Crise du jeu vidéo : licenciements massifs chez PlayStation, et la panique grandit dans l’industrie

Par Léo Martin
28 février 2024
MAJ : 2 mars 2024
7 commentaires
PlayStation : licenciements massif chez PlayStation, et la panique grandit dans l'industrie

PlayStation annonce des licenciements massifs s’élevant à 900 employés dans plusieurs studios, dont chez Insomniac Games, créateur de Marvel’s Spider-Man 2.

Après le cas d’Embracer Group, on avait déjà fait un premier point sur l’état de l’industrie du jeu vidéo et de son inquiétante évolution. Entre jeux annulés, restructurations internes et vagues de licenciements en pagaille depuis 2023, il y avait de quoi s’interroger. Après tout, l’année dernière a été florissante pour le marché du jeu, avec de nombreux titres très populaires et pourtant… cela n’a pas empêché Microsoft, Sony, Ubisoft et de nombreux autres groupes de virer en masse leurs employés. 

En janvier dernier, c’était un tiers des entreprises de l’industrie qui était touchée par cette crise. Environ 35% des développeurs (interrogés par une enquête de GDC) avaient déclaré avoir vu leur lieu de travail affecté par ces licenciements. Et en 2024, le phénomène continue d’empirer. Sony vient ainsi d’annoncer la suppression de 900 postes dans les divers studios de PlayStation.

 

Marvel's Spider-Man 2 : photo C’est toujours pire

 

La crise continue 

Le président actuel de Sony Interactive Entertainment, Jim Ryan, a ainsi dû faire part ses équipes d’une « décision extrêmement difficile« , consistant à réduire l’effectif global de sa compagnie de 8 % – et il est intéressant de noter qu’il s’agit d’une réduction proportionnellement équivalente à celle opérée par Microsoft dans ses propres équipes depuis le début de l’année. 

« Ces personnes sont incroyablement talentueuses et ont contribué à notre succès, nous leurs sommes très reconnaissants pour leur apport« , aurait dit Jim Ryan (via VGC). « Cependant, l’industrie a beaucoup changé, et nous devons envisager l’avenir pour préparer l’entreprise à ce qui nous attend. Nous devons répondre aux attentes des développeurs et des joueurs. »

 

Marvel's Spider-Man 2 : photo« Nous sommes très reconnaissants pour votre contribution. »

 

Une autre déclaration de SIE a précisé qu’Insomniac Games, Naughty Dog, Guerrilla et les équipes technologiques, créatives, et de support de PlayStation seront également impactées par ces mesures. Jim Ryan a partagé un e-mail d’entreprise (publié le site de Sony) qui explique plus en détail les plans de PlayStation.

L’e-mail indique la fermeture complète de PlayStation London Studios (qui travaillait actuellement sur un jeu de combat en coopération en ligne) et d’amputations importantes chez Firesprite studio (codéveloppeur du mode VR d’Horizon). Malgré les mots apparemment compatissants du PDG, la nouvelle est affligeante. Elle l’est davantage qu’elle confirme encore plus la crise de l’industrie, dont on cherche encore les causes.

 

The Last of Us - Part II : photoNaughty Dog, touché une fois de plus

 

la loi de murphy 

Le développeur de jeux Farhan Noor, qui suit les licenciements depuis le début de 2023 sur videogameslayoffs.com, estime qu’environ 10 500 employés de l’industrie des jeux ont été licenciés l’année dernière. En moins de deux mois pour 2024, le total de Noor pour cette année est déjà à 6 100. Un chiffre qui devrait passer à 7 000 une fois que la liste sera mise à jour.

Ce cataclysme industriel peut paraître incompréhensible. Comment un studio tel que Insomniac Games, qui a connu un succès record avec son Marvel’s Spider-Man 2 (le jeu a fêté ses 10 millions de ventes le 14 février dernier) et qui tire PlayStation vers le haut du marché, peut-il être remercié avec de telles mesures ? Que se passe-t-il pour que même les studios les plus prolifiques soient impactés ?

 

Marvel's Spider-Man 2 : photoInsomniac qui se mange des licenciements et des piratages depuis le début de l’année

 

Pour s’expliquer la tendance actuelle, il y a plusieurs hypothèses. Durant notre dernier bilan, on avait évoqué la piste des services de streaming. Ceux-là nécessitent un énorme investissement monétaire au long terme et elle expliquerait la volonté des entreprises de réduire leurs développements. Le but étant de proposer aux joueurs, à la place, un catalogue à abonnement, et d’être plus sélectif sur les jeux qu’ils y proposent.

Mais un autre facteur de la crise pourrait aussi être un effet domino lié à la période du Covid. L’industrie du jeu a bien entendu explosé durant les confinements, ce qui a entraîné un enthousiasme disproportionné de la part de nombreux groupes. Embracer Group en est un bon exemple avec la démultiplication de ses achats de licences et de studios entre 2020 et 2023. Pour profiter de l’instant de grâce, l’industrie tout entière s’est lancée à corps perdu dans la surproduction de jeux et dans de très nombreux et coûteux projets.

 

Deus Ex : Mankind Divided : photoEmbracer a dû annuler le nouveau jeu Deus Ex, parmi d’autres choses

 

communication de marché

Entre 2020 et 2023, le nombre de jeux sortis sur Steam par année est ainsi passé de 9 736 jeux publiés à 14 465. Et quant aux triple A, ils ont aussi vu leur budget exploser. Marvel’s Spider-Man 2 aurait ainsi coûté 300 millions de dollars de développement (selon Forbes), soit trois fois plus que le premier opus. Le problème étant que toutes ses augmentations de dépenses n’ont pas entraîné la croissance des profits attendue. Ceux-là ayant naturellement baissé après la pandémie.

Une situation qui a donc inquiété les actionnaires de l’industrie et qui ont dû constater qu’il suffirait d’un seul bide ou d’un mauvais investissement, pour couler un studio trop gourmand. Et on l’a vu, Embracer a déjà commencé à se prendre les pieds dans le tapis en 2023 et a ainsi perdu 44% de sa cote en Bourse. Ubisoft enchaîne les petits échecs et a été forcé d’annuler plusieurs de ses jeux en cours de production – dont la suite du prometteur Immortals Fenyx Rising. Avec de tels précédents, de prudents actionnaires tournent des regards inquiets vers les colosses au pied d’argile les plus redoutables, Microsoft et Sony.

 

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Ainsi, il est possible que tous ses licenciements fassent partie d’une manœuvre radicale cherchant à rassurer ces investisseurs. Microsoft est un cas un peu à part, car suite à sa fusion, il était certain que la firme se restructurerait. Malgré tout, elle a donné le ton : 1900 postes supprimés en un mois. Tout en renforçant sa volonté d’étendre son Xbox Game Pass, service à abonnement qui promet une certaine rentabilité pour l’entreprise. 

En s’alignant sur les 8% de licenciements globaux de Microsoft, Sony donne le sentiment de suivre son modèle. Il n’est alors pas dit que l’entreprise soit déficitaire, au contraire. Mais elle a une bataille à mener et celle-là se joue avec des investisseurs confiants. Il faut donc prouver sa bonne foi et fermer des studios, licencier en masse et « réévaluer sa façon d’opérer » – comme l’a déclaré PlayStation Studios. Tout ça pour démontrer une prudence financière égale à celle de la concurrence. En bref, une logique de marché froide et cynique, mais aux conséquences dramatiques sur des milliers d’emplois et de vies humaines. 

 

 

 

 

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Bilbo

àMorcar : tu ne comprends rien aux systèmes d’abo de jeux…quand est jeu est day one sur le GP par exemple, MS rétribue les développeurs ! SInon ils mettraient pas leurs jeux dedans…

Vomito

C’est le côté obscur du capitalisme.
Votre entreprise fais des bénéfices, des millions vont dans les poches des actionnaires et pour entretenir leurs gavage de profit vous licenciées des employés qui touche un SMIC.

Et puis à côté ya Nintendo, qui développe ses propres jeux, qui prend le temps qu’il faut (le temps de debug du dernier Zelda c’est 1 an) et qui sort des jeux de qualités.

Morcar

A force de tout vouloir faire fonctionner par abonnement, rien d’étonnant à ce qu’ils en arrivent là. Mais les gens se réjouissent d’avoir les nouvelles sorties inclues dans un abonnement mensuel, se moquant totalement de savoir si ça permettra aux développeurs de garder leur salaire ou pas; C’est ça dans tous les domaines.

Picasso sensei

L’on oublie un facteur non négligeable, l’avancée de l’apport de l’IA dans les métiers numériques notamment, ce qui pose déjà problème Hollywoodien, et par pur effet boule de neige, ne devrait pas épargner l’industrie du jeu vidéo… je n’imagine même pas le nombre de licenciements dans 5ans … froid dans le bide 🙁

FuturMan

Le programme principal c’est les abonnements et l’appétit monstrueuse des dirigeants pour avoir un maximum de profit. Les jeux des prochaines consoles demanderont à coup sur d’être lié à un utilisateur sans possibilité de revente, parce que industriellement parlent, le marché de l’occasion représente une perte de profit pour les grands patrons.

rientintinchti2

@En colère
Totalement d’accord.
Mais en amont de ça il faut que les travailleurs sortent de la soumission, de la « servitude volontaire » et de l’alienation.
Faut une vraie grève générale interprofessionnelle et illimitée.
Problème de taille: Avec Netflix et les Frankens c’est pas gagné…
Yé t’attend de pié felme Signoré
Où é toouuuu???

En Colère

Les patron.ne.s des studios sont vraiment des minables.
Dès qu’il y a des bénéfices, direction le bonus et les actionnaires.
Quand leur stratégie foire, direction France Travail et la CAF pour les petites mains.