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Une Femme en jeu est actuellement le film le plus regardé sur Netflix. Mais le scénariste a dû apporter quelques modifications à l’histoire vraie (et glaçante) dont il s’inspire pour assurer ce succès.
Connue en tant qu’actrice, Anna Kendrick est passée pour la première fois derrière la caméra avec Une Femme en jeu, thriller Netflix dont elle est l’actrice principale, mais qu’elle a aussi réalisé. C’est l’histoire de Rodney Alcala, terrible tueur en série américain des années 70, et de Cheryl Bradshaw, jeune candidate d’un jeu télévisé qui sera confrontée au tueur le temps de l’émission, qui a inspiré le film.
Mais le scénariste Ian McDonald a dû changer certaines choses de cet épisode bien connu de l’histoire de la télévision américaine afin de rendre l’histoire du film crédible pour le public actuel. Il faut dire que le contenu de l’émission au cours de laquelle Cheryl Bradshaw a rencontré Rodney Alcala n’avait pas grand-chose à voir avec ce qui est montré dans Une Femme en jeu, et c’est tant mieux.
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Une femme en jeu, tiré d’une histoire vraie
Ce n’est pas faute de la part d’Ian McDonald d’avoir cherché le réalisme : le scénariste a expliqué, dans une interview donnée au Hollywood Reporter, qu’il a essayé de rentrer en contact avec la véritable Cheryl Bradshaw pour écrire sa Sheryl de fiction. Mais ne parvenant pas à la trouver, il a choisi de respecter son intimité et d’écrire un personnage à part entière.
“J’ai essayé d’entrer en contact avec Cheryl. Je n’ai pas réussi à la trouver, déjà, et dans une certaine mesure, j’ai supposé que c’était un choix de sa part. Il y a eu des [émissions] consacrées à Rodney Alcala sur lesquels d’anciennes victimes ont été invitées, mais elle n’a jamais participé à ce genre de choses. J’ai supposé qu’elle ne voulait pas que sa rencontre unique et fortuite avec un psychopathe définisse le reste de sa vie. Ça fait partie des raisons pour lesquelles j’ai changé son nom et pas mal d’éléments biographiques la concernant. Il s’agit plus d’une version alternative de Cheryl.”
Le non-respect de certains éléments réels vient donc, en partie, d’une démarche respectueuse et éthique de la part d’un auteur soucieux de ne pas fonder son scénario sur une démarche intrusive et voyeuriste, travers dans lequel les films adaptant des faits divers peuvent vite tomber.
The Dating Game version 2024
Mais ce n’est pas le seul obstacle que McDonald a dû contourner. La participation de Rodney Alcala dans The Dating Game, version américaine de Tournez Manège ! dans laquelle trois hommes tentent de séduire une femme en répondant à ses questions à travers un mur, est un moment bien connu de l’histoire de la télévision.
Trouvables n’importe où sur internet, ces morceaux d’émission montrant une jeune femme (la fameuse Cheryl, donc) entrer dans un jeu de séduction avec celui qu’elle ne sait pas être un violeur et tueur en série ont évidemment quelque chose de particulièrement glaçant, surtout quand on pense à l’impunité d’un tueur venu parader à la télé sans que personne ne le reconnaisse, et au fait que Cheryl a probablement échappé de peu à un destin funeste.
Les amateurs de true crime connaissent bien ces images, aussi auront-ils pu constater que les dialogues du film n’ont rien à voir avec ceux de la véritable émission. Dans le film d’Anna Kendrick, Sheryl est confrontée à deux gros lourds aux réflexions misogynes et moult sous-entendus sexuels, et le Rodney Alcala fictif (candidat numéro 3) se distingue justement par ses répliques spirituelles.
Dans la véritable émission de 1978, le véritable Alcala (candidat numéro 1) ne répond en réalité à la vraie Cheryl que par des blagues grivoises et du rentre-dedans, ce qui fait rire la jeune femme. Cet Alcala-là ressemble en réalité beaucoup plus au personnage de Jedidiah Goodacre dans le film, à savoir le type lubrique et sûr de lui qui déplaît à Sheryl. Selon le scénariste du film, il était nécessaire de changer le comportement d’Alcala sur le plateau pour qu’il puisse apparaître séduisant aux yeux d’un public de 2024.
“Le truc un peu délicat, c’est que si on regarde Rodney [Alcala] dans les vraies images du Dating Game, c’est évident qu’on ne peut pas se contenter de prendre le dialogue tel quel et de le mettre dans un film d’aujourd’hui, parce qu’on se dirait “ça se voit que c’est un serial killer”. Les codes de séduction ont changé entre 1978 et 2024, et ce qui fait qu’une blague est drôle ou gênante a changé depuis 50 ans. Si on avait recopié exactement le dialogue de l’époque, le public aurait pris Sheryl pour une idiote. Le gros défi de Daniel [Zovatto, qui incarne Alcala] était de faire en sorte que les spectateurs d’aujourd’hui ressentent la confiance qu’ont pu ressentir ses victimes à l’époque, et il l’a brillamment relevé”.
Une Femme en jeu est donc la preuve que le respect absolu de l’histoire vraie n’est pas toujours la bonne démarche à suivre lorsqu’on change un fait divers en fiction. Ce pari semble avoir fonctionné, même auprès d’un public qui connaissait peut-être déjà les véritables extraits de l’émission, puisque le film d’Anna Kendrick cartonne actuellement sur Netflix, où il est disponible depuis le 18 octobre.
