravé à jamais tout jamais sur la pellicule. So long Bébél, so long Bob.
pour moi qui entrait à peine au college en 1989, un acteur comme Belmondo était dejà has been, c’est à dire que son meilleur etait derrieer lui, il etait dejà quainquegenaire debut 80
je me souviens d’un enormre ratage avec un film tourné avec Delon » une chance sur deux » de patrice leconte, sorti vers 98, en mêm temps que titanic de Cameron,
le film s’etait mechamment gaufré, le budget avait été over the top pour un film français, une cata financiere, c’était la dernier fois que Delon et Belmondo faisait un Gros film en tête d’affiche,
l’idéé de reunie ces deux ex gloires en 1998 autour de Vanessa Paradia aurait pu être bonne, mais le film n’est pas bon, il n’est pas si mauvais pour autant, çà me rappelle un autre mega flop avec Stallone et Schwarzy avec Evadé, reunis trop tard eux aussi