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JCVD : quand Jean-Claude Van Damme se jouait lui-même et apparaissait plus touchant que jamais

Par Captain Jim
29 septembre 2024
MAJ : 29 septembre 2024
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JCVD : Jean-Clude Van Damme joue Jean-Clude Van-Damme

Jean-Claude Van Damme joue… Jean-Claude Van Damme dans le pur film de fan JCVD.

Arnold Schwarzennegger est le Terminator. Sylvester Stallone est Rambo. Tom Cruise est Ethan Hunt. Keanu Reeves est John Wick, ou Neo. Les plus grandes stars du cinéma d’action sont connues du public autant grâce à leurs noms qui s’affichent en grand à l’écran que grâce à ceux des personnages iconiques qu’ils ont incarné.

Un plaisir que quelqu’un comme Jean-Claude Van Damme n’a, hélas, jamais connu. Si le « muscle from Brussels » a longtemps été capable d’attirer un public sur la seule base de son nom, il n’a jamais eu la chance de jouer un rôle qui le dépasse, lui ouvrant les portes du Panthéon du septième art.

Ce n’est peut-être donc pas si surprenant que son meilleur rôle soit une fiction où il joue… Jean-Claude Van Damme ! En 2008, le Belge jouait une version au bout du rouleau de lui-même dans le film JCVD, réalisé par l’ancien assistant réalisateur de Mathieu Kassovitz, et surtout un vrai fan de la carrière de Van Damme, Mabrouk El Mechri.

Voir Van Damme en costard cravate, c’est comme voir Donald sans son uniforme de marin : c’pas naturel

Piège en Belgique

Le scénario est relativement simple : Van Damme joue… Jean-Claude Van Damme donc (ou Jean-Claude Van Varenberg, de son vrai nom), acteur de films d’action sur la pente descendante. Les films sont de moins en moins excitants, l’argent ne coule plus à flot et surtout la situation familiale est au plus mal. Il va perdre la garde de sa fille et n’a plus de quoi payer son avocat. Alors qu’il est à Schaerbeek, sa ville natale, l’acteur se rend à la Banque Postale pour faire un virement… Et se retrouve pris en otage lors d’un braquage.

Comme on l’apprend dans l’excellent livre Jean-Claude Van Damme et ses doubles de David Da Silva, le projet JCVD est arrivé pile au bon moment pour la star. Il venait de fermer la porte à un retour à un film de combat à mains nues – le genre de ses origines –, prétextant une envie d’aller chercher des rôles plus exigeants. Rien de surprenant à cela, puisque tout acteur a peur d’être typecasté.

Sa grande peur depuis ses débuts fracassants dans Bloodsport est précisément de se retrouver cantonné aux rôles de bagarreur. Bien malgré lui, il n’a jamais réussi à s’éloigner bien loin de cet archétype. Un échec qui est en partie causé par son public de fans, qui ne l’a pas suivi lors de ses tentatives comme le Cavale sans Issue de Robert Harmon en 1993. Le film JCVD réalisé par Mabrouk El Mechri ,à partir d’une idée du producteur Marc Fizman, arrivait donc à point nommé pour une nouvelle tentative de renouvellement d’autant plus pertinente que la frontière entre le vrai Van Damme et celui de la fiction JCVD est des plus floues imaginables.

« Tu la revends pas sur Ebay hein ? »

Ça, c’est vraiment toi

Le long-métrage s’ouvre par un curieux morceau de bravoure. Un plan séquence dans lequel Van Damme traverse des vagues d’ennemis par dizaines, les laminant à coups de pistolets et à coups de pieds pour varier les plaisirs. Une scène spectaculaire certes, mais qui est aussi remplie de petits moments clairement ratés : un uppercut qui passe largement à côté de sa cible, une vitre qui n’explose pas…

La supercherie est révélée au bout de quatre minutes : il s’agit d’un tournage de film, et de la seule véritable grosse scène d’action du film. C’est Mabrouk El Mechri qui a largement édulcoré le scénario pour se concentrer sur l’humain et éviter de trop sombrer dans le dérivatif de Die Hard, ce qui était pourtant le point de départ du projet… Mais c’est cette nouvelle approche qui a intéressé Van Damme.

Dès cette introduction, le film accompagne le spectateur et l’encourage à mettre de côté la persona de Van Damme au cinéma, pour lui dévoiler le véritable homme de 47 ans, fatigué mais toujours motivé à l’idée de tourner devant la caméra. Pour quiconque qui a suivi de près la carrière et la vie personnelle de l’action star, la première demi-heure ressemble à un étrange documentaire.

Cinema Inferno

On le découvre notamment lors d’une discussion avec son agent, affreusement lucide vis à vis de sa carrière au début des années 2000. Abîmé par son comportement autodestructeur devant les caméras des journalistes et sur les plateaux de tournage, il se retrouve au début du 20ème siècle blacklisté à Hollywood et enchaîne les tournages en Europe pour des direct-to-video pour la plupart irregardables.

«Ils détruisent ma carrière, ces types », lance l’acteur à son agent tandis que la caméra ne quitte pas son visage désabusé et las, dans un gros plan qui n’a rien de flatteur. Plus tôt dans le film, le réalisateur – au personnage très clairement inspirée des réalisateurs hongkongais John Woo et Tsui Hark avec qui Van Damme avait eu des relations tumultueuses – lui dit qu’ils ne sont pas en train de filmer Citizen Kane.

De la même manière, lorsque l’actrice qui joue la fille de Van Damme explique dans une scène au tribunal en avoir assez d’être moquée par ses camarades de classe à chaque fois que son père apparaît à la télévision, il est difficile de ne pas y voir un reflet à peine déformé de la réalité : l’acteur s’est tellement illustré dans diverses apparitions promotionnelles comme étant un grand illuminé qu’on peut légitimement se demander quel impact cela a joué sur sa famille.

Des fois j’y pense et… je souris

Et pourtant, là où le film ne se trompe pas non plus, c’est dans son portrait des fans de Van Damme. Malgré la déchéance de l’acteur et même si ceux-ci ne l’ont pas vu au cinéma depuis des années, ils sont toujours en admiration devant le bonhomme. Même s’ils sont des criminels en plein braquage de la Banque Postale, et qu’ils l’ont pris en otage.

Ce dernier point pourrait aisément être une véritable péripétie de la vie de l’acteur. Dans le numéro de septembre de 2022 de So Film, il raconte qu’en 2003, peu après le tournage d’In Hell en Russie, il a été victime d’une tentative de kidnapping. Plus autofiction que JCVD, tu meurs.

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La plus vulnérable des action stars

Le long-métrage de Mabrouk El Mechri est loin d’être parfait. Sa structure narrative, bien qu’elle soit très habile, manque de rythme et ne gère pas toujours au mieux les temps morts. La photographie surtout, est pénalisée par une palette de couleurs immonde qui varie de la boue marron à la bouillasse un peu moins marron. Ce qui est d’autant plus dommage que les plans sont eux très souvent magnifiquement composés.

Mais peu importe au fond, les moindres défauts et imperfections du film paraissent superficiels tant la plus grande qualité du film est indéniable : Jean-Claude Van Damme crève l’écran. Sans esbroufe, sans grandes cascades, sans acrobaties dantesques, simplement il joue et c’est comme découvrir un autre acteur.

Quand on pense à la plus grande qualité du Belge au cinéma, celle qui a fait de lui une star, on pense d’abord à son physique ; peut-être à ses coups de pied spectaculaires, ou à sa souplesse légendaire. Mais sa vraie plus-value comparé à toutes les autres action stars, c’est la vulnérabilité qui transparaît dans son jeu. Lorsqu’il se donne à fond, il est toujours sincère même s’il doit devenir ridicule.

« Dis Roger, t’as pas l’impression d’avoir deux trois trucs dans le cadre là ? »

Dans JCVD, une scène en particulier a fait beaucoup parler. Il s’agit d’un monologue de dix minutes hors du temps en impro, durant laquelle l’acteur s’élève littéralement jusqu’à l’envers du décor, et dévoile le hors champ du film et de sa vie. La séquence est née de discussions thérapeutiques entre Mabrouk El Mechri et Van Damme quelques jours avant le début du tournage du film.

Voyant son acteur en pleine crise existentielle, le réalisateur a une idée et offre alors à sa star un moment suspendu face à la caméra, sur un plateau déserté où Van Damme se livre comme jamais. Pour la première fois, il ose porter le fardeau de ses échecs et avoue les erreurs qui l’ont empêché de devenir un grand comme les autres, notamment ses problèmes avec la drogue. Cette scène pousse la presse cinéma, habituellement hostile à Van Damme, à l’imaginer carrément être nommé pour un prix d’interprétation. Enfin il laissait voir ses fêlures à travers un langage qui leur parle davantage que celui de la bagarre.

« Toi là-bas, t’es abonné à Ecran Large ? »

Il y a pourtant une autre scène encore plus forte plus tôt dans le film, qui elle reste plus solidement ancrée dans la diégèse et qui elle est la preuve définitive de ce qui sépare Van Damme du reste des action stars hollywoodiennes.

Alors que son personnage est à la Banque Postale et qu’il ne sait pas qu’un braquage est en cours, il craque lorsqu’on lui annonce qu’il ne pourra pas transférer d’argent comme il le souhaite. Il interprète alors la pire version de lui-même, celle qu’on a malheureusement trop vue sur les plateaux télévisés, et devient colérique et irascible… Avant de réaliser que quelque chose ne tourne pas rond. Il pense alors qu’il s’agit d’une caméra cachée, et ce faisant regarde directement dans l’objectif en pointant du doigt en direction du spectateur.

Ce faisant Van Damme continue de maintenir le flou persistent entre la fiction et le réel, et se montre conscient de tous ses défauts. Une star de cinéma touchante d’humanité, pour un résultat résolument unique dans l’histoire du cinéma populaire. Il n’aura jamais eu son Terminator ou son Rocky, mais jusqu’au bout Van Damme restera Van Damme.

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Ethan

On peut aussi dire que keanu reeves est Jack traven de speed. A quand la suite de Speed avec Jack?

Jcvd dans double impact et coups pour coups là aussi 2 rôles cultes les jumeaux Chad et Alex et le détective burke

des-feves-aux-beurres-et-un-excellent-chianti

Ç aurait carrément pu être un excellent film voir culte .juste un bon film , maladroit parfois.
.
Jean Claude c est comme sly , ils auraient pu jouer souvent autre chose mais ils ont toujours servi la soupe que les spectateurs et les producteurs attendaient d eux.
Jean Claude je l’ai trouvé intéressant exemple dans Replaçant et stallone on sait que quand il veux il nous sort du copland

dutch

L’idée étais bonne, le film n’est pas bon à mon sens malgré la bonne prestation de Van Damme.