Zack Snyder : on a classé tous ses films, du pire au meilleur (Rebel Moon, Batman, Superman…)

Par La Rédaction
17 août 2024
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zack snyder classement © Canva Warner Bros.

Quel est le meilleur (et le pire) film de Zack SnyderRebel Moon sur Netflix, Watchmen, Sucker Punch, Man of Steel, Batman v Superman, le Snyder Cut, 300… Retour sur toute la filmographie du réalisateur.

Qu’on l’aime ou pas, Zack Snyder est désormais incontournable dans le paysage hollywoodien. Révélé au début des années 2000 avec L’Armée des morts et 300, le cinéaste a gagné en popularité avec les adaptations de comics Watchmen et surtout Superman et Batman chez DC, jusqu’au désastre Justice League en 2017 (et avant le miracle industriel Zack Snyder’s Justice League alias Snyder Cut en 2021).

Embauché par Netflix, il s’est lancé dans un grand projet d’univers de SF avec Rebel Moon : Partie 1 – Enfant du feu (sorti en décembre 2023) et Rebel Moon : Partie 2 – L’Entailleuse (sorti en avril 2024), qui ont eu droit à leur tour à des versions rallongées. On a donc pris le temps de classer tous les films de Zack Snyder, du pire au meilleur.

Garantie 100% « mais mdr c’est quoi ces goûts de chiotte moi j’aime trop ce film allez vous faire cuire la nuque ».

12. REBEL MOON : DIRECTOR’S CUT

  • Sortie : 2024
  • Durée : 3h24 et 2h53 (tuez-nous)
That’s no moon

Dès ses premières annonces, le diptyque Rebel Moon a été présenté par Netflix et Zack Snyder comme une expérience particulière, qui connaîtrait deux versions distinctes. Si le réalisateur a habitué ses fans à des director’s cuts et autres versions longues, son space opera gagne une autre ampleur et un autre ton, souligné par la présence de sang et de sexe. C’est pour cette raison qu’a contrario des autres remontages de sa carrière, Rebel Moon : Director’s Cut a droit à sa place à part dans ce classement. Et s’il est tout en bas, c’est parce qu’il reflète le pire du cinéma de Snyder.

Le réalisateur s’est toujours présenté comme un visionnaire intransigeant, quitte à se planquer derrière cette posture pour excuser la beauferie adolescente de ses images au ralenti tartinées de faux sang et de seins à l’air. Mais depuis le Snyder Cut de Justice League, l’auteur a su créé un narratif arrangeant : qu’importe la structure aux fraises de ses récits, leur absence d’émotion ou leur complaisance dans la longueur, ses versions définitives sont celles qui comportent TOUTES ses scènes. En bref, Snyder ne nous offre plus des films, mais des premiers montages mal dégrossis.

Oui Zack, on a compris, tu aimes Métal Hurlant…

La chose pouvait se comprendre sur son Justice League sacrifié par Warner, mais avec Rebel Moon, on est clairement face à un argument marketing, qui ne sauve même pas l’ensemble de ses pires travers. Loin de corriger la structure très maladroite des premiers montages, ces nouvelles versions en accentuent la médiocrité, avec toujours plus de personnages qui racontent leur vie autour de feux de camp ou de tables dans des flashbacks envahissants. La première partie reste ce sous-Sept samouraïs interminable dans le recrutement de sa bande de pancartes interchangeables, et la seconde reste une grande bataille en CGI sans enjeux ni envies.

On atteint ici le stade terminal de l’auto-parodie : il n’y a plus aucune envie de spatialisation, de timing dramatique, de crescendo. Les plans existent par eux-mêmes et pour eux-mêmes, assemblés avec de nouvelles images comme si on gavait une oie de ralentis, de longues focales et de teintes sépia.

11. REBEL MOON : PARTIE 2 – L’ENTAILLEUSE

  • Sortie : 2024
  • Durée : 2h
Les sept mercemerdes

Si Rebel Moon Partie 2 : L’Entailleuse continue sur cette mauvaise lancée, c’est parce qu’il se fout encore plus de nous que le premier Rebel Moon. Après deux films, environ quatre heures et 166 millions de dollars de budget, ce sous-Star Wars et faux diptyque ressemble bel et bien à une mauvaise introduction de série, absolument pas satisfaisante puisque rien n’est exploité.

Après deux nouvelles heures de spectacle, Kora n’a toujours pas affronté son véritable adversaire Balisarius (ça aurait été dommage d’avoir un vrai enjeu émotionnel), mais a tué Atticus Noble… comme à la fin du premier. On découvre que quelqu’un qui était censé être mort ne l’est pas… comme à la fin du premier film. L’héroïne a perdu quelques copains dans la bataille, mais pas grave : ils étaient tellement bien caractérisés que pas grand-monde n’avait retenu leurs prénoms.

Sofia butez-les-tous

Avec une première heure soporifique et une deuxième consacrée aux batailles, Rebel Moon 2 rate à peu près tout, et notamment les scènes d’action qui offrent au mieux quelques maigres idées amusantes (la glissade du combat final).

Mais le film au moins le mérite d’offrir quelques moments lunaires, qui frôlent parfois le sketch des Monty Python. On hésite à donner la palme de la connerie à Ed Skrein transformé en Jésus nazi (résurrection, toge et auréole de lumière high tech), le ciné-concert de violons pendant une scène capitale, le robot James qui nous fait une Captain Marvel (débarquer à la fin du combat pour tout péter), ou les 10 minutes de flashbacks enquillés autour d’une table. Mais peut-être que tout ça est meta et malin, et qu’on est passé à côté d’un truc.

10. ARMY OF THE DEAD

  • Sortie : 2021
  • Durée : 2h28 (!)
Fantasme

Il suffit de parcourir rapidement cet article (comme le feront 90% de ses lecteurs) pour se rendre compte qu’à nos yeux, Zack Snyder est plus que capable de réaliser une bonne grosse série B de zombies. Alors, quand Netflix a annoncé lui avoir signé un chèque en blanc au lendemain de la bérézina Justice League pour un blockbuster classé R avec des hordes de morts-vivants et ce gros bourrin de Dave Bautista en tête d’affiche, l’espoir s’est immiscé dans nos cœurs de cinéphiles aigris. Espoir qui s’est transformé en impatience à la lecture du pitch : un groupe de mercenaires tente de braquer un casino de Las Vegas dominé par les cadavres ambulants.

Le coup était immanquable. Sauf que depuis Dawn of the Dead, le cinéaste a mûri et ne travaille non plus avec James Gunn mais avec Shay Hatten et Joby Harold, auteurs respectivement de John Wick 3 et du Roi Arthur : La légende d’Excalibur. Des monuments de concision et de simplicité, qui passent néanmoins pour des courts-métrages minimalistes à côté de ce Army of the Dead.

Réalité

Résultat : Snyder et ses nouveaux acolytes s’intéressent bien moins aux zombies qu’à une ribambelle de personnages développés péniblement pendant deux longues heures et demi ; et en particulier à celui de Bautista, dont le trauma familial est martelé inlassablement jusqu’à la mort cérébrale du spectateur. Le lien avec les épreuves que le cinéaste a lui-même traversées est évident, mais non seulement il ne justifie pas une écriture aussi lourdingue, mais il occulte – littéralement – le divertissement décérébré promis.

En effet, fier de se consacrer avant tout à ses personnages parmi les plus inintéressants de l’histoire du genre (un exploit en soi), il a tourné une partie d’Army of the Dead avec des objectifs très particuliers, les fameux Dream Lenses de Canon, qui saturent de flou tout ce qui est périphérique au sujet du plan. Un choix artistique particulièrement adapté à une histoire intime et onirique, telle bien sûr qu’une d’invasion de zombies à 90 millions de dollars. Ultime pied de nez aux amateurs de cinéma d’horreur : la scie circulaire longuement présentée ne découpera pas un seul membre nécrosé.

Reste le générique, qui condense en quelques minutes tout ce qu’on attendait du film : des ralentis, des gags et du sang. On vous conseille de vous arrêter là, puisque le spin-off abandonne carrément l’armée… et les morts.

9. REBEL MOON : PARTIE 1 – ENFANT DU FEU

  • Sortie : 2023
  • Durée : 2h13

Zack Snyder a imaginé Rebel Moon comme un potentiel Star Wars qu’il a essayé de vendre à Lucasfilm en 2012, pile quand Disney a racheté le studio. Pas besoin d’avoir les yeux ouverts pour s’en rendre compte tant le film est une très pâle copie de la saga spatiale de George Lucas (et donc, des 7 Samouraïs)… ce qui ne serait pas un problème si c’était écrit, réalisé et monté avec un minimum de savoir-faire.

Qu’est-il arrivé à Zack Snyder pour qu’il ponde pareil navet ? Où est passé son sens de la mise en scène dans les bastons, les poursuites, les ralentis et l’iconisation à outrance des personnages ? Pourquoi Rebel Moon manque à ce point d’envergure, que ce soit dans son récit en pilotage automatique ou ses incrustations terriblement plates ?

Premier responsable : l’affreux scénario signé Zack Snyder, Kurt Johnstad (300, Atomic Blonde) et Shay Hatten (Army of the Dead, Army of Thieves), qui compile le pire du pire. Non seulement les personnages sont basiques au possible (l’héroïne meurtrie et silencieuse, orpheline et ex-méchante, qui devient leader), mais ils ont droit à des répliques terriblement simplettes et démonstratives, voire hilarantes. Dommage pour Sofia Boutella et les autres, simplement condamnés par ce néant.

Pauvre Doo-na Bae

Les rebelles sont des archétypes ringards (l’ancien général badass, la cyborg badass, le soldat badass, etc), mais ils sont en plus recrutés en trois secondes chrono, comme des PNJ. Sans la moindre caractérisation, ils deviennent de pauvres figurants à la mine renfrognée, quasi muets, et définis uniquement par leur garde-robe digne d’un spin-off de Hunger Games. Un peu comme les grands méchants, ces nazis option fashion week intergalactique menés par Ed Skrein.

Gentils comme méchants, tout le monde est logé à la même enseigne dans ce carnaval incroyablement triste et qui fait peine à voir. Jamais spectaculaire, souvent grotesque et toujours ennuyeux, Rebel Moon s’étire sur deux interminables heures et rate à peu près tous les grands moments (le vol de Tarak à dos de machin alien, les flashbacks « émotionnels », l’affrontement final). Et en mixant tout et n’importe quoi dans les classiques de la SF, Zack Snyder semble avoir oublié ce qui comptait dans ses bons films : le spectacle, la simplicité, et la générosité. Ne reste alors que le pire : la lourdeur, la bêtise, et la pauvreté.

8. ZACK SNYDER’S JUSTICE LEAGUE

  • Sortie : 2021 (directement en VOD)
  • Durée : 4h02
La Justice League, une équipe dans toutes les mémoires

Après la débandade du Snyderverse avec l’échec de Justice League version Whedon, une armée de bots-fans a tout tenté pour faire renaître l’univers super-héroïque imaginé par Zack Snyder. Ainsi, après plusieurs années de photos floues et concept art non terminés balancés par Snyder lui-même sur Vero (la légende raconte qu’il est le seul à utiliser ce réseau social), et une horde dévouée à envahir Twitter avec le #ReleaseTheSnyderCut, Warner a finalement cédé.

On s’en souvient comme si c’était hier de l’officialisation du studio, un 20 mai 2020, veille de l’Ascension, comme un signe divin pour les fans du cinéaste. Alors que plus personne n’y croyait vraiment, le Snyder Cut a donc été confirmé et l’attente s’est démultipliée. C’est un peu moins d’un an après, en mars 2021, que cette longue version de Justice League, intitulée Zack Snyder’s Justice League, a donc été mise en ligne directement sur HBO Max (condition du studio et pandémie oblige). Et le résultat n’a fait que confirmer ce qu’on savait déjà : ce Snyder Cut n’est finalement qu’une version augmentée d’un film raté.

La meilleure scène

Cette version longue (plus de 4h rappelons-le) subit constamment les lubies de Zack Snyder et en particulier son amour des ralentis. En utilisant à outrance le procédé (10% du film est en slow motion selon les héros ayant eu le courage de calculer, soit 25 min de film), le réalisateur alourdit régulièrement les scènes d’action. Et in fine, cela réduit leur impact dans les moments opportuns, à l’image de la course de Flash dans le climax (jolie idée égratignée par le reste du film).

Pour le reste, Zack Snyder’s Justice League conserve l’humour gênant de sa version cinéma, voire en ajoute (les saucisses sérieux), se repose toujours sur des effets spéciaux d’une qualité très inégale et souffre forcément de son simple statut. Difficile de comprendre l’intérêt réel de l’épilogue post-apocalyptique ouvrant les portes d’un monde dont on sait pertinemment qu’on ne verra rien.

Alors oui, la mythologie globale du Snyderverse ressort gagnante de ce Snyder cut. La quête des Boites-mères est mieux exposée, Steppenwolf devient un ennemi à la hauteur de sa réputation, une vraie tragédie se joue sous les yeux des spectateurs et l’on imagine mieux le grand dessein super-héroïque de Zack Snyder. Mais à vrai dire, ça fait beaucoup de bruits pour pas grand-chose.

7. BATMAN V SUPERMAN

  • Sortie : 2016
  • Durée : 2h32 (version cinéma) et 3h03 (director’s cut)
Batman of steel

Préfigurant le cas Justice LeagueBatman v Superman : L’Aube de la justice est un autre film bourré de promesses trahies. En voulant zapper l’origin story ô combien remâchée de Batman, le récit s’était pourtant dégagé un temps précieux pour amener soigneusement la rivalité idéologique entre les deux héros du titre, et présenter le plan de Lex Luthor (Jesse Eisenberg) pour les faire s’affronter.

De plus, au-delà de poursuivre le traitement lyrique du dernier fils de Krypton après Man of Steel, le film introduit en contrepoint un Batman pessimiste et quasi amoral qui se rapproche de l’itération de Frank Miller (comme par hasard) dans The Dark Knight Returns. Ce basculement se traduit visuellement par ses costumes qui prennent des allures d’armures, et sa batmobile plus proche d’un char d’assaut que d’une voiture high-tech.

Malheureusement, les nombreux coups de cisailles en salle de montage ont rendu cette histoire pleine de potentiel trop imprécise et hasardeuse, diluant les motivations des personnages, faussant leur caractérisation et la compréhension des événements. De quoi avoir l’impression de déchiffrer un texte à trous.

Lex Luthor love and thunder

Certes, le film démarrait bien avec la relecture du combat de Man of Steel du point de vue de Bruce Wayne (Ben Affleck), mais les pièces du puzzle ont simplement du mal à s’imbriquer dans la version cinéma. Encore plus quand le film introduit aux forceps son futur univers étendu, en faisant entrer la Wonder Woman de Gal Gadot par la petite porte et en superposant les caméos maladroits (Flash, Aquaman, Cyborg). De fait, ce résultat bancal lié aux ambitions de DCEU correspond davantage à la vision d’un studio frileux à l’idée de brusquer le public (jurisprudence Man of Steel avec le meurtre de Zod) qu’à celle de son réalisateur, qui n’est cependant pas un titre honorifique pour Snyder. 

La version longue, qui rallonge le récit d’environ 30 minutes, a en effet permis d’éclaircir les zones d’ombre et d’apporter de la cohérence dans les plans machiavéliques de Luthor, tout en atténuant le ridicule de certaines séquences (maman Martha en tête de liste). L’affrontement entre les deux surhommes y paraît ainsi moins artificiel et mieux justifié, ce qui ferait presque pardonner le combat final apocalyptique contre Doomsday. Parce qu’entre le décor urbain grisâtre et le monstre de CGI, Lex Luthor n’était clairement pas le seul à vouloir nuire…

6. 300

  • Sortie : 2006
  • Durée : 1h57
Filmé intégralement en lumières naturelles (non)

Le film qui a popularisé le « style Snyder », tel qu’il a été loué et moqué par la suite. Encore aujourd’hui, rares sont les productions à pousser les potards à ce point, faisant presque de 300 une parodie rétroactive des tics numériques qui prenaient d’assaut le cinéma grand public américain au milieu des années 2000. Tourné principalement dans un studio tapissé de fonds bleus du sol au plafond, il multiplie les effets de style si faciles à tourner en ridicule.

Dans 300, chaque giclée de sang, chaque grain de sable et peut-être même chaque abdo de son casting masculin transpirant l’homoérotisme est reconstruit en post-production, à l’exception d’un seul et unique plan tourné en extérieur (à vous de le trouver). Une artificialité qui a très mal vielli, mais qui va au moins de pair avec la vision complètement fantasmatique de la période historique, héritée de la BD de Frank Miller, aussi bien en termes de mise en scène (les millions de ralentis) et de photographie que de narration et même de design, puisque les armées de Xercès sont littéralement monstrueuses.

Un bon gros rêve humide d’américain bourrin, où des héros eugéniques à la tête d’un état militariste utopique censé être un pilier de la société occidentale repoussent à la force de leurs quadriceps des hordes d’horribles barbares venus du Moyen-Orient. Forcément, la chose a outragé la presse et une partie de la population iranienne, en plus de discréditer le metteur en scène auprès de pas mal de gens, certains se demandant même si cette série B à 60 millions de dollars n’était pas trop grotesque pour ne pas être une satire à la Starship Troopers.

« MDR y’a zéro homoérotisme dans ce film vous pensez qu’à ça »

Des hypothèses qui seront démenties lors de la suite de sa carrière, tandis que d’une main il retournait comme une chaussette les idées de cet anarchiste d’Alan Moore et de l’autre il assumait de plus en plus sa passion pour la grande prêtresse du libéralisme sauvage Ayn Rand (dont il a considéré adapter le roman le plus connu avant d’annoncer que le contexte politique n’était pas propice à sa sortie !).

Après le succès de L’Armée des morts, 300 est le film qui a mis le feu aux poudres et qui a valu indirectement à l’équipe d’Ecran Large une salve d’insultes n’ayant rien à envier à l’impressionnante pluie de flèche dans le film.

Car oui, désormais, avec un recul amusé, 300 a quelque chose d’attachant, d’autant que tous les films qui l’ont copié n’ont jamais été aussi efficaces que lui, à part peut-être sa suite encore plus crétine, plus pixélisée et plus je-m’en-foutiste. Archi-rentre-dedans et parcouru de visions horrifiques assez marquantes, il a – en mal ou en bien – infusé l’industrie hollywoodienne les années suivantes, et pas seulement grâce à son carton au box-office.

5. SUCKER PUNCH

  • Sortie : 2011
  • Durée : 1h50
No-can-do’s-ville, baby doll

C’est le Alice aux pays des merveilles avec des mitrailleuses que Snyder voulait réaliser depuis longtemps (l’idée a germé bien avant L’Armée des morts), même si dans un premier temps, le tournage de Watchmen lui grilla la priorité. Mais c’est grâce à leur bonne entente sur la fabrication de ce dernier que Warner Bros. signa également Sucker Punch et prolongea la collaboration avec le réalisateur. Malheureusement, le destin du film ne fit pas d’étincelles, puisqu’il fit un flop au box-office, ne rapportant pas tout à fait 90 millions après en avoir coûté 82.

Un sort regrettable pour cette épopée onirique qui se veut être l’opposé du très masculin 300, et qui s’attache à dépeindre les manières dont un regard tout aussi masculin peut broyer les jeunes femmes. Pour ce faire, le film met en scène un univers d’asile psychiatrique (les débuts de la psychiatrie ayant été particulièrement cruels envers les femmes), ainsi que celui d’un cabaret exploitant ses danseuses, à travers différents niveaux de narration.

  •  On a consacré un podcast entier à Sucker Punch :

Des cadres violents mais trop souvent fantasmés comme décors d’une esthétique pornographique faite par et pour les hommes, que Snyder utilise pour renvoyer à son public le caractère malsain de ce qu’il attend d’un casting féminin. Au sommet de l’affiche trône Emily Browning et des actrices aussi douées que rares comme Abbie Cornish et Jena Malone. Face à elles, un Oscar Isaac et un Jon Hamm dégoulinants de cruauté, sans oublier Carla Gugino, de retour chez Snyder après Watchmen.

Conscient de sa responsabilité en tant que réalisateur, Snyder déjoue ici toutes les attentes en ne flattant pas les courbes de ses actrices à l’écran, préférant les chorégraphies de combat aux gros plans sur des décolletés. Si l’ensemble est numériquement kitsch au possible, et brouille plus que jamais la frontière entre cinéma et (vieux) jeu vidéo, l’intention du film est belle et bien exécutée.

Ceci est un doigt d’honneur

Sucker Punch est sans doute le film le plus incompris de la carrière de Snyder, qui tint tout de même à dévoiler une version longue de 2h07. Interrogé environ mille fois sur l’échec du film, le réalisateur avait bien résumé son intention à la sortie : « Les filles sont dans un bordel où elles font un show pour les hommes dans le noir. Dans les scènes de fantaisie, les hommes dans le noir, c’est nous. Les hommes dans le noir, en gros c’est moi : des gosses ringards fans de SF. » 

En 2019, chez CinemaDebate, il en remettait une couche : « Je suis toujours choqué de voir que le film a été à ce point incompris. J’ai toujours dit que c’était un commentaire sur le sexisme et la culture geek. Quand on me demandait, ‘Pourquoi t’as filmé comme ça les filles ?’, je répondais, ‘C’est toi qui as fait ça !’. Sucker Punch est un doigt d’honneur à beaucoup de gens qui vont aller le voir ».

4. MAN OF STEEL

  • Sortie : 2013
  • Durée : 2h23
Note : ne pas laver son super-costume à 60°

En 2013, soit un an après le final de la trilogie Dark Knight, voir Zack Snyder s’associer à Christopher Nolan pour redéfinir Superman avait tout du fantasme ultime pour les geeks du monde entier. Au final, on pourra reprocher à Man of Steel d’avoir surtout entamé un DCEU inconstant dans sa direction artistique et narrative. Pourtant, à la revoyure, Snyder a eu le mérite de poser des bases solides pour sa peinture très délavée et mélancolique du fils de Krypton. De son introduction apocalyptique aux élans malickiens qui s’ensuivent, le cinéaste quitte (un peu) la pachydermie de ses ralentis abusifs et de ses plans-tableaux pour une mise en scène plus vive, plus à l’épaule, et donc plus à l’os.

Sans avoir le filet de sécurité d’un comics précis dont il pourrait repiquer les cases, le cinéaste s’attèle à capter la pure sensitivité de son héros en quête de sens dans un monde qui n’est pas le sien. C’est dans ces moments que Man of Steel brille le plus. Avec les envolées lyriques de Hans Zimmer et cette caméra qui peine à suivre la vitesse supersonique du héros, Superman est redéfini en tant que mythe par le point de vue que les humains portent sur lui. Et c’est vraiment galvanisant.

Vous reprendrez bien une petite louche de HR Giger dans votre film de SF ?

Même si Snyder se perd comme d’habitude dans ses sous-intrigues (pauvre Loïs Lane), son introduction dans le monde de DC sait façonner l’émotion, que ce soit aux côtés de la famille Kent ou du désespoir du général Zod. Dès lors, le réalisateur sidère par la pesanteur de cet univers, où la mort rôde jusqu’à ensevelir Superman sous un amoncellement de crânes. Sans avoir besoin de la menace totale de Darkseid, Zack Snyder a su faire de son blockbuster super-héroïque une oeuvre hantée par la fin des civilisations.

D’aucuns ont pu attaquer l’artiste sur le destruction porn outrancier de la deuxième heure, mais Man of Steel a clairement contribué à l’exorcisme d’une certaine imagerie traumatique du XXIe siècle (le 11 septembre), sans pour autant perdre de vue un spectacle engageant, parsemé d’images choc (cette vision d’un avion de chasse détruit des mains d’un Kryptonien). Dommage que cette efficacité soit parasitée par des métaphores christiques pas bien finaudes, et une rationalisation agaçante de sa mythologie DC (le S qui signifie l’espoir, pitié…).

3. WATCHMEN

  • Sortie : 2009
  • Durée : 2h42 (version cinéma), 3h06 (version direction cut), 3h25 (version Ultimate Cut)
Who watches the Watchmen ?

Oui, Alan Moore méprise ce film. Oui, plein de fans du roman graphique Watchmen détestent cette adaptation qui n’aurait rien compris, et qui a osé éjecter le poulpe géant interdimensionnel à la fin. Mais une fois accepté que c’est bien une adaptation, le Watchmen réalisé par Zack Snyder (et écrit par Alex Hayter et Alex Tse) peut être apprécié comme un objet à part entière ; et une réussite éclatante, d’une beauté sensationnelle.

Le film a beaucoup été réduit à une transposition flemmarde et facile des cases du comics, mais c’est oublier tous les choix de Zack Snyder. La musique, le montage et le mouvement (oui, les ralentis) sont autant d’outils cinématographiques qu’il utilise pour donner vie à cet univers, à sa manière. Du générique de cinq minutes sur Bob Dylan à la parenthèse Docteur Manhattan sur du Philip Glass, en passant par la photo de Larry Fond et les effets visuels de Sony Pictures Imageworks (derrière les trilogies Spider-Man de Sam Raimi et Matrix des Wachowski), Watchmen est d’une richesse immense.

Le talent de Patrick Wilson, Malin Akerman, Jackie Earle Haley, Billy Crudup, Matthew Goode, Carla Gugino et Jeffrey Dean Morgan y est pour beaucoup, apportant toute l’émotion nécessaire dans ce blockbuster.

Réécouter Pruit Igoes and Prophecies de Philip Glass

Et derrière la beauté, il y a le principal : toute la portée politique et philosophique d’un grand récit vertigineux autour de l’Amérique, de la figure du super-héros, du sens de la violence et du prix de la (sur)vie. Là encore, Zack Snyder s’est approprié le travail d’Alan Moore, pour le meilleur et pour le pire selon les points de vue. Mais n’est-ce pas exactement ce qu’il fallait faire avec une telle œuvre intemporelle, pour qu’elle reflète autre chose du monde, comme le fera par la suite Damon Lindelof avec la série Watchmen ?

Enfin, cerise sur le fascinant gâteau : ce Watchmen est une anomalie dans le système. 130 millions de dollars de budget pour un film Rated R (interdit aux moins de 17 ans non accompagnés), de 2h42 (version cinéma), sans super-héros archi-connu de type Batman ou Superman, ni acteur ou actrice populaire. Sans grande surprise, Watchmen s’est vautré en salles, avec seulement 185 millions au box-office. Une fin bien amère pour ce projet qui avait traîné et fait rêver durant des années (Terry Gilliam, Darren Aronofsky, Paul Greengrass et plusieurs studios s’y sont cassés les dents).

Néanmoins, on sait bien que plein de gens détestent le film Watchmen, que ce soit pour la manière dont Rorschach est écrit, pour la scène de sexe sur Hallelujah de Leonard Cohen, et globalement tout ce qu’a fait Zack Snyder (les libertés mais aussi la fidélité vis-à-vis du comics, le discours politique, etc). En tout cas, Christopher Nolan (qui a produit Man of Steel en 2013) validait le film, dans The Hollywood Reporter en 2023 : « J’ai toujours pensé que Watchmen était en avance sur son temps. L’idée d’une équipe de super-héros, qui est brillamment subvertie, n’était pas encore un truc dans les films. Ça aurait été fascinant de le voir sortir post-Avengers ».

2. LE ROYAUME DE GA’HOOLE

  • Sortie : 2010
  • Durée : 1h39 
Une histoire de chouettes saupoudrée de nazisme

Le Royaume de Ga’Hoole – la légende des gardiens a tout de l’OVNI dans la filmographie de Zack Snyder. En même temps, le film s’éloigne effectivement de tout ce qu’a pu faire le cinéaste avant ou par la suite. Après les morts-vivants, les spartiates de Frank Miller et les super-héros glauques d’Alan Moore, le fidèle partisan du R-rated cruel et sanguinolent s’est essayé pour la première (et dernière) fois au film d’animation « pour enfants » avec un classement PG adapté à tous les publics.

Mais le cinéaste a beau avoir voulu faire plaisir à ses propres enfants en adaptant une série littéraire jeunesse de Kathryn Lasky, il n’a pas pu s’empêcher de faire un pas de côté par rapport au récit édulcoré auquel on aurait logiquement pu s’attendre. Sous le duvet attendrissant des protagonistes, on reconnaît aisément la patte acérée du réalisateur qui invoque autant les horreurs du Troisième Reich que l’imagerie épique du péplum dans cette quête initiatique de chouettes qui parlent.

En dépit du parcours cousu de fil blanc du héros, le film n’est donc pas candide ou mignonnet. Il parle de guerre, de « Sang Pur », d’oisillons réduits à l’esclavage, de fratricide, d’endoctrinement idéologique et de politique totalitaire, tout en troquant ses habituelles effusions de sang contre des effusions de plumes qui traduisent la même violence dans les affrontements. De façon plus approfondie, le scénario confronte les mythes et légendes à la réalité pour déconstruire l’héroïsme et tous les fantasmes qui gravitent autour.

Oui, le style outrancier de Snyder colle très bien à l’animation

Enfin, en reprenant les tics de réalisation de Snyder (en particulier son goût prononcé pour les ralentis), le film arbore à plusieurs moments une esthétique picturale qui s’approche de ce que pourraient proposer des planches de comics. Le fait de suspendre ou de figer le temps permet également de rendre l’action plus lisible et surtout d’apprécier le travail impressionnant d’Animal Logic (Happy Feet, Le Seigneur des Anneaux), notamment sur les plumages et battements d’ailes.

Malheureusement, le film est déséquilibré et donne l’impression de tirer à côté de sa cible en étant trop sombre pour les enfants, mais déjà trop convenu pour les autres. Les thématiques sont quant à elles bien trop nombreuses pour être pleinement développées et nuancées, tandis que certaines ruptures de ton sont presque aberrantes. Le meilleur exemple reste cette séquence de vol légère et enfantine sur une musique pop (le morceau To the Sky de Owl City, vous l’avez ?) qui succède à une scène particulièrement dramatique.

C’est peut-être ce qui explique le bide du Royaume de Ga’Hoole, qui s’est contenté de 140 millions au box-office mondial pour un budget officiel de 80 millions.

1. L’ARMÉE DES MORTS

  • Sortie : 2004
  • Durée : 1h41
Cran de sécurité

À l’époque, personne ne misait un kopek sur le remake de l’un des plus grands chefs-d’œuvre de George A. Romero, écrit par le scénariste de Scooby-Doo et réalisé par un illustre inconnu venu de la pub. C’était ignorer que le premier sortait de l’écurie Troma et que le second avait l’intention de se saisir de cette opportunité pour en soigner chaque plan afin de faire son trou, déjà, dans l’industrie hollywoodienne.

Dès la scène d’ouverture, les doutes étaient dissipés. Plutôt que de copier les mythiques premières minutes de ZombieL’Armée des morts raconte le début de l’apocalypse zombie d’un autre point de vue, celui d’une banlieue américaine typique, bientôt en proie au chaos. Au détour d’un panoramique impressionnant, puis d’un plan aérien captant l’embrasement fulgurant de ce prétendu havre de paix souillé par une adorable petite tête blonde, Snyder offre la fin du monde sur un plateau (et non sans tacher les draps).

On a souvent attribué l’efficacité de ce remake à son orientation vers l’action voulue par Gunn, ainsi qu’à ses idées les plus craspec, tel ce bébé zombie tout droit sorti du cinéma bis bien méchant (clairement un gros morceau de la culture de l’auteur). Et il est vrai qu’il reste encore aujourd’hui un film d’horreur aussi généreux que gore, contenant quelques séquences assez éprouvantes, plusieurs mises à mort bien sales et surtout des hordes de zombies bien différentes des figures errantes de Romero.

Et avec l’excellente Sarah Polley

Dans le sillage de 28 jours plus tard, il apporte sa pierre à l’édifice du zombie sprinter, et assume le virage esthétique que ce choix implique. En transformant leurs morts-vivants en monstres enragés, les deux artistes s’inscrivent dans une évolution du cinéma d’horreur, que beaucoup ont relié au traumatisme du 11 septembre, lequel a persuadé une population entière qu’elle n’était plus à l’abri nulle part. La mise en scène embrasse le rythme infernal imposé par ces antagonistes enragés, s’attardant par exemple sur les kilos de munitions nécessaires à les dessouder.

Mais outre ces partis-pris frénétiques, qui donnent une énergie incroyable au film, ou les quelques pointes d’acidité politiques rarement mentionnées, L’Armée des morts est surtout la preuve qu’il est possible de faire transparaître un style dans un carcan aussi cadenassé que celui du remake. Un bel exploit qui annonçait une sacrée carrière pour James Gunn… et bien sûr pour Zack Snyder.

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Commentaires
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cidjay

hey ! on a quasiment le même top !
même si je mets 300 avant Suckerpunch.

morcar

Je n’ai jamais vu un seul bon film de Snyder, mais parmi toutes ces purges, le premier Rebel Moon est celui qui m’a le plus plu. Après avoir vu sa suite, il s’est avéré que ce projet était en fait totalement foireux aussi.
J’avais décidé d’arrêter de voir les films de Snyder après BvS (un des rares films qui m’a fait sortir du cinéma furieux d’avoir payé une place), puis j’ai quand même regardé sa Justice League que j’ai du voir en deux fois tant c’était une purge.
Cette fois-ci on ne m’y reprendra plus. Plus jamais je ne perdrai une seconde devant un film de ce tâcheron.

Rez

Si on peut encore à peu près sauver 300 (pour le coté adaptation case par case du comic, feignante mais divertissante à l’époque), Watchmen (une autre époque pour les films de super héros), l’Armée des morts (le premier long quand on est pas encore dans cette bouillie visuelle de le style Snyder est devenue) et Sucker Punch (pour le cote un peu w*f), le reste c’est même pas poubelle jaune c’est direct dans le composteur !

Mais bon le meilleur Snyder (si tant est que ce mec soit capable de faire quelque chose de bon) ça vaut même pas un direct to dvd moyen de Bruce Willis en fin de carrière ou de Steven Seagal

Snyder c’est probablement la plus grosse arnaque du cinéma américain des 30 dernières années, c’est débile et moche il y a pas d’autres mots :/

Marvelleux

Je rejoins le commentaire de djFab

DjFab

Man of Steel et Batman V Superman Version Longue sont les meilleurs pour moi, je dirais même les meilleurs films de super-héros !

zakmack

Ce qui est pas mal de votre classement, c’est qu’il peut se lire dans les 2 sens ! Franchement en revoyant tous les films de ce bon vieux Zack, il n’y a pas grand-chose à sauver à part watchmen. L’armée des morts je ne l’ai pas revu, mais vider zombie de son contenu politique m’avait bien énervé à l’époque. Reste 300, que je n’ai jamais vu. Mais bon, m’étant tapé tout son foirage sur l’ univers DC et le Rebel Moon 1 et 2 (oui parce que je suis masochiste et que Zack fait des films sur des thèmes que j’aime bien 😂) je vais m’arrêter là pour l’instant, jusqu’à mon prochain besoin de souffrance !

dutch

Un bon résumé de la carrière de ce tâcheron …

« Après le succès de L’Armée des morts, 300 est le film qui a mis le feu aux poudres et qui a valu indirectement à l’équipe d’Ecran Large une salve d’insultes n’ayant rien à envier à l’impressionnante pluie de flèche dans le film. »

J’ai ri. Pour moi 300 c’est assez réjouissant dans le sens ou le film ne pète pas plus haut que son cul, et que c’est un spectacle débile bourrin assumé.

michelcollard

Pas d’accord avec votre classement.
Dans les 1er j’aurais mis batman vs superman, justice league, 300, suker punch pas vraiment apprécié.
Rebel moon je n’ai vu que le 1er qui était…passable.
L’armée des morts était bien.
Par contre watchmen….je l’ai vu une fois .
Je n’est pas vu ….le royaume ga….

SebSeb

Man of Steel puis Watchmen.

mikelion

Watchmen (the film), sucker punch et à un degré moindre 300 (pour c que c’était à l’époque).