Alors qu’on attendait des Tuche 4 d’être un nouveau triomphe retentissant, le film a connu un succès plutôt tiède. Pourquoi les Tuche n’ont-ils plus la frite ?
Les Tuche, sous l’égide d’Olivier Baroux, c’est un peu l’archétype de la « comédie française » qu’on aime détester (parfois avec une mauvaise foi exemplaire) pour son caractère de vaudeville ou de théâtre de boulevard de mauvais goût. Ce caractère facile sculpté par et pour la télévision, la franchise en hérite parce qu’elle est aussi largement destinée à enrichir une grille de programmation. Pourquoi ?
Depuis 1984, les chaînes de télévision ont l’obligation d’investir dans le cinéma et sont taxées d’une partie de leur chiffre d’affaires dès lors qu’elles diffusent plus d’un certain nombre de films par an, afin de ne pas générer un effet prédateur de ces dernières vis-à-vis du septième art.
Ayant le devoir d’investir dans la production de films, les chaînes de télévision peuvent en tirer un autre bénéfice, par exemple grâce aux revenus publicitaires générés lors des passages à l’antenne de ces derniers, bien après leur passage en salles. Bref, s’il y a autant de comédies au sein du cinéma français, c’est aussi parce que la télévision s’investit dans la production de contenus qu’elle peut ensuite programmer sur ses ondes.
Les aventures de la famille habitant à Bouzolles sont pourtant l’une des seules franchises qui ont été capables de dupliquer des performances exceptionnelles d’un film à l’autre au box-office en salles, chose qu’on avait assez peu vu (en dehors de Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu) depuis les époques des Bronzés, des films Astérix et Obélix, ou encore de Taxi.
Sauf qu’en décembre 2021, et alors qu’on attendait un nouveau record de recettes pour Les Tuche 4, le film a obtenu des résultats plutôt mitigés. L’occasion de faire le point sur cette franchise qui en une décennie seulement est devenue une part intégrante du paysage cinématographique des Français avant de (peut-être ?) tomber en disgrâce.
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Des chiffres, des chiffres !
Le 4e opus des Tuche et son budget de 17 millions d’euros ont conquis 2,4 millions de spectateurs en France. Un excellent chiffre dans l’absolu, qui permet d’ailleurs au film d’être le septième plus vu de l’année 2021 dans l’Hexagone, et deuxième film français derrière le très attendu Kaamelott – Premier volet.
Il réalise 50% d’entrées de plus que Les Bodin’s en Thaïlande (un cador du genre qui a très bien performé) ou le succès commercial Venom 2. Certes, ce n’est pas au niveau des plus gros cartons de la comédie française, à l’instar d’un Intouchables (19,2 millions de spectateurs) ou d’un Bienvenue chez les Ch’tis (20,3 millions), mais cela reste le très haut du panier du genre.
En apparence, c’est donc un carton presque plein pour ce quatrième opus de la famille la plus improbable de France. Sauf qu’en élargissant le spectre aux autres opus de la franchise, il n’en est rien. Le premier Tuche avait coûté un peu moins de 11 millions d’euros, et avait conquis plus de 1,5 million de spectateurs dans l’Hexagone en 2011. Pas un succès à crever le plafond, mais dans la mesure où le film était destiné à atterrir sur la grille de programmation d’une chaîne de télévision, c’était une relative bonne surprise.
Quand tu te masturbes et que t’oublies de fermer la porte à clef
Les Tuche 2 : Le Rêve américain, sorti en 2016, c’est un budget plus élevé, dépassant les 15 millions d’euros, mais aussi 4,6 millions de spectateurs en France, soit une très bonne performance. Le deuxième opus des Tuche a donc multiplié les entrées par 3 par rapport au précédent, un ratio scandaleux. Les Tuche 3 va quant à lui être le paroxysme du succès avec 13 millions de budget (soit 2 de mois que l’opus précédent), et 5,65 millions de spectateurs en France en 2018.
On pouvait alors légitimement penser que la franchise était sur les rails d’une croissance à deux chiffres, et qu’on les tenait, les Avengers français. Et s’il est difficile d’expliquer le succès plus mitigé des Tuche 4 et de ses 2,4 millions de spectateurs, on va essayer de naviguer entre les données en cette période pandémique troublée pour vous donner une explication.
« Putain, j’ai raté la départementale 4 pour aller à Buxerolles »
pas tuche au cinéma
En termes de concurrence lors de leur sortie en salles, le premier opus des Tuche a bataillé contre la conclusion de la saga Harry Potter, le deuxième face à Deadpool et l’oscarisé The Revenant et ses 3,8 millions d’entrées dans l’Hexagone, tandis que le troisième enfant de la portée a quant à lui écopé d’une sortie relativement calme, sans grande concurrence.
Si vous avez manqué un chapitre, il y a un paramètre à prendre en compte, un truc anecdotique qu’on appelle une pandémie. Et si on est certain que le contexte sanitaire a mis un sacré coup de pression à toute l’industrie du cinéma, il ne faut pas tomber dans l’excès inverse en expliquant tous les échecs au box-office en 2021 de cette façon (et Dieu sait qu’on aimerait bien parce qu’on ne se remet pas du bide de Nightmare Alley ou de West Side Story).
Une tentation désamorcée par l’étude des chiffres de la fréquentation des salles de cinéma dans l’Hexagone, rendue possible par le Centre national du cinéma et de l’image animée et son rapport habituel de fin d’année sur la fréquentation des salles. On a donc décidé de comparer les années 2021 et 2018, et aussi leur mois de décembre, afin de comprendre si Les Tuche 4 a observé une baisse de ses entrées conformément au climat en salles, ou s’il est un échec individuel.
On l’appelle Miss Kinder dans le milieu
Et si on y apprend que l’année 2021 a attiré seulement 96 millions de spectateurs contre les 200,5 millions de spectateurs qu’a connus la France en 2018, c’est aussi parce que les salles sont demeurées fermées durant de nombreux mois. Sauf que durant le seul mois de décembre 2021 (celui de la sortie des Tuche 4, donc), 20,43 millions de spectateurs se sont rués dans les salles dans l’Hexagone en 2021. Un nombre très proche de son homologue de 2018, qui était de 20,82 millions.
Sauf qu’il serait erroné de considérer qu’un nombre similaire (ou presque) de spectateurs pour décembre 2018 et décembre 2021 signifie un contexte similaire. Le 29 décembre 2021, Variety proposait comme explication pour les échecs successifs de Matrix 4, Nightmare Alley ou West Side Story, l’hypothèse que les films avec une audience mûre s’étaient collectivement plantés, car il s’agissait de la population la plus hésitante à revenir en salle avec l’arrivée du variant Omicron.
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Une hypothèse qui, finalement, pourrait aller dans le sens de nos chiffres. S’il y a une très faible variation des spectateurs dans les salles en décembre 2021 par rapport à décembre 2018, ce sont plutôt de jeunes spectateurs (pas franchement le public des Tuche), attirés par Spider-Man : No Way Home, qui réalise à lui seul plus d’un quart des entrées de décembre 2021 en étant à l’affiche seulement les deux dernières semaines du mois, qui ont franchi les portes des salles obscures.
Les spectateurs plus âgés, eux, pourraient avoir boudé les salles, soit par crainte de la pandémie, soit parce qu’ils ont perdu l’habitude d’aller au cinéma. Enfin, reste l’hypothèse selon laquelle la pandémie aurait aidé la SVoD à s’imposer comme une nouvelle habitude de consommation supplantant le cinéma pour un public occasionnel (celui qui va parfois en salles pour de grosses productions, à l’instar d’un Mourir peut attendre, mais qui n’entretient pas un lien régulier avec le visionnage de films en salles).
C’est toutefois une hypothèse malheureusement difficile à vérifier (ou plutôt, il est difficile de savoir si la SVoD est la cause, la conséquence, ou les deux, de la baisse des performances en salles de certains films).
Quand tes producteurs vont t’enguirlander parce que ton box-office n’est pas glorieux
Tuché culé
Outre le contexte de sa sortie, Les Tuche 4 pourrait avoir échoué parce que le film n’était pas à la hauteur des attentes de son public. Faute de baromètre de réception des spectateurs utilisable (tous les films de la série des Tuche se font tirer dessus à vue sur les agrégateurs de critiques, où aucun n’obtient ne serait-ce que la moyenne), on a postulé qu’il était plus pertinent de s’interroger quant à la réception commerciale en 2021 des comédies inscrites dans des franchises. Si toutes les franchises comiques s’en sortent sauf Les Tuche 4, on pourra postuler que c’est le film le problème.
Super-héros malgré lui, de Philippe Lacheau, dernière production de « la bande à Fifi » parvient par exemple à trouver 1,058 million de spectateurs à l’issue de sa deuxième semaine d’exploitation. Un score très similaire au 1,054 millions de spectateurs qui s’étaient rassemblés devant Nicky Larson et le parfum de Cupidon deux ans plus tôt.
Un résultat toutefois à nuancer puisque le sujet de son dernier film (la reprise comique du super-héros et la figure tutélaire des Avengers) est beaucoup plus porteur que le sujet de son précédent film, adapté d’un manga encore méconnu du grand public, City Hunter (qui mérite d’ailleurs sans doute plus le coup d’oeil qu’une étude des performances des Tuche 4 au cinéma, quittez cette page tout de suite).
Pour la franchise OSS 117, le constat est plus amer. Si le deuxième opus des aventures de l’agent secret français le plus empoté avait réuni près de 1,7 million de spectateurs à la fin de sa deuxième semaine d’exploitation en 2009, le très récent OSS 117 : Alerte Rouge en Afrique Noire n’est pas parvenu à atteindre le million au cours de la même durée.
Enfin, Les Vedettes, nouvelle installation comique du Palmashow réalisée par Jonathan Barré totalise près de 275 000 entrées en fin de deuxième semaine, loin des 540 000 entrées de La Folle Histoire de Max et Léon. Pour rappel, Mandibules, qui comprenait aussi le duo de comiques au premier plan était quant à lui resté à 210 000 entrées (dans un climat de très récente réouverture des salles, pour ne pas dire le jour même) pour ses deux premières semaines.
On comprend donc aisément que 2021 a été une année de vache maigre pour les comédies, malgré leur inscription dans des franchises connues et appréciées du grand public.
« Quand j’ai dit que j’avais un casier, je ne pensais pas que c’était judiciaire »
Les Tuche 4 n’est donc pas une anomalie, autant qu’il n’est pas un échec. 2021 n’a pas été une année facile pour le cinéma, où cet opus des Tuche demeure le deuxième film français de l’année, derrière le très attendu Kaamelott – Premier volet. Preuve supplémentaire que le climat n’est pas encore prospère, Gaumont a décidé de repousser de plusieurs mois la sortie de deux de ses films, Rumba la vie et J’adore ce que vous faites.
Si on a coutume de dire de la comédie qu’elle est le genre roi en France (et à raison), on ne compte plus les productions récentes qui n’ont pas touché leur public. C’est le cas, par exemple, du film Le Dindon (sorti en 2019, donc avant la pandémie), dont les 240 000 entrées ne sont pas parvenues à couvrir les 14 millions de budget (malgré la présence d’un acteur aussi bankable que Dany Boon). De quoi s’attendre, donc, à entendre à nouveau parler de la famille Tuche, qui reste un cador du genre en France.
Pour répondre à la question de l’article : j’espère, c’est tellement pourri (non je n’ai pas envie de donner d’arguments)
Je conseil à Apple Tv+ d’en acheter les droits pour un remake avec de vrais décérébrés de préférence pour faire bien inclusif et maximiser ainsi ses chances pour la prochaine campagne des oscars… coup double après Coda!
Ce qui est déjà choquant, c’est que ce film ait cartonné pour en arriver au 4ème volet… Nous en sommes là, des films aussi clichés ramassant des entrées astronomiques à côté de bons films qui se ramassent… Les beaufs ont ce qu’ils méritent…
Alors oui il y a eu le pré pass vaccinal ou on pouvait certes encore ce faire tester dans la journée pour aller au ciné, si pas vacciné, mais je pense surtout que c est le pitch même du film qui donne moins envie. Dans le 2 on les envoie aux usa avec choc des cultures etc. Le 3, il devient président. Et pour le 4? Ils fêtent Noël à bouzolle… mouèf…. bon en même temps ils auraient dû faire quoi? Jef tuche, président des USA?
Ça c’est le beauf tel qu’on aime se l’imaginer, un peu années 90, un peu beauf de Cabu.
Le vrai beauf c’est celui qui aime ce film, celui qui s’informe sur C8, le perroquet des thèses complotistes.
Seule chose qui ne varie pas c’est le sporstwear.
« Les aventures de la famille habitant à Bouzolles sont pourtant l’une des seules franchises qui ont été capables de dupliquer des performances exceptionnelles d’un film à l’autre au box-office en salles, chose qu’on avait assez peu vu (en dehors de Qu’est-ce qu’on a fait au bon Dieu) depuis les époques des Bronzés, des films Astérix et Obélix, ou encore de Taxi »
Il ne faut pas oublier non plus cette série mémorable de créativité qu’est Camping !