Le bon, la brute et le truand est ce soir à 22h40 sur France 3.
Duel au soleil, Rio Bravo, Impitoyable, Johnny Guitare, L’Homme de la plaine… Et s’il fallait n’en garder que 25 ?
Le jeu des classements est difficile, éprouvant et douloureux pour les cinéphiles. Mais il est également drôle, stimulant et irrésistible.
Écran Large a eu la folle et bête idée de trier les westerns, pour arriver à un top 25, numéroté du plus ancien au plus récent.
Beaucoup de grands films manquent à l’appel c’est certain, mais les vingt-cinq films choisis sont incontestablement parmi les meilleurs du genre (en tout cas pour nous, et c’est déjà ça), rappelant tous à leur manière à quel point le western reste majeur dans le septième art. (dossier mis à jour en novembre 2021)
Comment ça je ne suis pas dans tous les films de ce top 25 ?
CLASSEMENT WESTERNS DANS L’ORDRE CHRONOLOGIQUE
25. LA CHEVAUCHÉE FANTASTIQUE
Sortie 1939 – Durée : 1h37
De quoi ça parle : En 1885, les Indiens sont sur le sentier de la guerre avec, à leur tête, le célèbre Geronimo. Une diligence abritant un groupe de civils est prête à partir d’Arizona, pour se réfugier dans la ville de Lordsburg, mais doit pour cela passer par une route dangereuse. Le voyage se déroule alors dans une atmosphère de plus en plus tendue.
Pourquoi c’est génial : Western matriciel à plus d’un titre, à l’influence capitale pour bon nombre de cinéastes (Welles ayant avoué l’avoir vu 40 fois à l’époque du tournage de Citizen Kane pour comprendre comment raconter une histoire au cinéma), La Chevauchée fantastique est le film qui a imposé mondialement le nom de John Ford. En s’inspirant d’une nouvelle de Guy de Maupassant (Boule de suif), le cinéaste offre à son western l’une des narrations les plus américaines qui soient : le road movie.
Avec une économie de mouvements de caméra qui nous fait rêver aujourd’hui, Ford parvient néanmoins à créer un dynamisme et une tension extrême au cours de cette poursuite spectaculaire entre une diligence et les Indiens. Huis clos le plus majestueux du monde (ah, ces plans grandioses de Monument Valley que le réalisateur sait et saura filmer comme personne…), La Chevauchée fantastique est à plus d’un titre, comme l’écrit si justement Jacques Lourcelles, « la quintessence du western classique ».
24. LA CHARGE FANTASTIQUE
Sortie 1941 – Durée : 2h20
De quoi ça parle : Élève médiocre de West Point, Custer se retrouve nommé général après une erreur d’administration durant la guerre de Sécession. Après la bataille sanglante d’Hanovre, un homme d’affaires avec des appuis politiques ravive les guerres indiennes et parvient à discréditer Custer, jusqu’au célèbre massacre de Little Big Horn.
Pourquoi c’est génial : Le réalisateur Raoul Walsh se fiche de la vérité historique du général George Armstrong Custer, figure légendaire de la cavalerie durant la Guerre de Sécession, puis dans les guerres indiennes du XIXe siècle. Ce qui l’intéresse, c’est sa vision du héros et ses valeurs morales, avec la peinture d’un homme léger, extravagant et plus intéressé par la gloire que l’argent.
Première d’une longue collaboration entre le cinéaste et Errol Flynn (qui se retrouveront notamment pour Gentleman Jim, Aventures en Birmanie et Le Saboteur sans gloire), La charge fantastique est un western épique, tragique et politique, qui donne toute la mesure du génie de son auteur. C’est aussi la dernière et probablement la plus belle collaboration du couple mythique de la Warner, formé par Olivia de Havilland et Errol Flynn – quelle scène d’adieu. Car c’est aussi une sublime et bouleversante histoire d’amour, qui a certainement contribué à faire du film un immense succès à l’époque.
23. DUEL AU SOLEIL
Sortie 1946 – Durée : 2h18
« Je suis très bien là oui oui »
De quoi ça parle : Scott Chavez est condamné à la pendaison pour avoir assassiné sa femme indienne et son amant. Avant de mourir, il confie sa fille à une ancienne amie installée dans un ranch texan avec son mari, un sénateur infirme, et ses deux fils. Son accueil n’est pas des plus chaleureux de la part du père de famille, à cause de son métissage, bien qu’elle plaise immédiatement aux deux frères.
Pourquoi c’est génial : Étonnant film, qui compte une pelletée de poids lourds en coulisses. Car si le film est officiellement signé King Vidor, les conflits entre le réalisateur et le producteur David O. Selznick ont mené à une production légèrement chaotique, où William Dieterle, Josef von Sternberg, Otto Brower, Sidney Franklin, William Cameron Menzies et Selznick lui-même ont pris part à l’œuvre. À l’écran, il y a Gregory Peck, Joseph Cotten, Jennifer Jones (nommée à l’Oscar de la meilleure actrice), ou encore Lillian Gish (nommée comme meilleur second rôle), et la voix d’Orson Welles en narrateur.
Adapté du roman de Niven Busch, Duel au soleil raconte l’histoire de deux frères, qui se disputent l’amour d’une femme. Arrivée dans un ranch au milieu du Texas suite à la pendaison de son père, qui avait tué sa mère, la jeune femme métisse indienne va tenter de résister aux avances des deux hommes. D’abord lancé sur une note dramatique, le film s’envole vite vers les cimes de la pure tragédie, un peu extrême. Les personnages rappellent la pièce la plus noire de Corneille, Rodogune, et le technicolor donne à ces luttes amoureuses quelque chose de spectaculaire. Duel au soleil a notamment marqué par son climax, encore aujourd’hui un aboutissement de la passion vénéneuse au cinéma.
22. LA RIVIÈRE ROUGE
Sortie 1948 – Durée : 2h13
De quoi ça parle : Un jeune homme, Matthew, s’oppose à son père adoptif, Tom, devenu trop tyrannique avec ses hommes lors du convoi exceptionnel d’un troupeau de dix mille bêtes qu’ils doivent vendre dans le Missouri. En route, Matthew abandonne Tom, qui jure de le retrouver et de se venger.
Pourquoi c’est génial : « Je ne savais pas que ce salopard savait jouer ! ». Voilà ce qu’aurait dit John Ford en découvrant John Wayne dans La Rivière rouge, où la star du western incarne un homme autoritaire, dont l’autorité est remise en question par son protégé, recueilli lorsqu’il était enfant.
Tourné en noir et blanc par Howard Hawks, qui le préférait au Technicolor, le film a connu quelques problèmes en post-production : Hawks a changé de monteur, a décidé de raccourcir et alléger la narration, puis a dû revenir sur le montage lorsque Howard Hughes l’a accusé d’avoir copié le climax de Le Banni (où Hawks avait travaillé comme co-réalisateur, non crédité). À noter également que Arthur Rosson, réalisateur de seconde équipe de La Rivière rouge, est crédité officiellement comme co-réalisateur.
La Rivière rouge, c’était le premier western de Howard Hawks. C’était l’un des premiers grands rôles dramatiques, nuancés, réellement complexes de John Wayne. C’était aussi la rencontre entre cette légende et Montgomery Clift, qui faisait ses premiers pas au cinéma (même si Les Anges marqués sortira avant vu la post-production compliquée).
21. LA CHARGE HÉROÏQUE
Sortie 1949 – Durée : 1h43
De quoi ça parle : Après la défaite de Custer à Little Big Horn, la tension s’intensifie aux frontières de l’Ouest américain, où les tribus indiennes commencent à se regrouper pour partir en guerre contre les « visages pâles », qu’ils veulent chasser de leurs terres. À la veille de sa retraite, le capitaine Nathan Brittles doit alors faire face à ce soulèvement et éviter le bain de sang.
Pourquoi c’est génial : Des trois films que John Ford a consacrés à la cavalerie (entre Le Massacre de Fort Apache et Rio Grande), La charge héroïque est sans doute celui où transparaît le plus l’humanisme du cinéaste. À l’image de son titre anglais infiniment plus juste (dans l’univers de la cavalerie, une femme amoureuse se pare d’un ruban jaune pour indiquer à tous que son cœur est pris), ce sont ici les rapports humains qui priment, bien plus que cette fameuse charge.
À ce titre, la performance de John Wayne noue plus d’une fois les tripes. Et John Ford de le filmer avec une tendresse et admiration qui n’ont peut être jamais paru aussi évidentes. La légende raconte qu’à l’origine, le réalisateur ne voulait justement pas le caster (notamment, car il était trop jeune pour ce rôle), avant que sa performance dans La Rivière rouge ne lui fasse changer d’avis. À la fin du tournage de La Charge héroïque, Ford lui aurait même offert un petit gâteau, avec un message : « Maintenant, tu es un acteur ».
Sentiment pas forcément partagé par ses contemporains, à tel point que John Wayne aurait toujours gardé un peu d’amertume, lui qui considérait que c’était parmi ses meilleurs rôles. Visuellement splendide avec le Technicolor (Oscar de la meilleure photographie), doté d’une charge émotionnelle rare explosant dans un final inoubliable, le film mérite amplement de figurer dans le top 10 des meilleurs westerns du monde.
20. WINCHESTER 73
Sortie 1950 – Durée : 1h32
De quoi ça parle : Lin McAdam arrive à Dodge City. Il recherche depuis longtemps Dutch Henry Brown dont il veut se venger. Alors qu’il participe à un concours de tir, il gagne le premier prix : une Winchester modèle 73, l’arme emblématique qui a conquis le Far West. Mais Dutch, qui était parmi les concurrents, lui vole la précieuse carabine.
Pourquoi c’est génial : Parce que le premier western du duo Anthony Mann-James Stewart est aussi l’un des plus réussis. À l’origine prévu avec Fritz Lang à la réalisation, avant que le studio Universal ne lui refuse un rôle de producteur, le film Winchester 73 a évolué avec l’arrivée de Mann, et des réécritures du scénario de Borden Chase et Robert L. Richards. James Stewart, lui, a en partie accepté pour pouvoir tourner Harvey, un projet plus risqué que le studio avait du mal à valider.
Le film a justement marqué les esprits grâce à son scénario astucieux, basé sur la fameuse arme du titre qui passe de main en main, et traverse la grande légende de l’Ouest. C’est aussi la définition d’un nouveau héros américain qui est notable ici, presque antipathique par sa volonté d’indépendance absolue, mais dont on admire au final la résolution et la volonté de justice.
19. LA FLÈCHE BRISÉE
Sortie 1950 – Durée : 1h33
De quoi ça parle : En 1870, pendant les Guerres indiennes, Tom Jeffords (James Stewart), ancien éclaireur devenu chercheur d’or, soigne un jeune guerrier indien mordu par un serpent et rencontre des Apaches, qui lui laissent la vie sauve. Apprenant que l’arrivée du courrier est menacée par les attaques des Indiens, lassé par les tueries, Tom se rend alors dans la citadelle du chef indien Cochise pour établir la paix entre les deux peuples.
Pourquoi c’est génial : Parce que s’il n’est pas le premier western antiraciste de l’histoire du genre, La Flèche Brisée peut en revanche être considéré comme le premier western à dresser un portrait honnête des Amérindiens, représentés comme des êtres sauvages et primitifs dans le western classique et les séries B. Ayant effectué plusieurs séjours dans des tribus amérindiennes durant sa vie, Delmer Daves dévoile la culture amérindienne et ses traditions avec une justesse et une humanité qui confèrent toute leur force au film (au-delà des interprétations magistrales de James Stewart et Jeff Chandler).
À travers ce rapprochement entre Jeffords et Cochise, La Flèche Brisée traite de la communication entre deux camps opposés (à une période où le maccarthysme frappait Hollywood), montre que la paix n’arrive pas sans sacrifice et marque le début d’un progressisme pro-indien dans le western, qui se retrouvera quelques mois plus tard dans La Porte du Diable réalisé par Anthony Mann (toujours avec James Stewart), puis dans Bronco Apache, Little Big Man ou encore Danse Avec Les Loups.
18. RIO GRANDE
Sortie 1951 – Durée : 1h45
De quoi ça parle : Un colonel de la cavalerie américaine accueille son fils dans son régiment. La mère de Jeff intervient auprès de son époux pour qu’il n’accepte pas le jeune homme dans sa garnison. La conquête de l’Ouest et la guerre contre les Indiens font rage et la mère craint pour la vie de son fils alors qu’une terrible bataille contre les Apaches se prépare.
Pourquoi c’est génial : Rio Grande est le dernier des trois films réalisés par John Ford sur la cavalerie américaine, après Le Massacre De Fort Apache (où John Wayne incarne déjà Kirby York) et La charge héroïque. C’est aussi la première rencontre du couple mythique John Wayne-Maureen O’Hara, qui se retrouveront notamment dans L’Homme tranquille, L’aigle vole au soleil et Big Jake.
Motivé par la perspective de réaliser L’Homme tranquille juste après, pour aller dans la romance, John Ford laisse ici parler ses sentiments et particulièrement son humanisme. Au détriment de l’action, il s’intéresse au couple. Il met en opposition leur amour et le devoir du soldat, Kirby étant tiraillé entre son cœur homme, et ses obligations de soldat.
17. LA CAPTIVE AUX YEUX CLAIRS
Sortie 1952 – Durée : 2h20
De quoi ça parle : Deux amis libérés de prison partent avec un groupe d’aventuriers qui cherchent, en remontant le Missouri, à devancer la compagnie qui domine le commerce des fourrures. La jeune Teal Eye, fille d’un chef indien, les accompagne pour faciliter le contact avec sa tribu.
Pourquoi c’est génial : Exaltation de la figure des trappeurs, qui défrichèrent les territoires inconnus au-delà de la dernière frontière, La Captive Aux Yeux Clairs est un des modèles les plus « hawksiens » du genre. En s’appuyant sur la rivalité de deux aventuriers aux caractères trempés qui s’affrontent pour les beaux yeux d’une Indienne, Howard Hawks s’amuse à assoir la représentation du mâle moderne américain. Une idée qui fait écho à son précédent et premier western, La Rivière rouge.
Le cinéaste n’en oublie pas pour autant le côté picaresque de l’aventure, d’où un merveilleux catalogue d’images. Le relief philosophique qui affleure par moment trouve des échos dans une période qui prône le respect de la nature, et le casting parfait (Kirk Douglas, Elizabeth Threatt, Dewey Martin, et Arthur Hunnicutt qui sera nommé aux Oscars) termine d’en faire une belle réussite. Ce sera néanmoins le seul film d’Elizabeth Threatt, visiblement écoeurée par Hollywood.
Pur projet de commande du studio RKO, qui avait besoin d’un succès comme La Rivière rouge, La Captive aux yeux clairs a été victime de sa nature puisque les producteurs décident de raccourcir le film d’une quinzaine de minutes, pour l’exploiter sur plus de séances. Un choix peu inspiré, et qui n’a pas empêché au film d’être un échec commercial.
16. JOHNNY GUITARE
Sortie 1954 – Durée : 1H50
Qui est la Belle, qui est la Bête ?
De quoi ça parle : Tenancière d’un casino-saloon, Vienna embauche Johnny Logan, un homme qu’elle a connu autrefois, comme musicien. Ils vont être la cible d’Emma Small, une riche propriétaire puritaine jalouse de Vienna et de sa relation avec le « dancing kid », qu’elle croit à l’origine de la mort de son frère.
Pourquoi c’est génial : Comme son titre ne l’indique pas, Johnny Guitare est un film sur une femme. Le film a beau porter le nom du personnage incarné par Sterling Hayden, c’est bien Joan Crawford la star, dans la peau d’une tenancière de saloon pas comme les autres. Baroque, féministe, le film réalisé par Nicholas Ray doit énormément à l’actrice, qui avait acheté les droits du livre de Roy Chanslor. Mais il y a aussi ce décor d’immense saloon vide, à flanc de montagne, semblable à une grotte ; et la photographie rougeoyante de Harry Stradling, avec le procédé Truecolor.
Là encore, l’histoire derrière le film est savoureuse, avec une formidable mésentente entre les acteurs, notamment Joan Crawford et Mercedes McCambridge, étalée dans la presse. Le réalisateur en garda lui-même un mauvais souvenir, d’autant que Johnny Guitare n’a pas vraiment été un succès à sa sortie. Admirateur du film, Martin Scorsese racontera que le public américain ne savait comment juger cette œuvre moderne, hésitant entre en rire et l’ignorer, tandis que le public européen l’a accueilli avec enthousiasme. Truffaut notamment l’a encensé dans Les Cahiers du cinéma, décrivant une version de La Belle et la Bête en western.
15. L’HOMME DE LA PLAINE
Sortie 1955 – Durée : 1h44
De quoi ça parle : Le taciturne Will Lockhart livre des marchandises en provenance de Laramie dans le Coronado, un lieu perdu jouxtant un territoire apache qui a récemment décimé une colonne de l’armée. Une fois sa livraison effectuée, il cherche à comprendre comment les Apaches se sont fourni leurs fusils avec lesquels ils ont tué les soldats, et part à la recherche du mystérieux trafiquant d’armes derrière tout ça.
Pourquoi c’est génial : Pierre angulaire d’une œuvre qui définissait complètement le héros dit « mannien », L’Homme de la plaine fut le dernier des westerns qu’Anthony Mann tourna avec James Stewart. La fin d’un beau cycle de cinq films, après Winchester 73, Les Affameurs, L’Appât et Je suis un aventurier, sachant que les deux hommes devaient se retrouver pour Le Survivant des monts lointains, que le réalisateur déclina. Mann raconte que l’acteur lui en a toujours un peu voulu.
James Stewart incarne ici Will Lockhart, qui s’attarde dans une petite ville suite à une attaque des Indiens contre l’armée. Dépeignant à nouveau l’histoire d’un solitaire qui est à la fois aux prises avec les passions humaines (qu’il tente d’éviter sans succès) et une nature parfois hostile (mais dont il fait intimement partie), L’Homme de la Plaine est la forme d’expression la plus pure du western. Magnifié par des prises de vue au Cinémascope qui supplantent en beauté même celles de John Ford, et dominé de la tête et des épaules par un acteur qui réussit à faire oublier son style « all-american » pour incarner un des héros les plus ambivalents du genre.
Par la suite, Anthony Mann partagera quelques regrets sur le film, notamment l’identité du personnage interprété par James Stewart : il aurait aimé que ce soit le frère aîné, qui découvre à la fin que son père est le responsable du trafic d’armes, plutôt qu’un étranger. Le producteur a refusé cette idée. Dans tous les cas, L’Homme de la plaine reste un classique du western.
14. LA PRISONNIÈRE DU DÉSERT
Sortie 1956 – Durée : 2h
De quoi ça parle : Au Texas, Aaron Edwards et sa famille sont tués par des Indiens Comanches qui attaquent son ranch et enlèvent ses deux filles, Lucy et Debbie. Ethan, le frère d’Aaron, découvre le drame et se lance sur les traces des ravisseurs avec deux autres compagnons, son neveu et le fiancé de Lucy.
Pourquoi c’est génial : Un film puissant qui détonne avec le reste de l’oeuvre de John Ford. Plus pessimiste, plus noir, John Wayne y interprète Ethan, un homme à la recherche de sa nièce enlevée par les Indiens, après que sa famille ait été massacrée. Héros fordien de par sa quête et sa volonté inflexible, Wayne en est aussi la négation : un homme qui renoncera à ses valeurs pour atteindre son but. Ce monde qui s’éteint est désormais bien plus complexe à déchiffrer, au-delà des lignes si faciles entre les gentils et les méchants.
Dès son ouverture, exceptionnelle, le film illustre sans pareil la déréliction d’un certain Ouest, alors en pleine transformation. Fable philosophique et politique, La Prisonnière du désert transcende pas à pas les codes du cinéma dont il est issu, jusqu’à un final poignant en forme d’adieu. L’image de John Wayne s’éloignant de dos n’est d’ailleurs pas devenue célèbre sans raison : elle est le meilleur héraut de ce film à part, comme de la filmographie de son auteur.
13. RIO BRAVO
Sortie 1959 – Durée : 2h21
De quoi ça parle : John T. Chance est le shérif de la petite ville de Rio Bravo, dont il a quelques difficultés à maintenir l’ordre. Son premier adjoint, Dude, est un alcoolique notoire, et l’autre, Stumpy, un vieillard boiteux. Un jour, Dude se fait tabasser par Joe Burdette, le frère cadet de l’homme le plus puissant de la région, et se fait arrêter par le shérif, déclarant ainsi la guerre à la bande de Burdette.
Pourquoi c’est génial : C’est l’essence du western : le shérif droit et juste, les méchants retords prêt à abattre lâchement le héros, la longue rue déserte et poussiéreuse, le saloon, les échanges de tirs, le crescendo jusqu’à ce que la poudre parle… Mais Rio Bravo, c’est aussi une histoire de rédemption émouvante, une romance pittoresque sublime, un humour truculent et un aparté musical anthologique.
Le film réalisé par Howard Hawks est rempli de scènes mémorables : l’entrée par devant du saloon de Dude tentant de surmonter son alcoolisme ; les joutes verbales entre Chance et Feathers, éternels tourtereaux qui ont du mal à avouer leurs sentiments ; le sauvetage éclair de Chance par Colorado ; le duel final à coups de dynamite, cadré de manière aussi stupéfiante qu’évidente avec une musique lancinante magique de Dimitri Tiomkin.
Considéré comme une réponse au Train sifflera 3 fois réalisé par Fred Zinnemann, également comparé à 3H10 Pour Yuma, largement copié depuis (notamment par John Carpenter pour concocter Assaut), Rio Bravo respire le cinéma à chaque plan. Un très grand western, et un film essentiel.
12. LES SEPT MERCENAIRES
Sortie 1960 – Durée : 2h08
De quoi ça parle : Un petit village mexicain subit les attaques incessantes d’une bande de pilleurs. Accablés par la situation, les paysans réunissent leurs maigres économies pour trouver du soutien, et notamment des armes, de l’autre côté de la frontière américaine. Une fois sur place, un vétéran nommé Chris Adams leur explique qu’il serait plus efficace d’embaucher des tireurs professionnels pour repousser le prochain assaut. Ensemble, ils recrutent donc six autres mercenaires.
Pourquoi c’est génial : Une évidence. Plus qu’une version des Sept samouraïs réalisé par Akira Kurosawa, Les Sept mercenaires est une véritable relecture à l’aune des valeurs américaines, mise en scène avec talent par John Sturges. Et bien sûr, c’est un casting de haut vol.
Yul Brynner, Steve McQueen, Charles Bronson, Robert Vaughn, James Coburn, Horst Buchholz et Brad Dexter forment une bande inoubliable, réunie pour protéger un petit village de paysans mexicains face à des bandits. Là encore, il y avait des tensions sur le plateau, notamment une bataille d’ego entre Steve McQuenn et Yul Brynner, certainement accentuée par l’envie de créer une légende sur un film légendaire. Difficile de ne pas mentionner également la musique composée par Elmer Bernstein.
À l’époque, Les Sept Mercenaires a été fraîchement reçu par la critique et le public, particulièrement aux États-Unis. Depuis, c’est devenu un classique absolu, qui a donné trois suites (Le retour des Sept, Les colts des sept mercenaires, La Chevauchée des sept mercenaires), une version SF (Les Mercenaires de l’espace), une série à la fin des années 90, et un remake en 2016.
11. L’HOMME QUI TUA LIBERTY VALANCE
Sortie 1961 – Durée : 2h03
La vie est belle, qu’ils disaient
De quoi ça parle : En 1910, le sénateur Stoddard et sa femme Hallie retournent dans l’Ouest, à Shinbone, pour l’enterrement de leur vieil ami Tom Doniphon. Intrigué, un journaliste lui demande les raisons de sa présence et Stoddard, d’abord réticent, finit par lui raconter comment, 25 ans plus tôt, il a débarqué dans l’Ouest, idéaliste et fraîchement diplômé en droit. Mais aussi comment il a fait la rencontre de Liberty Valance, un bandit de notoriété publique.
Pourquoi c’est génial : L’homme qui tua Liberty Valance a quelque chose d’extraordinaire : c’est le dernier immense western de celui qui personnifie le mieux le genre, John Ford. Pour l’occasion, le réalisateur retrouvait le noir et blanc de ses débuts (celui de La Chevauchée fantastique), tout en continuant d’explorer les thèmes qui lui sont chers.
C’est sans doute avec Liberty Valance qu’il aura su le plus magnifiquement mettre en évidence son profond et viscéral attachement à la justice et aux valeurs humaines. Formidable évocation d’un Ouest en pleine mutation, le film met en balance, et dans la plus intense des confrontations, la violence des armes (John Wayne vs Lee Marvin) face à la volonté d’imposer un état de droit, en la personne de l’avocat Stoddard (James Stewart dans un rôle proche de celui qu’il tenait chez Capra).
Habilement construit autour d’un flashback, L’Homme qui tua Liberty Valance est empreint d’une fascinante mélancolie qui explose lors des derniers instants, au détour d’une phrase lancée par le contrôleur du train (« On n’en fera jamais assez pour l’homme qui tua Liberty Valance »). C’est seulement à ce moment que Stoddard, et plus encore le spectateur, réalise que sa vie, et donc au fond l’Histoire de l’Amérique, s’est construite sur un mensonge, sur un secret enfoui et jamais révélé.
Western intimiste, profondément humain et terriblement touchant, L’Homme qui tua Liberty Valance est tout simplement l’un des plus grands films qu’Hollywood ait jamais produits.
10. LE BON, LA BRUTE ET LE TRUAND
Sortie 1966 – Durée : 2h40
De quoi ça parle : Pendant la Guerre de Sécession, trois hommes et tireurs confirmés se lancent à la recherche d’un coffre ayant disparu et contenant 200 000 dollars en pièces d’or volés à l’armée sudiste.
Pourquoi c’est génial : Comment passer à côté de la trilogie du dollar, de l’Homme sans nom incarné par Clint Eastwood, de la mise en scène folle de Sergio Leone, et de la musique éternelle d’Ennio Morricone ? S’il ne fallait en garder qu’un (et même si personne ne veut ça au fond), ce serait Le Bon, la Brute et le Truand, le dernier volet où Eastwood et Lee Van Cleef sont rejoints par Eli Wallach. L’Histoire secoue l’histoire avec la guerre de Sécession à l’horizon, faisant de cette conclusion un prequel, où l’Homme sans nom enfile son célèbre poncho à la toute fin.
C’est la rencontre entre trois personnages hors-normes, troubles et ambigus, pour un affrontement mortel devenu mythique. Eastwood et Van Cleef sont impeccables, mais Eli Wallach impressionne, entre fulgurances comiques et répliques cultes. Son interprétation de Tuco est formidable de force, de truculence et d’énergie, et après Les Sept Mercenaires, c’était la consécration.
À l’origine, il y a d’abord le studio américain United Artists qui avait repéré Pour une poignée de dollars et Et pour quelques dollars de plus, et rêvait de se placer sur une suite. Sergio Leone et le scénariste Luciano Vincenzoni n’y pensaient pas, mais se sont laissés tenter. Résultat : l’un des sommets du western spaghetti, et la fin de la collaboration entre le cinéaste et Eastwood. La relation entre les deux hommes tournera au vinaigre, si bien que l’acteur refusera par la suite un rôle dans Il était une fois dans l’Ouest, tandis que Leone ne manquera pas de l’égratigner, le qualifiant de « star » avant d’être comédien.
9. LE GRAND SILENCE
Sortie 1968 – Durée : 1h30
De quoi ça parle : Un mystérieux pistolero muet, justement surnommé « Silence », débarque en Utah au beau milieu d’un hiver particulièrement rude. Des chasseurs de primes profitent du climat pour martyriser les autochtones désemparés. Son arrivée va tout changer.
Pourquoi c’est génial : La présence de Sergio Corbucci étant obligatoire dans ce dossier, il restait à piocher dans sa riche filmographie. Le très célèbre Django, si populaire qu’il a lancé une saga officieuse, avait beau être le choix idéal, le chef-d’oeuvre de l’auteur reste probablement Le Grand Silence. Une oeuvre crépusculaire que beaucoup considèrent – à raison – comme le western spaghetti le plus noir jamais tourné, et ce en dépit de ses teintes neigeuses.
Les Italiens ont toujours assumé d’introduire une violence et un nihilisme dans le genre, et à cet égard, Le Grand Silence est peut-être le plus radical des westerns spaghettis. Il doit cette réputation au jeu renfrogné des deux légendes Jean-Louis Trintignant et Klaus Kinski, au décalage, soigneusement entretenu, entre ses thèmes extrêmement sombres et ses décors enneigés, absolument sublimes, à la brutalité qu’il est capable de déchainer, mais surtout à son dernier acte, envoyant valser toutes les conventions du cinéma populaire américain avec une fougue sardonique, voire carrément sadique.
Une conclusion si noire qu’elle a forcé les producteurs à demander au cinéaste de tourner un happy ending plus traditionnel. Car le film semble à première vue pouvoir faire office de film de Noël, mais il n’a en fait rien du divertissement saisonnier calibré tel qu’ils pullulent encore dans nos chaumières. Rares sont les westerns à atteindre un tel niveau de misanthropie (on vous recommande quand même Tire encore si tu peux ! ou le frappadingue Scalps) et à avoir autant inspiré la cinéphilie mondiale. Bien des metteurs en scène ont tenté de filmer les étendues neigeuses comme Corbucci. Peu l’ont fait avec un talent similaire.
8.IL ÉTAIT UNE FOIS DANS L’OUEST
Sortie 1969 – Durée : 2h55
De quoi ça parle : Alors qu’il prépare une fête pour sa femme, Bet McBain est tué avec ses trois enfants. Sur fond de conflit autour de l’arrivée du chemin de fer, Jill McBain hérite alors des terres de son mari, qui prévoyait d’y construire une gare. Des terres que convoite Morton, le commanditaire du crime. Mais les soupçons se portent sur un homme du nom de Cheyenne, tout juste évadé de prison.
Pourquoi c’est génial : La vision de Sergio Leone est purement fantasmagorique, et c’est en cela qu’elle touche au grandiose. Le réalisateur transforme son western en fresque épique et tragique, et accouche d’une oeuvre d’une ampleur phénoménale. De la séquence d’ouverture au flashback de l’Harmonica, le film est parcouru de scènes à l’intensité remarquable, qui impriment immédiatement la rétine du spectateur.
Là encore, le projet est parti des studios. Alors qu’il ne voulait plus plonger dans le western et refusait les offres des productions, tout en préparant Il était une fois en Amérique, Leone s’est laissé tenter par la proposition de Paramount : un gros budget et son acteur de rêve, Henry Fonda (qui a d’abord refusé). Bernardo Bertolucci, Dario Argento, puis Sergio Donati écrivent le scénario.
À la limite de la parodie, Sergio Leone rassemble tous les ingrédients du western pour les magnifier, et amener le genre jusqu’à sa limite. Peut-être le western qui fait définitivement basculer l’Ouest dans le mythe.
Moyennement accueilli aux États-Unis (où il sort en version plus courte), Il était une fois dans l’Ouest rencontre un immense succès en Europe, notamment en Italie et en France (14,8 millions d’entrées chez nous). Et inutile de redire que depuis, il est considéré comme un chef d’œuvre.
7. LA HORDE SAUVAGE
Sortie 1969 – Durée : 2h25
De quoi ça parle : Un groupe de bandits menés par Pike Bishop attaque les bureaux d’une compagnie de chemins de fer avant de s’enfuir au Mexique, alors en pleine révolution. Mais le dirigeant de la compagnie oblige l’ancien frère d’armes de Pike, Deke Thornton, à partir avec une bande de chasseurs de primes traquer et tuer ses anciens compagnons en moins de 30 jours, sous peine de se retourner en prison.
Pourquoi c’est génial : Film mythique dont la portée dépasse le cadre du western, La Horde sauvage est autant une épopée furieuse et nihiliste, que le portrait intime de héros vieillissants et affectés par le changement de siècle. Au zénith de son art, Sam Peckinpah imprime un nouveau style au cinéma d’action avec son usage extrême du ralenti et du montage éclaté, tout en appuyant à fond sur la violence aux limites du sadisme, et en renvoyant définitivement les bons et les méchants dos à dos.
C’est d’autant plus cocasse que le cinéaste traîne alors une sale réputation, suite au tournage chaotique de Major Dundee où il était incontrôlable, et qui a accouché d’un échec commercial. À l’origine écrit par Walon Green et Roy Sickner, le scénario de La Horde sauvage est arrivé entre ses mains grâce à Lee Marvin et aux producteurs Phil Feldman et Kenneth Hyman. Sans grande surprise, le budget du film explose pendant le tournage, notamment parce que Peckinpah aime l’improvisation, renvoie plusieurs techniciens, et que les décors sont isolés.
Rompant définitivement une forme de règle implicite qui faisait du cowboy américain un chevalier sans reproche, La Horde Sauvage peut être perçu comme une œuvre crépusculaire sur un certain Hollywood, ainsi qu’une forme de renaissance qui continue à faire des émules maintenant – jusqu’à un projet de remake par Mel Gibson. C’est aussi à cela que l’on reconnait un chef d’œuvre.
Né dans la douleur, avec un montage compliqué vu la longueur et la violence des images, La Horde sauvage a été tronçonné à sa sortie, si bien que la vraie version de Peckinpah s’était perdue. C’est uniquement après sa mort, et avec l’aide de Scorsese, que le film est ressorti, presque comme le cinéaste l’aurait voulu.
6. BUTCH CASSIDY ET LE KID
Sortie 1969 – Durée : 1h50
De quoi ça parle : Célèbres pour leurs braquages de banques et de trains, Butch Cassidy et Sundance Kid élaborent un plan audacieux pour voler deux fois un convoi de l’Union Pacific. Poursuivis par les hommes de la Pinkerton après leur attaque, les deux compères sont obligés de fuir en Bolivie avec Etta Place, la petite-amie de Sundance.
Pourquoi c’est génial : Parce que c’est une merveille de western qui peut être considérée comme l’ancêtre du buddy movie grâce à son irrésistible duo composé de Paul Newman et Robert Redford. Deux personnages qui vont à l’encontre de la figure du cow-boy dans le western classique, tout comme le reste du film.
Même s’il reprend tous les codes du western avec fusillades et vols de trains, Butch Cassidy et le Kid renouvelle le genre (remplacé depuis par le western spaghetti) et s’inscrit dans le nouvel Hollywood de son époque en racontant justement la marche du progrès et l’émergence d’un Nouveau Monde dans un récit moderne et romanesque, qui dégage une tendre nostalgie et une insouciante envie de liberté à travers la fuite de ces deux héros. Un petit chef-d’oeuvre dont les dernières secondes sont inoubliables et restent une des meilleures fins de l’histoire du cinéma.
5. JOSEY WALES, HORS-LA-LOI
Sortie 1976 – Durée : 2h15
De quoi ça parle : À la fin de la guerre de Sécession dans le Missouri, Josey Wales, un paisible fermier, voit sa femme et son fils se faire massacrer par des soldats nordistes. Laissé pour mort, Josey décide de se venger, mais sa tête est mise à prix.
Pourquoi c’est génial : C’était le cinquième film de Clint Eastwood réalisateur, après Un frisson dans la nuit, L’Homme des Hautes Plaines, Breezy et La Sanction, et avant L’Épreuve de force, Bronco Billy et Firefox, l’arme absolue. Dix ans après la trilogie du dollar, il abandonne les oripeaux du western italien, qui imprégnaient encore L’Homme des Haute Plaines. Eastwood signe ici le retour à une certaine forme de lyrisme non exempt de vérité, qui emprunte autant à John Ford qu’à Arthur Penn.
Tiré du livre de Forrest Carter, le prétexte est simple : le paisible fermier Josey Wales se transforme en justicier implacable suite au massacre de sa famille, par des brigands pendant la guerre de Sécession. Non exempte d’humour, cette odyssée violente se déroule dans un Ouest dont la sauvagerie est désormais du ressort de l’homme blanc (les Indiens étant présents, mais réduits au niveau de spectateurs goguenards).
Grand succès à l’époque, au point de donner lieu à une suite (sans Eastwood), Josey Wales, hors-la-loi a pourtant été façonné dans la douleur. À l’origine, le co-scénariste Philip Kaufman devait réaliser le film, et avait quasiment fini la préparation, avec le choix des décors, costumes et acteurs. Mais les tensions entre Eastwood et lui étaient si gênantes que l’acteur a demandé le renvoi de Kaufman, et a repris son poste. La situation était tellement compliquée que la Guilde des réalisateurs est tombée sur les producteurs, puis a instauré une règle empêchant un acteur ou producteur de virer un réalisateur pour prendre sa place. Le nom de cette règle : « The Eastwood Rule ».
Le film marqua dans tous les cas un tournant indéniable dans la carrière de cinéaste de l’ancien homme sans nom. Il complètera par la suite son costume de héros ultime du western avec des œuvres comme Pale Rider et Impitoyable, mais c’est celui du outlaw Josey Wales qui reste le plus parfait. Eastwood est le premier à le dire sur le DVD, parlant de Josey Wales comme l’un des points culminants de sa carrière dans le western.
4. LA PORTE DU PARADIS
Sortie 1980 – Durée : 3h39
De quoi ça parle : Deux anciens élèves de Harvard se retrouvent en 1890 dans le Wyoming. Averill est shérif fédéral tandis que Billy Irvine, rongé par l’alcool, est membre d’une association de gros éleveurs en lutte contre les petits immigrants venus pour la plupart d’Europe centrale. Averill s’oppose à l’intervention de l’association sur le district et tente de convaincre son amie Ella, une prostituée d’origine française, de quitter le pays.
Pourquoi c’est génial : Le film maudit par excellence, qui a fait couler autant d’encre qu’il y a eu de sueur et larmes sur le tournage de cette superproduction folle. Tourné entre avril 1079 et mars 1980, avec un budget qui avait triplé, le film a été un enfer du début à la fin. Reconstruction entière d’un décor, irrigation d’une zone pour recréer la verdure, multiples prises, animaux maltraités, retards insensés pour attendre la bonne météo, tentative de virer Michael Cimino pendant le tournage, bataille dans la salle de montage, première version de 5h25, nouvelle bataille pour raccourcir le montage… la légende est presque aussi grandiose que les images.
La réalité est néanmoins plus triste. Sorti fin 1980, La Porte du paradis a été un immense échec, avec moins de 4 millions au box-office pour un budget de plus de 40. Une nouvelle version, plus courte, sera diffusée quelques mois après, mais ne sauvera pas la mise. Un désastre qui a été le coup fatal pour United Artists, et pour une certaine idée du Hollywood d’autrefois. Il faut lire Le Nouvel Hollywood, le passionnant livre de Peter Biskind, pour mesurer l’impact du film dans l’industrie.
Mais au-delà de la partie historique, il reste un film fou. C’est l’expression la plus extrême de la mauvaise conscience de l’Amérique, et le constat amer et sanglant qu’au pays de la bannière étoilée, c’est la volonté du plus riche qui prime d’abord. Mettant en relief des héros ambigus et en souffrance, La Porte du Paradis rejoint par certains côtés la vision jusqu’au-boutiste de Sam Peckinpah, et marque par des séquences hallucinantes de beauté et de sauvagerie. Le summum est la bataille finale, dont le déroulement meurtrier et concentrique n’est que la concrétisation d’une société américaine qui sera ainsi stratifiée. À voir et à revoir inlassablement.
3. IMPITOYABLE
Sortie 1992 – Durée : 2h11
De quoi ça parle : En 1880, William Munny, redoutable hors-la-loi reconverti dans l’élevage dans le Wyoming va, à la demande d’un jeune tueur, reprendre du service pour venger une prostituée défigurée par un cow-boy sadique.
Pourquoi c’est génial : Le film où Clint Eastwood parvient à transcender le genre qui fit de lui une star. Avec cette histoire de vieux hors-la-loi reconverti dans l’élevage, qui reprend du service pour venger une prostituée défigurée par un sadique, l’acteur et réalisateur redonne vie à un mythe moribond, autant qu’il le dépasse et en acte la disparition.
Avec Impitoyable, il clôture en beauté son cycle sur l’Ouest autour de ses thèmes favoris, à savoir révéler la part d’humanité, de faiblesse et donc de vérité, que cachent les mythes et légendes. Pour ça, il détourne sciemment le symbole du duel pour abattre la figure chevaleresque et noble du pistolero. Wowboy vieilli, rattrapé par la réalité, Will Muny lui offre un chant du cygne mémorable. Sachant que Clint Eastwood avait eu le scénario de David Webb Peoples entre les mains au début des années 80, et qu’il a présenté Impitoyable comme son dernier western, la boucle était magnifiquement bouclée.
Morgan Freeman et Gene Hackman sont les autres visages inoubliables du film, immense succès à sa sortie, couronné par quatre Oscars (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur second rôle pour Hackman et meilleur montage).
2. TRUE GRIT
Sortie 2010 – Durée : 1h50
Les débuts flamboyants d’Hailee Steinfeld
De quoi ça parle : Pour venger la mort de son père, assassiné par l’un de ses employés, la jeune Mattie Ross décide de recourir aux services du marshal Cogburn. Bientôt rejoints dans leur quête par un Texas Ranger à la recherche du criminel, le trio va se lancer dans une aventure qui ne les laissera pas indemnes.
Pourquoi c’est génial : Remake du film Cent dollars pour un shérif, lui-même adapté d’un roman, True Grit sonne bien vite comme une évidence dans la filmographie des frères Coen. Le duo de cinéastes y retrouve l’aspect poisseux et désenchanté de son autre « western », No Country for Old Men, mais aborde cette fois sa post-modernité avec une imagerie plus traditionnelle du genre.
Si le film aurait pu se prélasser dans l’innocence perdue de sa jeune héroïne, l’écriture des frères Coen est en réalité bien plus fine, et s’empare du cycle de la violence pour l’interroger plutôt que de le diaboliser. Il ressort ainsi de True Grit une complexité bouleversante, qui donne du poids à l’humanité de ses personnages, icônes désabusées d’un Ouest qui ne parvient plus à façonner de légendes.
Entre humour et violence brutale, les frères Coen alternent les tons à la manière d’un équilibriste en pleine maîtrise de ses moyens, le tout jusqu’à un épilogue d’une mélancolie tétanisante. Mais surtout, True Grit est un très grand film d’acteurs, où le charisme de Jeff Bridges et de Matt Damon est constamment mis à l’épreuve par l’énergie incandescente d’Hailee Steinfeld.
1. LES HUIT SALOPARDS
Sortie 2016 – Durée : 2h48
De quoi ça parle : Le chasseur de primes John Ruth doit conduire sa prisonnière, Daisy Domergue, à Red Rock pour la faire pendre et empocher le butin mis sur sa tête. Sauf qu’à cause du blizzard, ils sont obligés de se réfugier dans une auberge en attendant que la tempête cesse où ils sont accueillis par plusieurs personnages énigmatiques. Coincés tous ensemble, ils vont très vite comprendre qu’ils ne finiront pas tous la nuit vivants.
Pourquoi c’est génial : Probablement parce que Quentin Tarantino n’avait jamais été aussi mature sur ses précédents longs-métrages et qu’il s’agit sans doute de l’oeuvre la plus aboutie de sa filmographie (avec Once Upon a Time… in Hollywood depuis). Lorsqu’il sort en janvier 2016, Les 8 Salopards représente clairement la synthèse du travail du cinéaste, en mêlant habilement le huis clos à la Reservoir Dogs à ses désirs uchroniques débutés avec Inglourious Basterds et le ton cartoonesque outrancier de ses joutes sanglantes (marque de fabrique crescendo de Pulp Fiction à Django Unchained).
D’une impressionnante richesse scénaristique (les dialogues et monologues fabuleux), le film ne s’arrête d’ailleurs pas là. Bien au contraire, il rend surtout hommage à tout un pan de l’Art, de la littérature d’Agatha Christie en passant évidemment par le cinéma de Sam Peckinpah, John Sturges ou encore John Carpenter, dont l’aura de The Thing résonne tout au long du film et jusqu’en dans la partition d’Ennio Morricone reprenant certaines mélodies non utilisées à l’époque.
Ainsi, Les 8 Salopards mute à l’image du monstre alien de The Thing passant du western politique incisif déterrant les démons de l’Amérique ségrégationniste au whodunit tendu et nerveux avant de plonger pleinement dans l’horreur avec son huis clos anxiogène et paranoïaque. C’est assurément la force du long-métrage, capable de jongler entre les genres et les tons avec une puissance encore inédite chez Tarantino. Et quand le tout est évidemment mené par un parterre de stars inoubliable, dont Jennifer Jason Leigh en prisonnière complètement tarée, ça donne un des derniers grands westerns contemporains.
QUELS SONT LES MEILLEURS WESTERNS SUR NETFLIX ?
Le catalogue de Netflix propose les films Django Unchained de Quentin Tarantino, La Ballade de Buster Scruggs, No Country for Old Men et True Grit des frères Coen, The Revenant d’Alejandro González Iñárritu ou encore Geronimo de Walter Hill.
QUELLES SONT LES MEILLEURES SÉRIES WESTERNS ?
On peut citer Deadwood et Godless parmi les plus populaires, mais aussi la trop sous-côtée Dr. Quinn, femme médecin et La Petite maison dans la prairie parmi les plus cultes, sans oublier les plus classiques comme Les Mystères de l’ouest ou la série animée Lucky Luke.
QUELS SONT LES WESTERNS SORTIS EN 2021 ?
Les westerns The Harder They Fall et La Mission sont sortis en 2021 sur Netflix. Au cinéma, Clint Eastwood a fait son retour avec Cry Macho et Jane Campion avec The Power of the Dog.
QUELS SONT LES PIRES WESTERNS ?
Parmi les pires, on retrouve quelques comédies et westerns français comme Albert à l’Ouest, The Ridiculous 6 ou Lucky Luke, mais aussi le remake d’Antoine Fuqua Les 7 Mercenaires, Cowboys & envahisseurs de Jon Favreau ou encore Jonah Hex avec Josh Brolin et Wild Wild West avec Will Smith.
La porte du diable d’Anthony Mann n’est pas interprété par James Stewart mais Robert Taylor. Néanmoins votre article est très intéressant.
Danse avec les loups est pour moi le plus beau western de tous les temps, mêlant aventure et humanisme. Les indiens ne sont pas vus uniquement comme des cibles à abattre mais comme des humains ayant une histoire et une soif de liberté.
Ce western est magnifique et les rôles bien interprétés.
« Enlever les Leones »… tsss
bonne liste avec quelques manques comme 3h10 to yuma ,( de Daves ) le sergent noir ( je suis fan de Ford ); j ‘enlèverais aussi les Leone ( pas fan du tout de spaghettis ( sauf ceux qui se mangent….
Le Dernier Train De Gun Hill avec Kirk douglas et Anthony Quinn…L’homme aux Colts D’Or avec Richard Widmark; Henry Fonda Et Anthony Quinn…Coup De Feu dans La Sierra avec Georges Mc Réa et Randolf Scott…La Première Balle Tue avec Glenn Ford Et pour Moi Alamo avec John Wayne ; Richard Widmark et Lawrence Harvey…Il y en a tellement…( La Dernière séance était Génial à Lépoque ou l’on avait des Programmes de Qualités….Merci Eddy Mitchell )
Perso j’aurais au moins mis un des deux très beaux westerns de Kevin Costner, Danse avec les loups et/ou Open Range,
En tout cas ça donne envie de revoir ou découvrir ces classiques
PAs mal
Excellente liste, même si certains chefs-d’œuvre, comme Little Big Man, 3h10 pour Yuma (les deux films), Django, Soldat bleu auraient mérité d’y figurer..
Super liste !
Merci!!!!
Tellement de pépites !!!!