Hypnotic avec Ben Affleck est déjà l’un des plus gros bides de 2023

Hypnotic, un film d’action réalisé par Robert Rodriguez avec Ben Affleck en tête d’affiche, arrive bientôt sur les écrans français. Ce thriller ambitieux que la critique américaine compare à Inception n’a pas encore fait son entrée sur le territoire qu’il est déjà un échec cuisant. Pourquoi ?

A part l’exceptionnel phénomène Barbenheimer, 2023 a été, jusqu’ici, une année marquée par de terribles flops au cinéma. Beaucoup de blockbusters ont déçu au box-office, comme Ant-Man et la Guêpe: Quantumania, Fast X ou Mission Impossible : Dead Reckoning, tandis que d’autres se sont avérés être carrément des échecs, à l’instar de Donjons et Dragons : l’Honneur des voleurs, Shazam! La Rage des Dieux et The Flash.

Au milieu de ces superproductions qui prennent toutes la lumière, des films plus modestes et moins programmés sont voués à se crasher spectaculairement. C’est le cas du nouveau film de Robert Rodriguez avec Ben Affleck : l’étrange Hypnotic. Alors que ce thriller psychologique est vendu comme un croisement entre Inception et les films d’Hitchcock, ni la critique ni le public ne sont au rendez-vous, et le désastre financier est déjà confirmé. Explications.

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Planète Covid

Rodriguez travaille sur Hypnotic depuis si longtemps que d’aucuns seraient en droit de se demander s’il s’agit de son projet le plus personnel et le plus important. En 2021, il révèle à Collider que le projet germait déjà dans son esprit avant même que Sin City ne voie le jour :

“C’est une de mes histoires préférées. J’ai commencé à l’écrire en 2002, donc c’est l’une de celles que je veux faire depuis le plus longtemps. Je suis surexcité à l’idée d’enfin la réaliser”.

Le film que le réalisateur décrit lui-même comme “un Hitchcock sous stéroïdes” aura mis des années (des décennies, même) à pouvoir être financé comme le film ambitieux, mais indépendant dont rêvait Rodriguez.

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En 2018, enfin, Hypnotic trouve une oreille attentive. Studio 8, mini-succursale de la Warner, prend le projet sous son aile, et s’allie avec le distributeur Solstice Studios à la fin 2019 pour consolider le financement du film. Cette année-là, Ben Affleck rejoint le projet en tête d’affiche, et le fantasme de Rodriguez semble prendre forme. Mais c’était sans compter sur la crise du Covid qui était sur le point de sévir sur l’industrie du cinéma.

C’est d’abord le tournage qui accuse le coup. En août 2021, Rodriguez explique auprès de Collider : “On devait tourner en avril dernier, mais le Covid a repoussé le tournage de six mois, puis la recrudescence de l’épidémie l’a de nouveau repoussé par la suite. Là, si tout se passe bien, on tourne d’ici six semaines. On est dans le dur de la prépa, donc ça devrait pouvoir se faire”.

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C’est dans la (trop petite) boîte

Et effectivement, le tournage est lancé sans encombre. Sauf que c’est finalement le distributeur qui est contraint de quitter le navire. Comme beaucoup d’autres boîtes du même acabit, Solstice Studios est trop fragile pour faire face à la pandémie et met la clef sous la porte en octobre 2021. Mais le projet ne peut pas se résoudre à une sortie streaming et doit absolument trouver un distributeur local, car la sortie du film en salles est une condition sine qua non des contrats négociés avec les distributeurs internationaux.

C’est donc la modeste Ketchup Entertainment, petite structure n’ayant jamais accompagné de productions de cette ampleur, qui se lance dans l’aventure et devient distributeur américain. Le film est bouclé dans la souffrance pour les producteurs, qui poursuivent en justice la compagnie d’assurance du film qu’ils accusent de ne pas les avoir assez couverts face à la pandémie, et qui tremblent de voir Rodriguez de plus en plus occupé par le futur Spy Kids. Néanmoins, le film est bouclé, avec un budget total de 65 millions d’euros (Alita : Battle Angel en avait coûté entre 150 et 200), mais ce n’est pas pour autant que les ennuis s’arrêtent.

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Tout d’abord, le film fait peu de bruit, et sa promotion est pour le moins discrète, si ce n’est inexistante. Peut-être parce que les investisseurs ont été refroidis par les galères de production et que le film n’avait plus les moyens de se vendre ? Le 12 mai 2023, il est enfin projeté sur les écrans américains, mais les chiffres sont sans appel. Avec seulement 2,4 millions de dollars et une 6e place au box-office lors de son démarrage aux États-Unis, la course du film ne s’est pas améliorée avec le temps, et il a terminé son exploitation à domicile avec un total de seulement 4,5 millions de dollars.

À l’heure qu’il est, et même si la France n’est pas encore entrée dans l’arène, ses recettes mondiales s’élèvent à un maigre 8,7 millions de dollars. Sur un budget de 65 millions, il n’y a aucune chance pour que les entrées françaises sauvent la donne, surtout avec aussi peu de marketing. À titre de comparaison, un film d’une ambition comparable comme Taken avait, pour un budget de 25 millions, totalisé 145 millions rien qu’aux États-Unis, et 227 millions à l’échelle mondiale. Et les chiffres d’Hypnotic restent encore bien plus éloignés de ceux d’Inception à qui son style est comparé (dans une moindre mesure) : le film de Nolan avait amassé 837 millions à travers la planète pour un budget de 160.

Ben Affligé

bon baisers de russie

Le deuxième marché du film après son pays d’origine est la Russie, où le film a atteint quasiment 2 millions, mais aucun autre pays pour le moment n’a dépassé les 650 000 dollars. Autrement dit, la production n’a pas pu compter sur l’étranger ou misé dessus. Aussi, il y a fort à parier pour que la sortie française se fasse dans la discrétion la plus totale.

Le film bénéficie malgré tout d’une projection en avant-première lors du Festival de Cannes 2023 : dernier film programmé avant la clôture, Hypnotic a fait l’objet d’une séance de minuit. Sans surprise, les quelques retours des journalistes présents y étaient mitigés, et n’ont pas fait monter l’intérêt du public français pour le film.

Quand la caisse est vide

Il faut dire qu’à part l’argument tape-à-l’œil de la comparaison avec Hitchcock et Inception, le film a peu d’arguments pour séduire le marché hexagonal au regard de l’accueil des derniers films de Rodriguez et de Ben Affleck. Après Alita : Battle Angel, Red 11 n’avait pas connu de sortie en France et C’est Nous les Héros avait directement investi Netflix.

Du côté d’Affleck, Eaux Profonde et Air ont été cantonnés à la plateforme concurrente Amazon Prime Video, et Clerks III n’a bénéficié d’aucune sortie française. Aucun argument à l’horizon, donc, pour garantir un succès en salles. Et quand bien même le miracle aurait lieu, le projet rêvé de Robert Rodriguez est malheureusement condamné depuis longtemps, victime du Covid, de ses retombées et d’un accompagnement trop modeste par rapport à ses ambitions.