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The First : que vaut la série de SF sur la conquête de Mars du créateur de House of Cards ?

Par Alexandre Janowiak
25 septembre 2018
MAJ : 21 mai 2024
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The First se présentait comme une aventure épique de SF mais cette première saison se révèle plus un drame intimiste. Bonne ou mauvaise idée ? Verdict.

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The First se présentait comme une aventure épique de SF ultra-spectaculaire sur la conquête spatiale. Après visionnage des huit épisodes de la saison 1, le show de SF se révèle finalement plus un drame intimiste qu’autre chose. Bonne ou mauvaise idée ? Ecran Large dresse le bilan.

ATTENTION SPOILERS !

 

 

PAS PARÉ AU DÉCOLLAGE

The First est la nouvelle série de Beau Willimon. Le créateur et showrunner de House of Cards a quitté la série politique après quatre saisons quand Netflix l’a remercié dans des circonstances plus ou moins douteuses. Il s’est donc attelé à un nouveau projet de série chapeauté par Hulu, le concurrent direct de Netflix aux Etats-Unis, avec The First.

Dans un futur proche, une entrepreneure visionnaire (Natascha McElhone) mandatée par la Nasa dirige le programme Mars, qui vise à envoyer une équipe d’astronautes explorer la planète rouge. Malheureusement, le lancement de la fusée ne se déroule pas comme prévu. Tom Hagerty (Sean Penn), astronaute reconnu mais initialement écarté du programme en raison de problèmes personnels, est alors rappelé afin de sauver la mission… Et le destin de 8 milliards d’individus !

 

photo, Natascha McElhoneNatascha McElhone, l’Elon Musk au féminin

 

A première vue, The First se présentait comme une grande série de science-fiction sur la conquête spatiale et surtout sur la colonisation de Mars par les hommes. Cependant, l’on comprend très rapidement que les étoiles attendront. Dès l’ouverture de la série sur le lancement de la mission Providence 1, portée par la mise en scène pleine de tension de Agnieszka Holland et un montage ultra-percutant et rondement mené, les espoirs ou rêves de toute une nation (ou planète) s’effondrent lors de l’explosion en vol de la fusée. L’aventure tant attendue est stoppée nette dans son élan. Retour à la case départ donc pour les personnages et les spectateurs.

Une décision qui déconcertera assurément tous les spectateurs qui attendaient une grande dose de science-fiction dans The First. En effet, il faut attendre un long moment avant de retrouver une fusée au coeur de l’intrigue. En temps fiction, une vingtaine de mois environ avant l’arrivée d’une nouvelle fenêtre de lancement idéale. En temps réel, l’intégralité de la saison avant que la mission Providence 2 soit sur le point de prendre son envol.

 

PhotoEn marche pour Mars, avant le drame

 

LES PIEDS SUR TERRE

Tout au long de ses huit épisodes d’une quarantaine de minutes, la série garde donc finalement les pieds sur Terre. Si l’objectif Mars est dans tous les esprits, il passera après une grande remise en question des personnages et du monde. The First se concentre alors sur la vie des nouveaux astronautes en lice pour la nouvelle mission Providence.

Ce choix scénaristique de Beau Willimon est loin d’être une mauvaise idée. Malheureusement, il n’arrive pas à convaincre lors des quatre premiers épisodes de la saison. Agnieszka Holland et Daniel Sackheim ont beau faire un travail remarquable derrière la caméra (le 1 et 2 pour la réalisatrice, le 3 et 4 pour le réalisateur) et Adam Stone (chef op de Take ShelterMidnight Special) a beau magnifier chaque plan de la série, l’ensemble manque clairement de rythme quand les transitions sont carrément bancales (ces panneaux noirs inopportuns).

 

Photo Sean PennOn lèverait presque les yeux au ciel pour essayer de trouver une réponse à cet échec

 

Alors que les deux premiers épisodes passent encore pour lancer l’univers et présenter très brièvement la galaxie de personnages, les deux suivants sont d’une incroyable lenteur. L’écriture est soignée mais le quotidien des protagonistes ne captive jamais vraiment. En ligne de mire, le personnage de Sadie Hewitt (Hannah Ware) notamment. Les épisodes 3 et 4 se concentrent énormément sur elle et le choix effectué par Tom Hagerty (Sean Penn) la concernant pour la mission Providence 2.

Si la série recherche clairement l’empathie des spectateurs pour la jeune astronaute ou essaye de leur faire ressentir une quelconque émotion, l’échec est rude. Pas encore assez installée dans le récit à ce moment de la série ou, au contraire, devenue trop rapidement le centre des attentions sans qu’on ne comprenne réellement pourquoi, Sadie Hewitt n’émeut voire n’intéresse pas. Et concrètement, à mi-chemin de la série, ce manque de compassion ou d’identification est un constat global. Les personnages ne touchent pas (ou peu) et c’est un problème majeur qui empêche clairement la série de captiver.

 

Photo Hannah Ware, James RansoneAvant de décoller, Saddie Hewitt, le personnage d’Hannah Ware, ennuie profondément

 

VOYAGE AU COEUR DE L’HUMAIN

Heureusement, ce défaut de taille est balayé d’un revers de main lors de l’épisode 5. Réalisé avec brio par la réalisatrice Franco-Turque Deniz Gamze Ergüven (Mustang) – tout comme le sixième – c’est un épisode tournant dans le déroulé de The First. Les raisons du conflit quotidien entre Tom Hagerty et de sa fille Denise (incroyable Anna Jacoby-Heron) se révèlent au grand jour à travers des flashbacks bouleversants (superbe apparition de Melissa George). Le passé tragique des deux personnages est développé avec une sobriété poignante et permet surtout d’embrasser pleinement leur traumatisme.

Dès lors, les autres personnages deviennent également plus passionnants (leur destin étant lié de manière plus ou moins relative à celui de la famille Hagerty) et les émotions surgissent. Les différents choix professionnels et personnels de chacun deviennent alors des déchirements de tous les instants.

Mieux encore, les ultimes épisodes dirigés par Ariel Kleiman (passé par Top of the Lake) sont des modèles de réussite en terme de construction, réalisation et écriture. Dotés de vraies trouvailles esthétiques ou sonores (les sons de ce piano accordé qui deviennent la source d’une véritable tension), ils concluent parfaitement la saison.

 

Photo Melissa George, Anna Jacoby-HeronL’épisode 5 est un des plus beaux de l’année

 

Bien plus que la mission sur Mars et l’avenir, ce qui intéresse Beau Willimon dans cette première saison de The First, c’est de confronter l’humain (et donc le spectateur) à lui-même et à ce qu’il laisse derrière lui.

Le début de l’épisode 8, où paysages terrestres et martiens se succèdent, est une véritable lettre d’amour à la Planète Bleue et Mère nature. Cette Terre qui a tant (tout) donné à l’Homme mais qu’il n’a pas su (voulu) protéger. Celle qu’il préfère fuir pour une autre qui le fait rêver mais qui ne lui offrira sans doute jamais autant qu’elle n’a pu le faire. Loin d’une série de SF, The First est donc surtout un pamphlet environnemental et un drame intimiste sur l’Humain, ses choix, ses émotions, ses erreurs…

D’ailleurs, dans un dernier élan d’anti-spectaculaire presque militant, The First décidera carrément de vivre (quasiment dans son intégralité) le décollage de Providence 2 dans le couloir morne de la base de lancement, préférant regarder vers le sol que lever la tête en l’air. Le moyen de livrer, à travers des échanges de regards doux et bienveillants, des sourires apaisés ou des larmes apeurées, une des scènes les plus émouvantes de l’année sur petit écran. Terrassant. 

 

Photo Anna Jacoby-Heron, Sean PennLa vie se vit à plusieurs et ensemble

 

Dans un premier temps, la saison 1 de The First s’avère lente et fastidieuse avant de pleinement prendre son envol dans un tourbillon émotionnel d’une sobriété déchirante. Un choix artistique (et narratif) risqué qui évincera nombre de spectateurs qui n’auront pas la patience d’attendre une moitié de saison avant de véritablement s’ancrer dans le show de Beau Willimon.

Mais au fil des épisodes, le choix du créateur d’House of Cards apparaît logique. Après tout, entre préparation mentale et physique, la conquête spatiale se mérite. Et à l’image de cette mission sur Mars, The First et ses multiples qualités aussi. La série prend donc son temps pour observer avec attention le monde qui l’entoure, tout comme chacun se plaît à observer en silence le ciel étoilé d’une belle nuit d’été.

La saison 1 de The First est disponible en intégralité sur OCS Go en France depuis le 9 octobre 2018.

 

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Kikko

Une belle interprétation, avec une psychologie des personnages très crédible. Un Penn spartiate, à la fois brutal et attendrissant… C’est vrai qu’on attend un peu le décollage final, mais au fond, s’envoler vers le septième ciel après un peu d’attente, n’est-ce pas là le secret du plaisir ? On like… La suite, vite !

Garibert

Magnifique construction des personnages. Et il faut bien un peu de temps pour pénétrer ces personnalités tourmentées et mesurer les enjeux des décisions auquels elles vont être confrontées. Alexandre Janoviak a raison, cette série est beaucoup plus ambitieuse qu’une simple balade vers un ailleurs lointain. On ne peut vraiment partir qu’en mesurant pleinement pourquoi on le fait et ce qu’on laisse derrière soi. Voilà enfin un beau voyage cinématographique à notre portée.

Verov

Complément séduite par ce parti pris j’ai regardé les 8 épisodes à la suite

Pheel

Sean Penn magistral, une série qui prend une véritable orientation humaine, j’ai avalé les 8 épisodes sans voir le temps passer…. encore svp !

Bebapellula

Tout simplement magnifique !

yellow submarine

Superbe série. J’ai avalé les 8 épisodes en un rien de temps.

Un vrai régal de s’attacher à l’aspect humain de cette aventure.

Mention spéciale à Natascha McElhone. J’aime beaucoup son évolution tout au long des épisodes.

Vivement la saison 2

djleclown

j’adore ; très bonne série ce n’est pas de la sf c’est juste bien écrit très bien joué, vraiment top, Mars peut attendre !

Deny

Belle affiche

roshi

Dommage, j’aurais bien voulu regarder la serie, mais pas de vf dispo..

chmick

Sans intérêt. Du soap de base , avec un emballage pseudo SF pour essayer de faire de l audience chez les geeks .
Mais en gros regarder le premier et le dernier episode suffit. Le reste n est que du remplissage.