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Spawn : autopsie du dessin animé culte, ramené de l’enfer par HBO

Par Simon Riaux
25 juillet 2020
MAJ : 21 mai 2024
4 commentaires

Oubliez le film de sinistre mémoire : l’infernal Spawn a déjà connu une sublime adaptation : un inoubliable dessin animé produit par HBO.

comics

Connu des lecteurs de comics comme le plus profond et passionnant anti-héros recraché par le XXe siècle finissant, resté dans les mémoires des cinéphiles comme l’adaptation la plus vomitive jamais engendrée par le 7e Art, Spawn, c’est aussi un dessin animé prodigieux diffusé par HBO, sur lequel il était urgent de revenir. Bienvenue en enfer.

Après avoir participé à la renaissance de Spider-Man dans les années 90, Todd McFarlane est devenu un emblème de la bande-dessinée américaine en créant son propre héros : Spawn. Ancien militaire trahi et assassiné par ses frères d’armes, Al Simmons se voit proposer un marché par le démon Malebolgia. En échange de son âme et du serment de mener les troupes des enfers lors de l’Armageddon à venir, il pourra revoir son épouse sur Terre. 

Devenu le héraut surpuissant du 8e Cercle des Enfers, Simmons est désormais un Hellspawn, qui échoue dans le quartier New Yorkais de Rat City cinq ans après son décès. La mémoire en charpie, le corps indestructible, mais déformé par les stigmates de son assassinat, il va devoir trouver sa place dans un monde violent et corrompu, tandis qu’il questionne l’allégeance aux démons qui ont fait de lui un redoutable colosse. Une idée dont l’artiste tirera un comics au succès cométaire, et dont HBO adaptera une série remarquée, composée de trois saisons pour un total de 18 épisodes.

 

photoLe rouge est mis

 

RHABILLER BATMAN POUR L’HIVER 

En 1992, la Fox a frappé un grand coup avec Batman, la série animée. Créée par Bruce Timm et Paul Dini, la série (à laquelle nous avons consacré un dossier) s’est instantanément imposée comme un standard en matière d’adaptation, d’exigence artistique et de maturité narrative. Malgré une cible d’audience résolument jeune, le dessin animé parvint rapidement à proposer une vision puissante de son matériau original, s’adressant aussi bien aux enfants qu’aux ados ou adultes amateurs de mise en scène affirmée et de comics. Un succès doublé d’un plébiscite, qui devait rapidement donner des idées aux concurrents de la chaîne. 

 

photo, Batman, Robin« Alors c’est à cause de nous si le type en cuir avec des chaînes fout le bordel, c’est ça ? »

 

Gargoyles, les anges de la nuit (dont on vous cause en détail par) fut un de ses descendants les plus réussis et appréciés, mais en 1997, HBO se lance à son tour dans l’aventure animée en opérant un pari éminemment risqué : transposer le comics ténébreux de Todd McFarlane, alors même qu’il vient de s’illustrer à travers une adaptation cinéma qui compte encore aujourd’hui parmi les plus lamentables et décriées du genre (ce qui n’est pas peu dire). Mais pour mener à bien cette entreprise, la chaîne câblée va puiser une partie de son inspiration à la source du Chevalier Noir. 

Bien sûr, quantité des passerelles entre Spawn et Batman étaient déjà présentes sur le papier, et pour nombre d’entre elles, se retrouveront naturellement à l’écran. Mais HBO va aller plus loin, en recrutant une partie de l’équipe technique de la série Fox. Ces transfuges sont évidents sitôt que l’oncompare le style graphique des deux créations. L’emphase sur les ombrages, un trait qui respecte la création de McFarlane tout en calant le design de ses personnages, en particulier leurs visages, volontiers anguleux et volontaires, tout comme le découpage de certaines scènes emblématiques, puisent directement du côté de Batou. 

 

photo« ,Mais où est Alfred ? »

 

Ce constat est frappant lorsque Spawn est amené à questionner ou malmener des personnages secondaires, ces scènes d’interrogatoires renvoyant évidemment à leurs équivalents dans Batman, la série animée. Il en va de même pour l’usage de certains décors, notamment ceux contenant d’immenses fenêtres ou baies vitrées, qui partagent avec l’oeuvre de Dini et Timm un amour immodéré pour la gestion de l’espace popularisée par l’expressionnisme allemand. D’ailleurs, les nombreux plans chauves-souris laissent peu de doute quant à l’envie de dragouiller l’imagerie du Chevalier Noir. Le public ne s’y trompe pas, surnomme rapidement le cartoon « Spawn, the animated series », comme pour souligner encore plus sa parenté avec son cousin de Gotham.

Enfin, il n’est sans doute pas anodin que cette direction artistique ait rapidement évolué au cours de la première saison, pour se reconnecter, épisode après épisode, à la charte imaginée par Todd McFarlane. Plus qu’une hésitation plastique, il faut peut-être y voir la volonté manifeste d’accueillir la génération de spectateurs qui a découvert Batou cinq ans plus tôt, et peut désormais s’aventurer chez un autre genre de justicier nocturne, infiniment plus désespéré et violent. 

 

photoBatman n’a qu’à bien se tenir

 

DESSINER LE CINÉMA 

Pour comprendre en quoi Spawn capitalise sur l’héritage de Batman, mais se propose de l’emmener sur un tout nouveau territoire, il suffit de poser les yeux sur la scène d’ouverture du pilote. En apparence, il correspond totalement au canon super-héroïque qui règle l’univers de Gotham City. Des truands agressent des quidams, avant d’être interrompus par notre héros. Esthétique de film noir, irruption d’un justicier… ce beau programme va soudain dévisser. 

Coupables et victimes se verront équitablement massacrés par Spawn dans un déluge de violence, quant au protagoniste, très loin de débarquer en sauveur, il ignore manifestement qui il est, ce qui le pousse à agir et pourquoi il est mû par une inextinguible soif de violence. En moins de cinq minutes, le plus banal des sauvetages s’est mué en une boucherie incontrôlable. Et le sentiment de vertige qui saisit le spectateur, le mélange d’adrénaline et le désespoir qui suintent de l’écran proviennent directement de la mise en scène. 

 

photoDes plans impressionnants, parfois presque abstraits

 

Il n’est de prime abord pas évident de distinguer ce qui fait du dessin animé une œuvre si singulière, au-delà de sa luxueuse facture et de son animation particulièrement soignée pour l’époque. L’élément distinctif, qui fait beaucoup de la puissance de la série, c’est la force de ses cadres. Plutôt que d’adopter les codes des cartoons du moment ou d’embrasser les motifs du genre, le dessin animé opte pour un découpage et un usage de la lumière hérités du cinéma live. 

Gore, mais usant volontiers d’images dans l’image, rendant perpétuellement hommage à différents courants cinématographiques, Spawn se pense comme un long-métrage, jusque dans sa narration. En effet, il ne suffit pas d’emballer un stupéfiant hommage à la Hammer quand le héraut des enfers se confronte à sa propre tombe et la dépouille qu’elle contient, pour faire vœu de maturité. 

C’est notamment dans la structure de ses épisodes que l’ensemble se démarque. Les dessins animés sont alors ultra-majoritairement bâtis autour d’épisodes autonomes, n’entretenant que très peu de continuité les uns avec les autres, afin de ne pas perdre de jeunes spectateurs au visionnage erratique, tout en s’autorisant à en accueillir de nouveaux en cours de route. Le cartoon qui nous intéresse rompt avec cette tradition et déroule sa narration au long cours, quitte à désarçonner un public qui entamerait l’aventure de manière erratique. De même, le dessin animé ose dévoiler son univers par à coups, de manière non-linéaire (il faudra plusieurs épisodes avant que les origines de Spawn soient révélées), témoignant ainsi de ses ambitions narratives élevées, fussent-elles à rebours du médium. 

  

photoSpawn en chaîne

 

NOTHING MORE THAN FEELINGS 

La noirceur de Spawn ne fait jamais office de coquetterie. Tout comme les gerbes de sang qui strient l’écran ne sont pas là pour la frime, les ténèbres où se noie l’iconique anti-héros sont avant tout un vecteur émotionnel. Et c’est ce qui achève de faire des 18 épisodes de la série un morceau de bravoure auquel un cercle de fans voue encore un culte passionné : sa capacité à nous immerger dans les tréfonds d’une âme en peine, dont les tourments s’avèrent universels, et déchirants à plus d’un égard. 

La quête de vengeance d’Al Simmons pourra évoquer le parcours du héros de The Crow, mais il est loin d’en constituer un pâle écho. Plus que l’écriture des troubles qui l’écorchent, c’est l’interprétation que nous en propose HBO qui marque l’esprit. En confiant son premier rôle à l’impérial Keith David (The Thing, Invasion Los Angeles, Armageddon, Community) le cartoon s’est attiré les services d’un interprète brillant, capable de porter sur ses épaules un rôle au prisme émotionnel terriblement vaste. 

 

photoUne valse avec son propre cadavre…

 

À l’aise avec la pose inhérente aux actions de bravoure de Simmons, aussi bien qu’avec l’emphase inhérente à ses lamentations baroques ou ses multiples introspections, le comédien taille dans le granit, d’une voix reconnaissable entre mille, une cartographie mentale fascinante. Jamais le rejeton des enfers n’a paru aussi réel, aussi cruellement humain. 

Mais cette création diabolique ne serait peut-être que l’ombre d’elle-même sans les partitions inspirées de Shirley Walker. La musicienne fait preuve d’une gravitas qui ne sombre jamais dans le ridicule, tandis qu’elle illustre la désespérance manifeste de Spawn, ou qu’elle bâtit des chapes sonores entêtantes, qui semblent s’insinuer dans chaque image. Sans doute consciente de la grandiloquence de l’ensemble, mais aussi des motifs qui traversent alors la pop culture, elle livre des partitions à mi-chemin entre le happening gothique et l’efficacité brute du jeu vidéo (comment ne pas penser ici et là au design sonore de l’excellent Nightmare Creatures, qui mit à rude épreuve la pulpe des pouces des joueurs de Playstation). 

S’inspirant d’un de ses plus glorieux aînés, se payant le luxe d’en remontrer au cinéma live le plus accompli, et porté par une interprétation fantastique, les trois saisons de Spawn produites par HBO demeurent une éclatante réussite. Sachez d’ailleurs qu’il est possible de s’y jeter pleinement grâce à OCS en France, où les trois saisons sont disponibles en intégralité. 

 

affiche

 

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BATMALIEN

Dessin animé génialissime : ambiance, histoire, persos, dialogues, musique, animation, lumière, tout est excellent. Seul bémol : la « fin » frustrante qui laisse un goût d’inachevé. On sent bien que les audiences ne devaient pas être dingues donc HBO a dû stopper net la production d’une 4ème saison qui aurait pu conclure tous les ars narratifs. Vraiment dommage.

bowser

dommage qu’il ne continue pas cette série avec d’autre personnages qui rencontre le chevalier des enfers du genre « wildcats » ou « x-men » ou autre et leur met une raclée bien sur .
Ghost rider et spawn ce serez pas piquez des annetons .

Ludwig Van

Il y a 3 saisons.

Sergio

Une adaptation parfaite du comics ! Juste dommage qu’il n’y est qu’une malheureuse saison…