Les Mille et Une adaptations de Billy Milligan
Avec son protagoniste atypique et l’étendue du potentiel cinématographique impliqué, il n’y a rien de bien surprenant à ce que Hollywood ait déjà maintes fois tenté d’adapter le roman biographique de Keyes. À l’aube des années 1990, James Cameron a ainsi co-écrit un premier scénario aux côtés de Todd Graff (Camp, La Disparue), mais il n’a jamais abouti, le cinéaste ayant été poursuivi en justice par la titulaire des droits du livre original.
Malgré tout, Warner a persévéré dans son entreprise. Tour à tour, plusieurs cinéastes – comme Joel Schumacher ou David Fincher – ont été rattachés au long-métrage sans que rien ne se concrétise. Pour interpréter Milligan, Matthew McConaughey, Brad Pitt, Johnny Depp, Sean Penn, ou encore John Cusack ont été pressentis, jusqu’à ce que Leonardo DiCaprio soit confirmé dans le rôle en 2015.
Jeune homme cherche coiffeur (urgent)
Malgré sa tête d’affiche toute trouvée, The Crowded Room a stagné et s’est enlisé dans les enfers de sa pré-production. Tant et si bien qu’en 2016, c’est un tout autre film qui a investi les salles obscures. Dirigé par M. Night Shyamalan, Split s’est notablement inspiré de Milligan et de son parcours pour le personnage campé par James McAvoy. Cinq ans plus tard, Olivier Megaton (Colombiana, Taken 2 et 3) a également proposé la mini-série documentaire Monsters Inside : The 24 Faces of Billy Milligan pour Netflix.
Mais pour découvrir le récit fantasmé par la Warner depuis plusieurs décennies, il a fallu patienter jusqu’en 2021, date à laquelle la plateforme Apple TV+ a annoncé s’être réapproprié l’intrigue, et choisi Tom Holland pour prêter ses traits au protagoniste. En soi, l’idée de transposer le récit au format sériel pouvait sembler appropriée au traitement d’une matière aussi complexe et multidimensionnelle que celle des Mille et Une Vies de Billy Milligan. Pourtant, c’est bien là que The Crowded Room souffre d’une de ses nombreuses faiblesses.
Chaos Writing
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le problème principal de la série se rapporte à son propre sujet. Librement inspirée du livre de Keyes, The Crowded Room n’en retient peu ou prou que les grandes lignes, et ne peut donc se présenter comme une véritable adaptation. Faits et personnages ont ainsi été sciemment altérés afin de proposer une gentille fiction plutôt que le biopic romanisé d’un violeur en série. Après tout, pourquoi pas. Néanmoins, l’énigme autour de laquelle est censé s’articuler le récit semble n’être qu’à demi assumée par Goldsman et ses différents scénaristes.
Avant de développer davantage, il s’agirait de préciser qu’Apple TV+ a prescrit aux journalistes de ne pas faire mention de certains éléments narratifs afin d’en préserver les divers rebondissements associés. En soi, la demande n’a rien d’inédit et peut même s’avérer plutôt judicieuse selon les projets. Mais le cas présent est un tantinet plus délicat dans la mesure où ce qu’il a été requis de tenir secret se trouve précisément être ce qui fait défaut à la série.
Si les spectateurs familiers du livre original, ou plus généralement, des faits relatifs à Billy Milligan peuvent effectivement avoir une idée de ce dont il est question dans le récit, ceux qui ne le sont pas n’auront pas nécessairement le loisir de se laisser surprendre non plus.
D’une part parce que la série dévoile le matériau dont elle s’inspire dès son générique, et qu’une rapide recherche sur Wikipédia suffit à deviner le fond du sujet abordé. De l’autre, parce que les diverses subtilités propres au personnage principal, désormais nommé Danny Sullivan, n’ont de toute évidence pas été intelligemment appréhendées par l’intrigue, et encore moins la mise en scène.
Certes, il a été proscrit de rentrer dans le détail ; mais il est toutefois possible de relever en quoi la série ne fonctionne pas dans sa globalité. Dans un premier temps, The Crowded Room manque cruellement d’enjeux. Ce qui semblait initialement s’apparenter comme une banale enquête policière a beau prendre une tournure faussement inattendue, trop peu de dispositifs ont été mis en place par le récit pour susciter un engagement quelconque.
Sans compter qu’à trop vouloir faire grand cas de son fameux twist (lequel est de toute façon si prévisible que son développement n’a rien de bien renversant), la série multiplie les maladresses et ne réussit finalement qu’à confondre son audience… dans le mauvais sens du terme. C’est d’autant plus frustrant que The Crowded Room propose malgré tout une belle poignée de séquences habilement menées, mais l’ensemble est trop inégal, le rythme trop lacunaire et la narration trop nébuleuse pour que lesdites séquences puissent réellement se démarquer du reste.
L’acteur, tout le temps
À dire vrai, The Crowded Room donne la sensation de ne pas réellement savoir quelle histoire transmettre. Peut-être aurait-il été plus raisonnable de décider lequel des trois arcs narratifs méritait d’être exploré comme récit principal – qu’il s’agisse du segment opposant les personnages d’Amanda Seyfried et Tom Holland, de celui relatif à l’appréhension par les personnages des révélations qui leur sont faites, ou encore du procès s’étalant sur les trois derniers épisodes.
Une épuration, ou au pire, une meilleure articulation de tout ce joyeux bazar aurait pu donner lieu à un résultat moins brouillon que celui du montage final. Dans un cas comme dans l’autre, l’ensemble aurait gagné à être plus court. Somme toute, la principale qualité rédemptrice de la série repose sur les différentes prestations de ses comédiens.
Tom Holland, lequel cherche manifestement à se défaire de l’image de jeune premier associé à son Peter Parker, livre à travers ce rôle torturé l’une de ses meilleures performances. Avec une adresse méritant d’être soulignée, l’acteur plonge généreusement dans le drame de son personnage, et déploie tout un éventail sensible succinctement effleuré à l’occasion de précédents projets (on pense par exemple à Le Diable, tout le temps d’Antonio Campos, ou à l’exécrable Cherry des frères Russo).
Et si face à lui, Amanda Seydried dispose d’une partition moins forte que celle de The Dropout, l’actrice ne démérite nullement. À eux seuls, les deux acteurs parviennent ainsi à maintenir le spectateur investi là où le récit échoue bien souvent.
Il en va de même pour les rôles secondaires. Ils leur manquent en substance, la faute à une caractérisation survolée par le scénario, mais ils le compensent grâce aux propositions de leurs acteurs respectifs. Aussi, Will Chase (Nashville, Sharp Objects) est tout simplement glaçant en beau père aux intentions ambiguës, tandis qu’Emily Rossum (Le Fantôme de l’Opéra, Shameless) est joliment convaincante dans son rôle de mère co-dépendante et abimée par la vie.
À l’issue des dix épisodes que comporte la série, il est difficile de parvenir à un autre constat que The Crowded Room porte affreusement bien son titre. Encombrée, décousue et incertaine, elle enchaîne les différentes séquences avec l’aisance d’un soûlard sur une corde de funambule. Certes, il serait possible de défendre la démarche en arguant qu’elle est à l’image de son personnage de tête, néanmoins, cela équivaudrait très franchement à chercher midi à quatorze heures.
S’il n’est pas question d’affirmer que la série est un ratage total, elle n’en est pas moins un acte à demi manqué. Ce qui, au vu du potentiel et de l’investissement évident des différents acteurs impliqués, s’avère bien regrettable.
The Crowded Room est disponible en intégralité depuis le 28 juillet 2023 sur Apple TV+
completement d’accord avec mlambaudie
Je viens de finir ce soir l’épisode 10 de la série The Crowded Room ! Et Je l’avoue, je suis moi aussi complètement effaré ! Non pas par la médiocrité du traitement de l’histoire, non pas par le vide du scénario, ni par le manque d’intérêt de la réalisation ! Ou bien par le jeu des acteurs !… non ! Je suis affligé par vos commentaires qui se croient avisés et cinématographiquement bien pensants !… la condescendance des critiques qui volent bas et qui se croient pertinentes sans jamais donner des raisons de fonds ! Ou des arguments qui tiennent la route !.. Je fais rarement de commentaires en réaction mais là je les trouve tellement inadaptés que je ne peux pas m’en empêcher !!! (Ou bien est ce peut être mon « alter » qui intervient ? On ne le saura sûrement jamais !) Je précise pour les grincheux que mon pseudo est mon nom de famille et que je ne me cache pas comme certains pour donner mon avis. Alors, oui ! mon avis ne revêt que la pertinence ( moi j’ose le dire) d’un simple spectateur qui cherche à être surpris et pris par de bons films, ou de bonnes séries, des scenarii qui vous font réfléchir, qui vous percutent et sont traités avec originalité (sans pour autant être perchés au 102eme étage pour des pseudos critiques qui ne sont dithyrambiques qu’avec les histoires qu’ils ne comprennent pas). J’ai trouvé le traitement de cette série et l’adaptation du livre particulièrement brillants, ils embarquent le spectateur dans les tréfonds des différents personnages sans jamais les traiter avec facilité.
Il ne me tardait que deux choses :
1- finir la série qui m’a tenu en haleine jusqu’au bout
2- en finir avec vos commentaires ! Qui auraient pu me faire rater une très belle série si je les avais suivi bêtement
Voilà je viens de réunifier mes alters !..grâce à vous !!!…
@steve je suis en désaccord. Le twist est tellement prévisible et mal amené que j’ai trouvé que la série devenait enfin interessante une fois qu’elle embrasse l’existence des différents personnages et la met en image
Après l’épisode 6, le soufflé retombe nettement. Inégal mais à voir !
J’ai beaucoup aimé la série, j’aime beaucoup Tom Holland c’est un de ses plus grands rôles je pense. C’est agréable de le voir jouer en personnage auquel j’ai pu m’identifier. Ça m’a beaucoup rappelé ma jeunesse.
C’est un rôle important je comprends pas les gens qui critiquent il faut voir avant de juger
@Toms
Je rajouterais même, attendre un bon film d’un choix de casting principal comme Tom Holland…
Ce gars est clairement la plus grande énigme du cinéma actuel (avec Jai Courney, mais on le voit beaucoup moins ces temps-ci lui)
@tom’s | C’est que l’espoir fait vivre, vous voyez
En même temps attendre de la subtilité de la part de Goldsman qui a volé un Oscar et le reste est pas reluisant , Da Vinci Code est quand même hyper mauvais, tout ce qu’il écrit ou produit est le pire du ciné us .