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Carnival Row saison 2 : critique qui ne vole toujours pas haut sur Amazon

Par Axelle Vacher
17 mars 2023
MAJ : 13 mars 2024
19 commentaires

Débarquée en coup de vent sur la plateforme Amazon Prime Video en août 2019, il a fallu attendre quatre ans avant de découvrir la suite des aventures de Philo (Orlando Bloom) et Vignette (Cara Delevingne). Cette deuxième et ultime saison de Carnival Row est-elle parvenue à combler les lacunes des premiers épisodes et réaliser le concept ambitieux de la série ? Ou s’est-elle, elle aussi, plantée en plein vol ?

Carnival Row : photo

Monstres et compagnie

Un peu comme si quatre années, une pandémie et un changement de président aux États-Unis ne s’étaient pas écoulés, la nouvelle saison de Carnival Row débute peu ou prou là où sa prédécesseure s’est arrêtée en 2019. En cela, le récapitulatif des évènements passés, lequel chatouille allègrement les cinq minutes, n’est pas de trop pour rafraichir la mémoire du spectateur.

Il est ainsi rappelé à ce dernier les différents sorts laissés en suspens de Philoscrate, Vignette, Imogen (Tamzin Merchant), Agreus (Andrew Gower) ou encore Tourmaline (Karla Crome) suite à la mise en place d’un ghetto ségrégationniste par Jonah (Arty Froushan), alors fraichement nommé Chancelier. La première saison ayant conclu son intrigue à la hâte, les enjeux relatifs à cette nouvelle salve d’épisodes sont légion, mais se juxtaposent selon le même point de fuite : explorer les retors de la Révolution qui se profile dans l’ombre. 

 

Carnival Row : photoL’audace

 

Il n’est nullement exagéré d’affirmer que le défaut principal de la série créée par René Echevarria et Travis Beacham se rapporte à l’intense sentiment de frustration que suscitaient déjà les huit premiers épisodes. Malgré son concept intrigant, le déploiement d’une mythologie riche et d’un univers finement développé, Carnival Row n’est jamais réellement parvenu à réaliser son potentiel. En a résulté une première saison confuse au récit dissipé, le tout porté par un casting dont les performances laissaient franchement à désirer – pour le dire poliment.

Tout cela n’augurait donc rien de bon pour la suite, mais puisque l’espoir fait vivre, il était permis d’espérer que scénaristes et producteurs apprendraient de leurs erreurs. Que nenni. Non seulement cette nouvelle fournée n’a clairement rien retiré des faux-pas de sa prédécesseure, mais pire encore, elle semble avoir pris soin de s’enfoncer dans ses propres travers.  

 

Carnival Row : photo, Karla CromeUn avenir… douteux

 

Foire aux idées

Plutôt que d’aller droit au but (après tout, ce n’est pas comme si c’était la dernière saison, n’est-ce pas ?), ces nouveaux épisodes pullulent de sous-intrigues dont on cherche encore le bien-fondé. Certes, elles ne sont pas toutes complètement insipides, mais l’ensemble est si embrouillé qu’il est tout simplement impossible d’apprécier les quelques bons segments que propose ponctuellement le récit à leur juste valeur. 

Difficile pour le spectateur de savoir qui suivre et quoi ressentir devant l’amas informe que devient progressivement la narration. Qu’il s’agisse des arcs relatifs à Vignette et aux Black Raven, à Philo, ses enquêtes et autres crises existentielles, à Tourmaline et sa découverte contrainte de la magie noire, aux tribulations politiques de Sophie et Jonah, ou encore, aux péripéties pseudo romantiques d’Imogen et Agreus, il devient rapidement épineux de se laisser convaincre et toucher par les sorts de tout un chacun.

 

Carnival Row : photo, Cara Delevingne, Orlando BloomRazzie Award

 

Et si tout cela ne suffisait pas à assommer le spectateur, les multiples allusions à des phénomènes sociopolitiques et culturels ayant déjà maintes fois fait la une du journal de 20h se chargeront de l’achever. On en conviendra aisément, la démarche est louable. Adresser les problématiques de violences policières, de corruption, de racisme ou encore de misogynie par le prisme de la fiction n’est jamais une mauvaise chose. Néanmoins, l’exécution est si brute de décoffrage que les bonnes intentions de la série tournent davantage au matraquage faussement éclairé qu’à la véritable satire.

Malheureusement, il sera également impossible de se reposer sur les personnages pour essayer de tirer un quelconque plaisir de cette nouvelle saison. Premièrement, parce que ces derniers sont bien trop nombreux, fragiles et interchangeables pour qu’un réel attachement puisse aboutir. Deuxièmement, et c’est là le souci principal, parce que même ceux qui pouvaient prétendre à un minimum de complexité se retrouvent vidés de toute substance, quand la série ne les abandonne pas tout simplement.

 

Carnival Row : photo, Arty Froushan, Caroline FordCi-dessus, les deux arguments valables de cette série

 

Carnaval des actes manqués

Les susmentionnés constats sont d’autant plus décevants qu‘il y a bien une poignée de concepts intelligemment exécutés dans le vaste bourbier qu’est Carnival Row. On pense, par exemple, au cinquième épisode, Le couperet, rare belle démonstration de rythme, de suspense et même d’horreur de cette nouvelle saison. La découverte des Sparas et le mystère derrière ces créatures méritent également d’être soulignés. Sans compter qu’en dépit de ses multiples travers, la série profite d’une esthétique et d’une mise en scène aussi appuyée que soignée.

Si la série s’était montrée un tantinet plus humble dans ses ambitions, il y aurait réellement eu matière à conduire à un projet original. Pour cela, peut-être aurait-il été nécessaire de faire l’impasse sur certains personnages tels qu’Agreus et Imogen ; aussi sympathiques ces deux-là puissent-ils être par moments, leur sacrifice narratif aurait laissé davantage de place au développement du Row et de ses nombreux acteurs. Après tout, l’épisode 5 est la preuve qu’en admettant de resserrer son intrigue sur les segments se déroulant au coeur de Burgue, Carnival Row a l’étoffe d’une proposition généreuse plus que respectable. 

 

Carnival Row : photo, Tamzin Merchant, David Gyasi, Andrew Gower« Vous êtes le maillon faible. Au revoir »

 

Malgré quelques fausses joies, cette nouvelle saison ne décolle jamais, et préfère forcer son récit là où il n’a pas lieu d’être. Une surenchère dramatique qui fait tôt de virer au ridicule tant certains retournements de situation ou traitements de personnages semblent sortir de nulle part. La tentative de sondage introspectif de Philo est un exemple parmi tant d’autres, mais on choisira de le retenir pour sa bouffonnerie particulièrement ubuesque (on laissera au spectateur le loisir de découvrir cette pépite faussement tourmentée dans l’épisode 6).

Au final, peut-être que Carnival Row était perdue d’avance. Entre les aspirations démesurées de ses créateurs et son duo d’interprètes principaux – plus mauvais l’un que l’autre –, il aurait été difficile de faire des miracles. Alors plutôt que de chercher le pourquoi du comment, et histoire de moins pleurer ce gigantesque acte manqué, on propose de boire une gorgée d’alcool dès que le cabotin Orlando Bloom fronce les sourcils pour avoir l’air mystérieux. Grâce à cela, le spectateur se retrouvera ivre au bout d’un épisode et demi, et n’aura pas à se farcir le reste de la saison

La saison 2 de Carnival Row est disponible en intégralité sur Amazon Prime Video depuis le 17 mars 2023

 

Carnival Row : affiche (2)

Rédacteurs :
Résumé

Malgré une poignée de propositions sympathiques et une réalisation manifestement soignée, Carnival Row ne parvient toujours pas à faire honneur à son concept d'origine. Il n'est donc guère surprenant, et même plutôt salutaire que cette seconde saison soit la dernière.

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Loliv

C’est une bonne série, qui n’en déplaise, n’a pour but que de divertir comme le plupart des séries d’ailleurs. Parfois on a l’impression en lisant certain que leur vie et l’avenir de la planète dépend des thèmes abordés et traités dans une série… bref! Alors oui, il y a le thème de la différence et de son acceptation car il faut bien une accroche mais il y’a aussi celui de la violence et du pouvoir. Personnellement j’ai accroché à cet univers sombre et degueulasse (pardon steampunk) et le fait que Vignette et Philo soient particulièrement antipathiques tout comme Imogène et Agreus. Leurs histoires d’amour qui semble forcé, on a l’impression de vivre dans un monde où l’amour ne peut exister et où tout est pouvoir et domination. L’ensemble est bien réalisé et les rebondissement des ses enquêtes pour démasquer le monstre sont nombreux, car au final il ne s’agit que de ça, résoudre l’enquête. Par contre à partir de l’épisode 6 de la saison 2 on sent bien l’effet de l’annonce que ce sera la dernière saison et tout va très vite mais la fin n’est pas si mauvaise au final. Cette série va probablement devenir culte maintenant.

cpatop

À une époque où l’on a plus droit qu’à une demie-saison toutes les X années (il est bien loin les annuelles fournées de 24 épisodes réglées comme des horloges) je ne peux que saluer le copieux résumé du début qui évite d’avoir à se retaper la saison précédente pour comprendre de quoi on parle (ce que j’ai tout de même fait parce que je suis comme ça). Certains devraient en prendre de la graine (oui c’est toi que je pense His Dark Materials).

Cette série m’avait laissé une assez mauvaise impression par sa scène d’ouverture du tout premier épisode totalement idiote où l’on voit des fées courir dans les bois (ne me demandez pas pourquoi elles ne volent pas) pour fuir les méchants qui les avoinent à coup de balles dans la tête dans un brouillard si épais qu’on y voit pas à 10 mètres. Puis l’héroïne apparait en même temps que le brouillard se dissipe et quand bien même elle est seule, court en ligne droite (voir s’arrête) et que les poursuivants ont cette fois une vue parfaitement dégagée, ils se changent tous en Storm Trooper… Enfin, la fée atteint une falaise et… s’envole. Ah donc elles pouvaient le faire…

Autant dire qu’un tel festival de n’importe quoi dès le début n’augurait rien de bon. Mais au final, même si ce n’est pas la série du siècle elle propose une esthétique intéressante, un début, une fin et franchement j’ai vu bien pire cette année (qui a dit Willow?).

Doubinut

À une époque où l’on a plus droit qu’a une demie-saison toutes les X années (il est bien loin le temps des annuelles saisons de 24 épisodes) je ne peux que saluer le copieux résumé du début qui évite d’avoir à se retaper la saison précédente pour se souvenir de quoi ça parle. Certains devraient en prendre de la graine (oui, c’est est a toi que je pense His Dark Matériels).

Pas la série de l’année mais franchement,j’ai vu bien pire

Manea

Mais c’est quoi cette critique totalement dégueulasse. Ça se prétend critique de cinéma ? Tout ce que l’on peut reprocher à cette série, c’est qu’il n’y ait pas d’autres saisons. Elle est vraiment très agréable à regarder, et peut-être trop subtil pour certains « critiques ».

ALF0427

Critique en plein dan le mille. Dommage d’avoir sabordé une belle idée

Boum

Curieux ce flingage en règle… je trouve cette série ambitieuse, esthétique et bien servie par ses acteurs. La deuxième saison monte en intensité et en action par rapport à la saison 1. Beaucoup d’arcs narratifs, c’est vrai, parce qu’il y a beaucoup de personnages à suivre, qui se croisent dans cette trame qui prétend dépeindre tout un monde. Mais, contrairement à ce que raconte la teigne qui vomit cette critique injuste, on se s’ennuie jamais. Les décors sont merveilleux. C’est un sacré imaginaire qui a été mis en scène. De l’argent bien dépensé. L’une des meilleures que j’ai pu voir au cours des 12 derniers mois.

Razer

Je n ai pas compris comment philo a découvert qui était l humain qui ce transforme en monstre j’ai eu beau revenir 3 fois en arrière après la fin de l épisode

Raoul 33

Carnival Row avait un très bon potentiel de par les décors, la mise en scène et l’investissement des acteurs, mais la déception vient du scénario bâclé de la fin de cette dernière saison. En effet, Sophie Longerbane se fait guillotiner vite fait, alors que le personnage pouvait apporter beaucoup +, Imogène zigouille son frangin sans complexe, Tourmaline devenue sorcière et amoureuse du Loup-Garou Darius lâche ce dernier pour Vignette, laquelle se sent soudain pris d’un amour lesbien, jamais abordé dans la saison 1, pour sa consœur fée, Millworthy retourne à la rue après avoir côtoyé le + haut niveau de l’échelle politique du Burg, et enfin Philo, l’immortel, puisqu’il survit après avoir été pendu, attaqué par la sparas, et abattu dans le dos, doit subir sa pire déception à cause de l’histoire d’amour entre sa dulcinée Vignette et et la néo sorcière Tourmaline, Bref, au niveau du travail de scénario, il semble qu’il y avait urgence de terminer la saison et la série sans arrières pensées, mais avec la pire de efficacité qu’on n’aurait oser imaginer …

AG

Critique très juste, je suis bien d’accord, après avoir vu les 2 saisons. Dommage, potentiel oui, mais un peu mal exploité.

nietseb

Je n’ai rien attendu d’extraordinaire de cette série et je l’ai beaucoup apprécié. L’ambition me semble capable de dénaturer l’intérêt d’une oeuvre autant
que celui d’une critique.