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Wonder Woman 1984 : gros désastre confirmé pour le business de Warner ?

Par Geoffrey Crété
10 avril 2021
MAJ : 13 avril 2021
27 commentaires
Affiche étrangère

Sortie ciné annulée, passage sur HBO Max, piratage massif… Wonder Woman 1984 a eu un destin plus compliqué que prévu. Mais à quel point ?

Dans une dimension parallèle, Wonder Woman 1984 est sorti en juin 2020, pour égaler voire surpasser le succès du premier Wonder Woman (plus de 822 millions en salles). Voire même rejoindre Aquaman et son milliard au box-office, pour mener le business DC chez Warner Bros..

Mais dans la dimension Covid, le destin de l’Amazone a été tout autre. Repoussé plusieurs fois, le film réalisé par Patty Jenkins a finalement été le premier pas de la nouvelle stratégie du studio, entre guerre du streaming et pandémie : il a donc eu droit à une sortie simultanée en salles et sur la plateforme HBO Max aux États-Unis (où il est resté disponible pendant un mois).

En France, c’est encore une autre histoire. Bloqué dans les limbes depuis la re-fermeture (ou plutôt non-réouverture) des salles en décembre, WW1984 a finalement été rétrogradé en VOD, DVD et Blu-ray, avec à peu près zéro communication officielle côté Warner. Entre les deux : trois longs mois d’attente, interrogations et téléchargements illégaux, qui ont émoussé la valeur du blockbuster. Entre une carrière cinéma forcément limitée, et une exploitation en SVOD ou vidéo plus obscure, WW1984 a-t-il été un échec ?

 

 

NOTE SALÉE

200 millions de dollars hors promo : c’est plus que le premier Wonder Woman (dans les 150 millions). C’est un budget normal pour les films DC récents, entre Suicide Squad (175 millions) et Batman v Superman : L’Aube de la justice (plus de 250 millions), même si c’est loin des super-superproductions comme Avengers : Endgame (plus de 300-350 millions).

Le destin de Wonder Woman 1984 dans les salles de cinéma a beau avoir été compliqué, voire annulé, la machine marketing était déjà lancée. La sortie en juin 2020 a été repoussée deux mois avant, si bien que beaucoup d’argent avait déjà été dépensé en promo. La première bande-annonce était sortie en décembre 2019, pour officiellement lancer le cirque.

En règle générale, le marketing de blockbuster monte vite jusqu’à 100-150 millions. Deadline estimait ce budget promo à environ 160 millions pour le premier film. La suite allait forcément dépenser autant, voire plus. Malgré des pauses, des économies imposées par la pandémie (pas de tapis rouge et voyages à travers le monde avec les acteurs), et finalement une sortie sur HBO Max (avec un marketing très différent donc), la période promo s’est étirée sur tellement de mois que la note a dû être salée.

 

photo, Gal Gadot, Kristen WiigWarner vs coronavirus

 

La question du merchandising est ici intéressante. Sur un blockbuster, quantité de babioles sont sorties dans le cadre de partenariats avec des marques. Leur sortie est coordonnée avec celle du film, pour créer un événement et accessoirement conserver certaines surprises, notamment sur le design des personnages. La pandémie a légèrement compliqué l’affaire pour WW1984, puisque reprogrammer ou renégocier de telles opérations peut être impossible, ou coûter cher. Mattel a donc mis en vente des poupées (notamment de Cheetah) en août 2020, lorsque le film devait finalement sortir… sauf que non.

Y a-t-il eu des retombées financières directes pour Warner ? Les exemples de Mourir peut attendre et Minions 2 : Il était une fois Gru ont prouvé que c’était possible. La rumeur dit que James Bond devait retourner des scènes, car les objets mis en avant par des marques partenaires n’étaient plus des dernières collections – et vu que le film censé sortir en avril 2020, et sortira a priori en septembre 2021, il y a effectivement une marge. Le film d’animation, lui, a eu un problème avec le merchandising destiné à McDonald’s, déjà prêt lorsque la sortie a été repoussée d’un an. Difficile donc de ne pas imaginer un impact financier en marge du budget de WW1984.

 photo, Gal GadotDommage pour le Happy Meal option carton doré

 

LA FEMME QUI VISAIT UN MILLIARD

Évidemment, ça fait mal : 166 millions de dollars encaissés au box-office. C’est naturellement incomparable, mais peu importe, comparons avec les récents films DC : 1,1 milliard pour Aquaman, 872 millions pour BvS, 818 millions pour le premier Wonder Woman. Même Birds of Prey et la fantabuleuse histoire de Harley Quinn, qui a été un échec financier, avait franchi la barre des 200 millions.

Le coup d’envoi majeur a bien sûr eu lieu aux États-Unis, avec une sortie le 25 décembre sur environ 2000 écrans – deux fois moins que le premier, normal vu que plus de 65% des salles étaient fermées pour cause de pandémie. Le démarrage proche des 17 millions a dépassé les estimations très prudentes, mais ça n’a pas duré. La chute de fréquentation a été importante, si bien que la petite carrière du film était quasi terminée au bout d’un mois. Bilan : 46 millions au box-office domestique, c’est-à-dire le territoire le plus important pour les studios américains.

À titre de comparaison, Godzilla vs. Kong a déjà dépassé ce chiffre dès sa sortie. En revanche, Monster Hunter s’est contenté de 15 millions, sur la même période.

 

photo, Gal Gadot« Chute, blâme la pandémie »

 

Sorti dans une trentaine d’autres pays en décembre, WW1984 n’a pas décollé. Les estimations à 60 millions étaient tellement ambitieuses qu’elles ont vite été revues à la baisse, et le film n’a finalement pas dépassé les 38 millions.

La Chine, devenu un territoire majeur pour les blockbusters, a là encore été une déception. Environ 30% des salles étaient encore fermées, et même les producteurs locaux en ont souffert, mais WW94 a connu une chute spectaculaire dès la deuxième semaine. Le succès d’autres films (chinois) comme Dream of Eternity et Shock Wave 2 a confirmé que c’était aussi et surtout un rejet de l’Amazone. Bilan : seulement 25 millions au total, contre 90 pour le premier.

 

photoPuisqu’on vous dit que vous ne passez pas les douanes

 

HBO MAX, ABO MAX

Avertissement : les chiffres SVoD sont fumeux, et bien gardés par les studios. Contrairement aux données du box-office, impossible d’affirmer quoi que ce soit puisque tout est ici basé sur des estimations extérieures, avec des critères de comptable douteux (regarder quelques minutes suffit). Tout ça est donc d’abord une question de communication pour les studios.

Dès le premier week-end, Warner célébrait donc sans surprise un succès : « Wonder Woman 1984 a battu des records et a dépassé nos attentes sur tous nos publics et abonnés durant les premières 24 heures, et l’intérêt et l’excitation que nous voyons indiquent que ça devrait continuer bien au-delà de ce premier week-end ».

HBO Max disait avoir vu le nombre d’heures de visionnage triplé le jour de la sortie, comparé à un jour classique. The Hollywood Reporter écrivait que la moitié des abonnés avait vu WW1984 (soit environ 8-9 millions, puisque HBO comptait 17,2 millions d’abonnés fin décembre), en plus du public ayant accès au service via des services partenaires (là encore, aucun chiffre).

 

photo, Gal Gadot, Chris PineOpération poudre aux yeux sur les chiffres

 

C’est là qu’entrent en jeu des sociétés extérieures, spécialisées dans l’analyse et la récolte de données. Débute alors la foire aux estimations, parfois contradictoires et sur différents critères parfois absurdes.

L’institut Nielsen (spécialisé dans la TV, et qui exclut donc les téléphones par exemple) a compté en minutes regardées, et parlait de 2,25 milliards de minutes visionnées, soit l’équivalent de 15 millions de fois le film en enter. Ce qui plaçait WW1984 devant Soul, le Pixar sorti sur Disney+ en décembre, et Minuit dans l’univers arrivé sur Netflix.

Et le nombre d’abonnés alors ? WarnerMedia a insisté sur la réussite de cette sortie, qui a permis de booster les abonnements. Mais là encore, sans donner de chiffres très précis. Néanmoins, Bloomberg a sorti ses données et analyses : l’application HBO Max aurait été téléchargée 554 000 fois le week-end de la sortie de WW984, ce qui est loin derrière les 2,3 millions de téléchargement de Disney+ pour Soul.

En somme : personne ne sait réellement, à part Warner, qui se contente de vaguement célébrer, comme ses concurrents sur le secteur SVoD. Mais nul doute que WW1984 a attiré l’attention, et ressemblait à un éventuel cadeau de Noël.

 

photo, Chris Pine, Gal GadotLe super-pouvoir du bullshit dans la compta

 

VIDEO KILLS THE WONDER STAR

En France, Wonder Woman 1984 est sorti le 31 mars en VOD, et le 7 avril en DVD et Blu-ray. Difficile d’imaginer que ce sera une digne rentrée d’argent pour Warner Bros., vu que le secteur de la vidéo se casse la gueule (-68% entre 2008 et 2018 selon le CNC).

Pour avoir des points de comparaison, jetons un oeil à des cartons en vidéo, en France. Selon le classement de JPBoxoffice, le premier Taken avait encaissé plus de 64 millions de dollars en DVD chez nous, et Taken 2, plus de 18 millions de Blu-ray.

Toujours en DVD et Blu-ray, le premier Avengers, c’était plus de 212 millions dans le monde ; le premier Wonder Woman, environ 100 millions. Autant dire que WW1984 ne peut pas rêver de beaucoup pour contrebalancer le terne box-office. D’autant que les super-héros sont rarement parmi les plus grosses ventes vidéo en France, comparé à des Disney, de grosses comédies populaires, ou des phénomènes comme Le Seigneur des anneaux et Avatar.

Dernière chose : le facteur téléchargement illégal, puisque le film est disponible illégalement depuis décembre. Trois bons mois de tentation (soit un temps et décalage anormal pour un tel film) ont donc très certainement freiné la carrière vidéo du blockbuster. On en parle dans la vidéo en début d’article pour info.

 

photo, Gal GadotRegarde mon édition collector dorée

 

WONDER FOUT-MAL

Selon Deadline, Warner avait empoché plus de 250 millions sur la sortie cinéma du premier Wonder Woman, entre un budget total de 400 millions (budget de production, marketing et compagnie), et un box-office de 821 millions (dont une partie revient aux exploitants).

Toujours selon Deadline, WW1984 devait atteindre les 500 millions pour être rentable. Avec moins de 170 millions au box-office mondial, c’est donc loin du compte. Sur l’exploitation salles, le studio a pu récupérer à peine 60-70 millions, à vue de nez. Warner Bros. a forcément perdu de l’argent sur le film, la question est juste de savoir combien. Et à quel point la SVOD a sauvé les meubles, réellement.

Mais impossible de ne pas voir la situation plus globale : Wonder Woman 1984 a servi un plus grand dessein, car la priorité de Warner Bros. est bien d’investir le secteur de la SVoD. C’était peut-être un sacrifice, mais un sacrifice inévitable, puisque repousser encore une fois le film ne pouvait que le desservir, voire le poser en possible concurrent de Godzilla vs. Kong. C’était également un sacrifice utile, afin de se positionner face à Disney, et tirer de premières leçons en la matière. HBO Max manquait cruellement de contenus identifiés et forts (Raised by Wolves, Love Life et autres n’ont pas vraiment attiré l’attention), et un blockbuster de super-héroïne était le joker ultime.

 

photoRendez-vous dans le 3e hein

 

Le film réalisé par Patty Jenkins était un premier grand pas, et le coup d’envoi d’une grande stratégie pour les blockbusters Warner de 2021, qui seront exploités entre les salles de cinéma et HBO Max. Godzilla vs. Kong, Conjuring 3 : Sous l’emprise du diable, Mortal Kombat et compagnie avaient tous été mis dans ce même sac mi-ciné mi-SVoD, au plus dam de réalisateurs comme Denis Villeneuve et Christopher Nolan.

À quel point le public (américain) est prêt à s’abonner à HBO Max (14,99$ par mois) pour se payer une tranche de gros film dans son salon ? Est-ce que le démarrage de Godzilla vs. Kong, qui a marqué un record en temps de pandémie, va changer la donne, comme évoqué par Warner ? Wonder Woman a peut-être perdu la première manche, mais on le sait, la guerre du streaming commence à peine. À voir qui sera encore debout et vaillant lorsque Wonder Woman 3 arrivera.

Retrouvez notre critique de WW1984 par ici. Et le dossier complet sur les réussites et ratés du film, c’est par là.

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Vomir, naufrage, naufrage affligeant, nul, naze, crotte, bouse, daube, infâme …

Chris11

Un jeu d’acteurs digne des feux de l’amour, une morale d’une niaiserie à faire vomir les créateurs de Joséphine Ange Gardien, autant d’action que dans Derrick, et le tout a un air furieux de (mauvais) téléfilm de noel. Mais avec le budget d’un blockbuster.

Miglou FTA

Bon bon je viens de voir WW84 et sans surprise c’est bien sympa sans prétention et très distrayant
Et sans surprise non plus un doigt à la bande habituelle de rageur de haineux et de daubeurs à la petite semaine qui propagent le quolibet à 3 balles le mépris à 2 sous et la débilité gratos pour tous

Sergent Hartman

Comment est il possible de sortir un étron pareil, comment des responsable ont ils put valider ce truc, en un mot, de toute ma vie de spectateur, j’ai rarement vu un truc aussi mauvais, même la beauté éclatante de la divine Gal Gadot ne sauve pas le film du naufrage, écris avec les pieds, réalisé avec un casque à l’envers sur la tête tellement c’est moche et creux, et cette armure à plume achève le tout, A 200 mill le film c’est surement la crotte la plus chère de l’histoire.

Fr3d3ricK

Rien d’étonnant vue la qualité du film. Pour reprendre un terme de l’époque: Un nanar affligeant! Pire que les séries Z des années 80 qui au moins étaient sympas à regarder (au 3 ou 4ème degré tout du moins…).
Vraiment dommage car les années 80 permettaient de faire un film flashy, fun et décalé par rapport aux autres productions super-héroïques standardisées, comme le laissaient penser les affiches et le merchandising.
Et pourquoi plus de 2 heures de film?
L’histoire aurait pû tenir dans un film d’1h15.!!

Baballe

Mais ou est Kathryn Bigelow ? Rendez nous les démineurs les point break. Jenkins est nul et rien a voir avec son genre.

Laurent

On pourra trouver toutes les excuses au film : pandémie, piratage, mauvais timing, etc, il n’en demeure pas moins que le film est nul.
Les acteurs font pitié, l’histoire est naze, les personnages sont vides, aucune profondeur.
Pour moi, tout est à jeter dans ce film.
Pauvre WW, elle mérite mieux que ça !

major fatal

Rien que le 1er c’était nul. Comment ça peut marcher ce genre de « truc »?

Brad eastwood

Quand j’ai vu ce film, j’ai presque eu envie de réhabiliter Thor 2 et Iron Man 2, voir Green Lantern, tellement WW84 était mauvais.

prof west

ww84 bide daube bouse confirmé oui