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Ragnarök saison 3 : critique d’un énorme foutage de gueule sur Netflix

Par Axelle Vacher
24 août 2023
MAJ : 7 janvier 2024
63 commentaires

Après plus de deux ans d’attente, Ragnarök a réinvesti le catalogue Netflix pour une troisième et ultime saison. Entre mythologie nordique et préoccupations modernes, la série norvégienne créée par Adam Price a-t-elle fait davantage honneur à ses dieux que le MCU, ou Taika Waititi peut-il enfin s’endormir la conscience tranquille après l’échec de Love and Thunder ? Aussi ahurissant que cela puisse paraître, oui, il le peut. Et avec toute notre bénédiction.

Explications : pourquoi la fin de Ragnarök est une honte absolue, qui n’a aucun sens

Ragnarök : une critique

thor-ture

Il ne s’agira pas de patienter bien longtemps pour que les premières lacunes de cette nouvelle salve d’épisodes se fassent ressentir, alors tant qu’à faire, autant plonger tête la première dans la fange : que diable s’est-il passé ? La question est plus littérale que cynique, et ça n’en est que plus désolant. 

D’emblée, le spectateur a la désagréable sensation d’avoir manqué un épisode entre le final de la saison 2 et les premières minutes de la saison 3. Il serait facile d’imputer cette confusion aux deux années séparant les deux évènements sur Netflix, mais que nenni. En réalité, une année entière s’est écoulée dans la petite ville d’Edda, mais cela, la série ne sera pas encline à le révéler de suite. Ce qui est, au mieux, un parti pris douteux, au pire le produit d’une soirée trop arrosée entre scénaristes.

 

Ragnarök : photoLes exécutifs en direction du bar le plus proche 

 

Mais d’un autre côté, puisqu’un peu de mystère n’a jamais tué personne, pourquoi pas ? Non, sérieusement, pourquoi pas ? Pourquoi ne pas introduire de nouveaux personnages sans préambule aucun, et les installer confortablement dans les vies de chaque protagoniste sans laisser à qui que soit la chance de s’attacher (ou non) à eux ?

Pourquoi ne pas bousculer les dynamiques entre les uns et les autres sans autre raison que celle d’un bon vouloir énigmatique et d’une poignée d’obligations narratives ? Pourquoi ne pas introduire de nouveaux enjeux sortis de nulle part et auxquels il est désormais crucial de se plier sans le moindre plaidoyer de la part de quiconque ? 

 

Ragnarök : photo, David Stakston« Je suis censé t’aimer, mais je te connais depuis deux minutes »

 

Il n’y a pas trente-six réponses à ces diverses questions, et d’aucuns seraient en mesure d’arguer que toutes se rejoignent : il n’y en a point. Rien ne peut justifier les retournements de situations figurés tout au long de ces six nouveaux épisodes, si ce n’est, à la grande limite, un coup de fil passé à la va-vite stipulant que cette saison serait la dernière.

En réalité, l’ensemble est si incohérent qu’il en devient inutilement difficile à regarder, tant et si bien que le spectateur aura tôt fait de s’interroger sur le pourquoi du comment plutôt que de se laisser aller au récit. Ou plus simplement, de se saisir de son alcool le moins cher et de tenter un cul sec à chaque absurdité ou indigence narrative, histoire d’ajouter un côté ludique à l’expérience.  

 

Ragnarök : photo, David StakstonOh no

 

mythologie nordique pour les (très) nuls

Après deux premières saisons relativement correctes, lesquelles se sont appliquées à bien établir les rapports entre sa diégèse et divers éléments de la mythologie nordique, ces nouveaux épisodes décident de brusquement changer de régime. Ce qui, en soi, n’a rien de dramatique, si tant est que l’on s’y prenne avec adresse. Bien évidemment, ça n’est pas le cas de Ragnarök puisque tout s’enchaîne simultanément beaucoup trop rapidement pour que quoi que ce soit ait du sens, et beaucoup trop lentement pour assurer une forme d’engagement ou une autre.

En réalité, c’est à croire que quelqu’un a laissé un cahier des charges en salle d’écriture, l’a échangé avec le bon sens, et a fermé la porte à clef en repartant. D’un coup d’un seul, la caractérisation de Magne s’envole par la fenêtre. Soumis à l’emprise de Mjöllnir, repensé pour l’occasion comme une version 2.0 de l’Anneau Unique, le pauvre bougre se mue peu à peu en Gollum à barbe à la botte de Saxa (si, si). La démarche est curieuse, pour le dire poliment, et vaguement récupérée par l’interprète du personnage, étrangement convaincant dans le rôle de son propre jumeau maléfique. 

 

Ragnarök : photo, Jonas Strand GravliAllez, dites bye bye à tout sentiment positif

 

Et en parlant justement d’ambiguïté morale, Laurits est définitivement le dommage collatéral le plus navrant de cette troisième saison. Une réalité d’autant plus douloureuse à accepter que la réincarnation de Loki était l’un des rares éléments franchement séduisants et charismatiques de la série. 

Désormais relégué au rang d’arrière-pensée glorifiée, l’unique personnage à être mi-Dieu mi-géant n’est plus que l’ombre de lui-même. Ses séquences se résument peu ou prou à nourrir son ténia-serpent au bord du lac et pleurnicher dans le col de son nouvel amoureux (sur lequel on ne s’attardera pas davantage, puisqu’il apporte autant d’intérêt au récit qu’une fourchette à un bol de soupe).

 

Ragnarök : photo, Jonas Strand Gravli, Vebjørn EngerEt bien lisse, la soupe

 

Si tout cela ne donne pas bien envie de connaître l’issue du Ragnarök titulaire, le sort réservé à la famille Jutul achèvera probablement de décourager le spectateur le plus téméraire. Initialement présentés comme une puissante famille d’industriels et jötnars plurimillénaires, les fameux Géants perdent ici toute once de superbe, réduits à l’impuissance la plus totale sans qu’on sache bien pourquoi.

Certes, le marteau-frisbee désormais forgé, les trois malheureux ont raisonnablement le droit de craindre pour leur statut et leurs vies. Néanmoins, le sentiment de terreur profonde que leur inspire l’objet entre les mains de Magne laisse gentiment dubitatif, et les manigances élaborées par la suite en vue de lui retirer l’arme des mains n’inspirent rien de beaucoup plus glorieux.

 

Ragnarök : photo, Theresa Frostad Eggesbø, Herman TømmeraasRIP

 

grands dieux, non

Si Ragnarök s’était contentée de jeter par la fenêtre ses trois qualités et d’achever son récit avec la dextérité d’un bambin découvrant le feutre, il aurait été possible de s’en accommoder. Il aurait été possible d’éteindre Netflix, de réfléchir un instant au gloubi-boulga narratif de cette troisième saison, soupirer un coup et passer définitivement à autre chose. Mais non, cela aurait été bien trop simple. Quelqu’un, quelque part, a préféré choisir la violence en choisissant sur quelle note achever la série.

S’il n’est nullement question de dévoiler les retors du twist final entre ces lignes, il s’agira néanmoins d’en adresser l’indigence quelques secondes. Que les producteurs de la série n’assument plus leur propre rejeton, qu’ils ignorent comment boucler l’aventure, ou décident tout simplement de jeter le bébé avec l’eau du bain est une chose. Mais rien ne justifie ou n’excuse ce genre de retournement à la mord-moi-le-noeud.

 

Ragnarök : photo, David StakstonHaha. Non

 

Pas si cela contredit tout ce qui a été construit jusque là sans la moindre recherche de continuité, ou explication quelconque. Et encore moins si rien de ce qui a été figuré tout au long des six épisodes de cette ultime saison n’a été pensé pour qu’une obscure logique puisse être observée malgré tout. Les détails de ce retournement de dernière minute sont en soi bien assez aberrants pour que la série ne feigne pas en avoir étudié les implications plus d’une demi-seconde.

À titre de comparaison, la bataille finale de Twilight était plus profonde et plus intelligemment construite que ce pitoyable bazar. C’est d’autant plus insolent qu’à ses débuts en 2020, la série prétendait à une métaphore et critique sociale, politique, et écologique. Un concept désormais lâchement abandonné comme on laisse son chien sur le bord de la route pour s’en aller en vacances.

A-t-on vu pire au département des foutages de gueule ? Très franchement, jury et jurés débattent encore la question. 

La saison 3 de Ragnarök est disponible en intégralité à compter du 24 août

 

Ragnarök : photo

Rédacteurs :
Résumé

Difficile de déterminer à quel moment il a été décidé qu'achever une série sur une note dissonante avec tout ce qui a été construit tout au long de trois saisons était judicieux, mais ça a bel et bien eu lieu. Le point positif étant que désormais, Ragnarök peut servir aux jeunes scénaristes de manuel à ne suivre sous aucun prétexte.

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Judge

CE N’EST PAS DANS SA TÊTE.

Vous êtes capables de le comprendre ou pas ???

Ce que « voit » Magne à la fin, ce sont les évènements qui se seraient déroulés s’il n’avait pas choisi la voie de la paix.
Et heureusement qu’ils l’ont fait, de montrer ça, sinon tous les trolls (Axelle Vacher en tête) auraient dit qu’ils étaient fainéant ou à court de budget.
L’esprit de Loki est respecté et transposé dans notre époque, comme Thor d’ailleurs, mis à la sauce 2023.
Superbe série donc, essayez de la révisionner sérieusement plutôt qu’en jouant à Candy Crush et ça ira mieux

Nextee

Si tout ça a eu lieux dans sa tête comment vidar est mort et comment le petit c’est pris la flèche dans l’oeil c’est trop de contradiction avec le scénario sans aucune explication c’est vraiment de la merde

Kivo

What a disappointing and boring season.
Please stop doing Nordic anthology related series

Ragnarok 29

Une série pourrie avec des absurdités en long en large et en travers! Que de temps perdu à regarder cette M****!

Kiwiz

Honnêtement j’ai trouvé cette série dans l’ensemble plutôt bien, mais j’ai aussi trouvé que la saison 3 manquait d’action et de frisson comme les saisons précédentes. Je suis d’accord avec certains commentaires qui sont d’ailleurs très réfléchis, sur le fait qu’on aurait pu anticiper ce qui aurait pu se passer depuis la saison 2. Il y a quelque indice qui nous permette de nous remettre dans la réalité que magne avaient des problèmes avec ça propre réalité, mais j’avoue que moi aussi au début j’ai étais un peu perturber par cette fin qui étais au final un peu compliquer à comprendre !.

Pascal78

Il n’y a personne qui voulait une bataille à la Marvel, et personne ne compare cette série au MCU. Que c’est insultant! Saison 3 pourrie et décevante comme la saison finale de Game of Thrones. Est-ce que ça aurait été si difficile de montrer une scène à la fin où on voit les vrais dieux non-réincarnés, dans Asgaard, fêter la victoire contre le Ragnarok avec les Géants du Jotunheim, afin qu’on soit pas dans l’impression que toute cette série d’événements au fil des saisons n’auraient été que du bidon? Comme cette impression à la fin de Game of Thrones où on se rend compte que toutes ces saisons n’ont servi à rien pour revenir au point de départ.

Kwitz

NUL NUL NUL c’est quoi cette fin de me*** … J’ai cru mourir quand j’ai vu le dernier épisode …
Après 2 saisons plutôt cool et attrayante .
La c’est du vrai foutage de gueule .

Bobi

Série ou j’ai accroché les 2 premières saisons mais on voit clairement qu’il ne savait pas comment la finir donc si simple de dire que c’était dans sa tête…
Alors qu’il n’y a aucun indice dans les 2 premières saisons…

Lokiel

J’aurais vraiment bien aimé avoir des arguments pour rejoindre la poignée d’irréductibles soutenant encore et toujours une saison 3 soi-disant « à la hauteur » des 2 premières (rien qu’à écrire ça j’ai mal).
Mais non les gens, y’a rien, y’a rien.
Les pires c’est les 3 cramptés qui pensent que l’immense majorité n’a simplement rien compris, et viennent expliquer ce qui est évidemment basique et accessible à tout le monde… Rangez votre attitude élitiste et méprisante, et votre binarité affligeante : si on n’a pas kiffé alors forcément on est fan de Marvel?? w*f xx’
Le nombre n’a pas tjs raison oui, mais là c’est juste 3-4 pélo qui après avoir bouffé la même merde que les autres viennent (essayer de) nous expliquer que si on n’a pas apprécié « bah c’est parce que vous avez le nez bouché et les papilles cramées ! » – tandis qu’eux seuls auraient su repérer les arômes fins et délicats d’une bouse qu’ils défendent tel un chef-d’œuvre incompris.

Comme beaucoup ici, j’ai adoré les 2 premières saisons, et j’ai regardé toute la 3e en attendant et espérant que resurgisse l’esprit, l’ambiance qui m’avait tant accroché. Ce qui est bien avec le Final, c’est que maintenant je n’attend plus rien, et la seule chose que j’espère c’est me contenter des saisons 1&2 si je veux me la refaire « en entier »…

ThorRagnarok

Critique exagérée, je ne pense pas qu’elle représente l’opinion générale des mortels. Pour moi la série était sympa, elle nous a faite vibrer depuis Hasgard. Certes la scène de bataille finale n’était pas du niveau Marvel et on a voulu mettre le doute sur la santé mentale de Magne mais je reste satisfait!