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Cannes 2024 : on a vu When the Light Breaks, notre premier coup de cœur du festival

Par Antoine Desrues
18 mai 2024
MAJ : 23 mai 2024
When the Light Breaks : on a vu When the Light Breaks, notre premier coup de cœur du festival

Ecran Large est de retour sur la Croisette pour l’édition 2024 du Festival de Cannes, en partenariat avec Métal Hurlant. Et c’est l’heure de revenir sur When the Light Breaks de Rúnar Rúnarsson, l’ouverture de la sélection Un Certain Regard.

Métal Hurlant nous accompagne à Cannes cette année, dans notre exploration des sélections hétéroclites du festival. Au travers de récits de bande dessinée et d’articles sur l’actualité culturelle, Métal Hurlant développe avec éclectisme, dans quatre numéros par an, un imaginaire sans aucune limite. Une ligne éditoriale totalement en accord avec la soif d’expérimentations et de découvertes du Festival de Cannes.

A côté de la compétition, la sélection officielle de Cannes révèle souvent ses plus belles surprises avec Un Certain Regard, catégorie dédiée aux nouveaux arrivants du cinéma mondial. C’est pourquoi on s’est précipité sur l’ouverture de cette section, When the Light Breaks.

 

When the Light Breaks : photo Shadow on the Sun

 

Light & Magic

De quoi ça parle ? Una est étudiante en art en Islande. Un beau jour, un accident tue son petit ami. Mais la jeune femme ne peut pas exprimer son chagrin, car leur relation était secrète.

C’était comment ? On avait repéré Rúnar Rúnarsson avec son film Sparrows, coming of age sensible en terres islandaises. La froideur et l’immensité des paysages, filmés avec délicatesse, embrassaient le mal-être de son protagoniste adolescent en pleine crise identitaire. Pour sûr, Rúnarsson sait capturer la beauté de son pays, comme en attestent les premières minutes de When the Light Breaks. Avec sa photographie aux teintes pastel, il s’attarde sur un coucher de soleil en bord de plage, alors que se détachent les silhouettes de Una (Elín Hall) et de son amant Diddi (Baldur Einarsson).

Le couple se fait des promesses. Diddi doit quitter son actuelle petite amie, qu’il n’aime plus depuis longtemps. Il n’aura pas le temps de le faire. Au travers d’un travelling envoûtant, mouvement abstrait sur les lumières diffuses d’un tunnel routier, tout bascule. Un accident fait de nombreux morts, dont Diddi.

 

When the Light Breaks : photo Soirée endeuillée

 

De ce concept simple, When the Light Breaks puise son impressionnante pureté. Il est d’abord question d’un traumatisme collectif, que le réalisateur capte avec beaucoup de minutie. Au-delà d’Una, tous les amis de Diddi se retrouvent à l’hôpital, à tournoyer, à s’enlacer, à se rassurer. Le cinéaste observe un tissu social essentiel, une solidarité dans l’adversité qui ne force jamais une dramatisation outrancière.

Cette jeunesse sait s’entourer et se soutenir, afin de mieux ressentir et accepter ce deuil déchirant. Seulement voilà, Klara (Katla Njálsdóttir), la copine de Diddi, se greffe au groupe, empêchant Una de pleinement exprimer son chagrin. Ce non-dit, aussi bouleversant qu’étouffant, est magnifiquement introduit dans la séquence où l’héroïne apprend la terrible nouvelle. Dans ce couloir d’hôpital bondé, la caméra serpente avec elle, presque à contre-courant du reste de la foule, avant de s’arrêter sur son visage. Seule, Una fait face, en même temps que le spectateur, à la violence du contre-champ, qui révèle ses amis en train de pleurer.

Emerge de cette douleur silencieuse un puissant film de performance. C’est bien simple : When the Light Breaks est une œuvre merveilleuse autour du gros plan, échelle dont la valeur et la beauté n’avaient pas paru aussi signifiantes depuis longtemps. L’ensemble est d’ailleurs soutenu par la direction d’acteurs fabuleuse de Rúnar Rúnarsson, qui nous ferait suivre Elín Hall jusqu’au bout du monde.

 

When the Light Breaks : photo La relation Una/Klara, merveilleuse

 

Inévitablement, l’étau se resserre autour d’Una et de Klara, deux faces d’une même pièce qui se retrouvent prises dans un jeu de miroir fascinant. On pourrait reprocher au cinéaste d’expliciter un peu trop cette dimension métaphorique, mais ses touches de stylisation sont toujours au service de cette souffrance adolescente, qui se définit avant tout par leur langage corporel. A la fois tendre, charnel et pudique, le long-métrage trouve un équilibre rare pour évoquer les sentiments contradictoires de la perte. Comment retrouver du sens face à l’absurde ? Comment aller de l’avant quand le meilleur est derrière soi ?

On en revient au miroir, au moment où l’obscurité du tunnel laisse apparaître la lumière. Il serait criminel de spoiler le dernier plan de When the Light Breaks, qui en est le négatif parfait. On dira juste que c’est déjà l’un des plus beaux qu’on aura vu pendant ce festival.

Et ça sort quand ? En France, le film sortira au cinéma le 18 décembre 2024.

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